C'était en juin 2013. Le matin, dans le TGV qui l'amène à Paris, Éric Longuépée n'a pas un sou en poche et est à deux doigts d'arrêter son projet d'entreprise. Le soir, en rentrant à Nantes, miracle ! Il a finalisé le tour de table qui lui permet de lancer son entreprise. Cette journée folle débute véritablement à 15 heures. Éric Longuépée a rendez-vous chez l'une des cadres dirigeantes de Free, Angélique Gérard. Une copine d'enfance. « On s'est parlé 20 minutes. De tout et de rien. Je lui ai rapidement présenté mon projet et elle a dit banco », raconte Éric Longuépée. Trois heures plus tard, le Nantais a un autre rendez-vous. Avec Béatrice Arosio, la fille d'un des créateurs de Hachette. Elle aussi décide de soutenir la création de Simply Move. « Elle, je ne la connaissais pas. Je l'ai rencontrée par l'intermédiaire d'un avocat luxembourgeois que j'avais vu un jour à Paris. Quelques mois plus tard, il m'a recontacté pour me mettre en relation avec elle », explique-t-il. Les deux femmes apportent 110.000 euros à Éric Longuépée. Celui-ci complète le tour de table en passant quelques coups de téléphone à des amis auprès desquels il collecte 30.000 euros.
Business model à trois bandes
En moins de 24 heures, l'entrepreneur lève donc les 140.000 euros qui lui permettent de lancer Simply Move, un site internet aidant les particuliers à déménager et qui emploie aujourd'hui quatre personnes. En plus de conseils pratiques, le site met en relation les particuliers avec des entreprises telles que des déménageurs, des loueurs de camions ou des assureurs. Un business model à trois bandes. Pour le particulier, l'accès au site internet est gratuit. Ce public, Éric Longuépée le touche en s'appuyant sur des réseaux immobiliers qui adressent un service supplémentaire à leurs clients, en utilisant à leur marque la plate-forme de Simply Move. Pour eux, le site est un service quasi gratuit, les agences paient juste des frais d'installation. Ceux qui rémunèrent la start-up nantaise, ce sont les déménageurs et les entreprises qui proposent des offres commerciales via Simply Move. Car le coeur du business de la start-up, c'est de l'intermédiation entre les personnes qui déménagent et celles qui ont un produit ou un service à leur vendre.
La loi du nombre
Coucher sur le papier ce concept est une chose. Ce n'est pas ce qui aura demandé le plus d'efforts à Éric Longuépée, un ancien cadre de la presse immobilière qui s'y connaît en déménagement pour avoir changé sept fois de domicile en dix ans. Réussir à transformer cette idée en entreprise s'avère beaucoup plus ardu. Car la journée casino de juin 2013 n'est que la face visible de l'iceberg. Auparavant, Éric Longuépée a passé trois ans à monter son projet. Et à le présenter. Aux amis, aux amis des amis, aux parfaits inconnus. « J'ai parlé de ce projet à des centaines de gens, tenté d'ouvrir des centaines de portes. Ma stratégie, c'est un peu la loi du nombre », expose Éric Longuépée. Comme beaucoup de créateurs, il faut savoir faire contre vents et marées. « Beaucoup de gens m'ont dit que mon projet d'entreprise était une bonne idée et beaucoup d'autres m'ont pris pour un fou », relate l'entrepreneur. Le créateur s'investit sans compter : « J'ai été cadre sup, je gagnais bien ma vie. Et là, j'ai vendu ma maison, investi plus de 100.000 euros à titre personnel ». Et s'obstine. « Je me suis accroché. Il y a deux histoires qui m'ont aidé à tenir. Celle du créateur de KFC. Et celle de Walt Disney, qui a été voir des dizaines de banques. À chaque fois, on lui a ri au nez... ».
En quête de 300.000 euros
Au lendemain de son premier exercice, Simply Move n'est pas encore rentable, son dirigeant ne dévoilant pas son chiffre d'affaires. Mais nourrit de grands espoirs. « L'an passé 120.000 personnes ont utilisé notre service qui a séduit 30 réseaux immobiliers », expose le chef d'entreprise, qui compte accélérer : « Dans trois ans, l'objectif, c'est d'être le service client de la moitié des agences immobilières en France. Aujourd'hui, on en a 2 % », fixe-t-il. Les ambitions ne se limitent pas au seul marché domestique, l'entrepreneur commençant à réfléchir à l'international. Pour continuer à développer sa start-up, Éric Longuépée est en quête de 300.000 euros. L'occasion d'un nouveau tour de table express ?
Le matin, Éric Longuépée n'a pas un rond pour lancer son entreprise. Le soir, il a convaincu plusieurs investisseurs et peut lancer Simply Move, un site d'aide au déménagement. Retour sur une de ces journées où la vie d'une start-up bascule.
