Armoric Holding ravive la flamme des véhicules anti-incendie de Sides
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Armoric Holding ravive la flamme des véhicules anti-incendie de Sides

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Le fabricant de camions de lutte anti-incendie Sides a remporté un appel d’offres à 25 millions d'euros auprès de l’armée française. Un an après avoir frôlé la liquidation judiciaire, la PME de Saint-Nazaire, reprise par le breton Armoric Holding, renoue avec la rentabilité et envisage même l'avenir sereinement.

La nouvelle équipe dirigeante de Sides. De gauche à droite : Jean-Emmanuel Fournier, directeur général adjoint, Roland Grilleau, ancien PDG et conseiller stratégique, Frédéric Louis, président de Armoric Holding, Mickael Guillou, directeur général de Sides et Benjamin Coustillier, directeur de Sides Service. — Photo : JDE

C’est une victoire qui a un goût de revanche pour Sides. La PME nazairienne (180 salariés, 51 M€ de CA) a remporté, sur le fil, face au numéro un mondial du secteur, l’autrichien Rosenbauer (2 500 salariés, 8,5 Md€ de CA), l’appel d’offres lancé par l’armée française pour la livraison de 50 camions de lutte anti-incendie destinés à ses aéroports militaires.

«  La négociation a été chaude », se rappelle Benjamin Coustillier, directeur Services et Militaire chez Sides. Le suspense aura duré huit mois. Cette commande de 25 M€ est tombée avant Noël, comme une libération pour les 180 salariés de ce fleuron local qui avait frôlé la liquidation judiciaire il y a 18 mois. Le chiffre d’affaires est passé de 38 M€ en 2017 à 51 M€ en 2018 avec un résultat net passé de - 8 millions à 0,3 million d'euros.

Dix ans avec des actionnaires étrangers

À l’époque, aucun candidat ne se présente à la reprise, à l'exception d'Armoric Holding, une PME industrielle (80 M€ de CA, 400 salariés) inconnue des Nazairiens, basée à Trémeur, dans les Côtes-d’Armor. L’arrivée de ce breton spécialisé dans la fabrication de camions hors norme pour la défense, la sécurité et l’agriculture, est observée avec méfiance par les salariés. Ils ont vu défiler ces dix dernières années pas moins de dix dirigeants différents. « Il y en avait un nouveau chaque année ! », se rappelle l'un des cadres dirigeants.

Deux actionnaires étrangers se sont succédé cette dernière décennie au volant de Sides : d’abord le géant américain United Technologies Corporation (65 Md$ de CA en 2018) puis la holding allemande Bavaria Industriekapital. « Nous n’avons jamais vu leurs présidents à Saint-Nazaire », rapporte l’un des cadres. Cette instabilité managériale, conjuguée à des choix stratégiques malheureux, ont plombé les comptes et fait monter la tension sociale. Dans ce contexte, en 2017, personne ne veut reprendre Sides, sauf Armoric Holding qui compte en faire un champion européen du véhicule terrestre de sécurité. Le groupe breton y voit l’occasion de se diversifier encore sur le marché de la sécurité, en créant des synergies avec ses six autres sites industriels français.

Son PDG, Fredéric Louis est un habitué du sauvetage d’entreprise. C’est alors la troisième fois en huit ans qu’il reprend avec ses deux associés une entreprise en difficulté. « C’est le commissaire au redressement productif des Pays de la Loire qui m’a contacté  », se souvient le Breton. Il est connu des services pour avoir relevé deux entreprises en difficulté dans le Loir-et-Cher (Scomoa et Prolitol). Il applique alors la même formule.

Sa force est sa production locale

Il commence par réorganiser l’équipe dirigeante. Deux cadres dirigeants sont licenciés pour faute. « Rendez-vous compte, il y avait 8 millions de pertes, c’est grave ! », justifie-t-il. Lui décide de nommer des gens qui connaissent parfaitement les camions : Mickaël Guillou, directeur général, qui a commencé sa carrière chez Sides en tant que stagiaire, il y a 24 ans, et qui connaît la maison de fond en comble et Roland Grillaud.

L’ancien directeur général, parti à la retraite en 2006, avait dirigé l’entreprise pendant 38 ans, à l’époque où elle était dans le top 5 mondial. Aujourd’hui elle est plutôt redescendue à la quinzième place. « Tous les salariés me parlaient de lui avec nostalgie, j’ai voulu le rencontrer », explique Frédéric Louis. Le retraité devient son conseiller stratégique.

Diversification sur les transports de fonds

Ensemble, ils décident de revenir à ce qui a fait la renommée de Sides. La PME réinternalise toute l’activité de création des composants des camions qui avait été sous-traitée par les actionnaires précédents. Chaudronnerie, soudure, traitement de surface, peinture, Sides fabrique les pompes à eau et tous les éléments qui transforment un camion en véhicule anti-incendie. C’est son avantage concurrentiel. « Avec Rosenbauer, le n°1 mondial, nous ne sommes que deux à le faire  », explique Mickaël Guillou. C’est ce savoir-faire qui lui permet de capter les clients, en proposant un service de maintenance, de remplacement de pièces et de formation des pompiers. C’est notamment ce qui a convaincu le SDIS d’Ile-de-France de commander 10 camions, soit un contrat de 10 M€.

Parallèlement, Frédéric Louis fait travailler les synergies de groupe. Grâce à ses relations à l’export, Sides remporte un appel d’offres pour la livraison de trois camions anti-émeute pour Hong-Kong. C’est un nouveau marché qui s’ouvre pour Sides, avec la construction de véhicules de transports de fonds que Frédéric Louis voudrait développer. Il envisage d’étendre le site de 2 000 m² dans quelques années pour cela.

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