Après Notre-Dame-des-Landes, les pistes pour désenclaver l'Ouest
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Après Notre-Dame-des-Landes, les pistes pour désenclaver l'Ouest

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Passé le choc de la nouvelle, les territoires de l’Ouest s’organisent. Après l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, une infrastructure sur laquelle tous les acteurs de l’Ouest s’étaient projetés ces 40 dernières années pour faire décoller leur attractivité, chacun désormais rebat ses cartes et demande des compensations au gouvernement. De Brest à Angers, revue des pistes à l’étude pour faire décoller l’Ouest.

Aéroports, trains, routes... les priorités changent selon les territoires suite à l'abandon du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) — Photo : Infographie Agence A noir pour Le Journal des Entreprises

La ministre des Transports Élisabeth Borne s’est donné jusqu’à l’été pour trancher et décider des compensations à accorder à chaque territoire. Cela fait des années que des gros projets d’infrastructure de transports sont mis en sommeil à l’Ouest, dans l’attente d’une décision sur le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Le couperet enfin tombé, de Brest à La Roche-sur-Yon en passant par Angers, force est de constater que l’Ouest a des atouts à valoriser.

L’aéroport Nantes-Atlantique pourra-t-il relever le défi ?

Franchissement de la Loire, fluidification du périphérique et des routes, élus et acteurs économiques s’accordent tous à dire que la priorité absolue pour Nantes est d’améliorer la circulation entre le sud et le nord de la métropole. La deuxième est d’obtenir le plus tôt possible des trains plus rapides entre Nantes et Paris. Reste toujours la question de l’aéroport qui n’est pas résolue.

Quid de l’avenir de Nantes-Atlantique maintes fois déclaré saturé selon le concessionnaire Vinci ? Si beaucoup s’inquiètent, d’autres s’avèrent plus optimistes. C’est le cas de Jacques Bankir, un ancien de la direction d’Air France. « La saturation est relative. À Porto par exemple, avec une seule piste de même taille située elle aussi à côté de la ville, Vinci arrive à accueillir 10 millions de passagers. La saturation, cela dépend des amplitudes horaires de l’aéroport et de la souplesse des contrôleurs aériens, pas de la géographie des lieux », explique cet ancien directeur régional de Régional Airlines, compagnie aérienne basée à Nantes, entre 2001 et 2005.

« La saturation ne dépend pas de la géographie des lieux » Jacques Bankir, ancien directeur régional de Régional Airlines, à Nantes.

Selon lui, Nantes Atlantique pourrait facilement accueillir entre 10 et 15 millions de passagers. Et pas besoin pour cela d’investir plus de 300 M€. C’est ce que coûterait selon lui la construction d’une nouvelle aérogare pour accueillir les compagnies low-cost, les travaux pour revoir la desserte de l’aéroport et la création de parking en silos. Sans oublier la piste, à moderniser. De loin le plus gros chantier. « La DGAC est de mauvaise foi quand elle dit qu’il faudrait transférer l’aéroport à Saint-Nazaire le temps des travaux, on peut très bien refaire la piste par petits bouts, la nuit. Et en profiter aussi pour, comme à Nice, imposer un couvre-feu pour éviter les vols de nuit et les nuisances sonores », affirme Jacques Bankir.

En Finistère, l’urgence est le train, pas l’aérien

La remise du « rapport Duron » au gouvernement début février, préconisant un report à après 2038 du projet de ligne de train à grande vitesse, reliant Brest et Quimper à Rennes en 1 h 30 (3 heures de Paris), aura eu un effet assez rare : une levée de boucliers quasi unanime des élus finistériens. Le président Emmanuel Macron estimant les conclusions de ce rapport caduques après l’abandon de NDDL, la pointe bretonne espère qu’il tiendra l’engagement de se baser sur le Pacte d’accessibilité porté par la Région Bretagne pour son désenclavement. Un projet qui ne concerne pas que le ferroviaire, puisqu’il inclut aussi la mise en 2 x 2 voies de la RN 164 dès 2020, et un meilleur maillage du très haut débit internet.

Côté aéroport, Brest n’a pas attendu l’abandon de Notre-Dame-des-Landes pour se développer : « L’impact aurait été quasiment nul pour l’aéroport de Brest », souligne Frank Bellion, président de la CCI métropolitaine Bretagne ouest. Majoritaire dans le consortium Rein Lusk, qui gère les aéroports de Brest et Quimper, la CCIMBO avait même annoncé dès l’automne dernier un plan de 15 M€ d’investissements sur cinq ans, qui permettraient d’atteindre 1,6 million de passagers en 2022. Elle ambitionne aussi de développer sa part d’export par le fret cargo, demandé par les entreprises locales de l’agricole. Dès 2018, de nouvelles lignes régionales et internationales régulières sont ajoutées, confirmant l’intérêt que portent les compagnies aériennes, notamment low-cost, à Brest.

Rennes veut plus de TGV vers Roissy

Pour garder son attractivité, Rennes miserait plus sur le train que sur son aéroport. En effet, même si l’aéroport de Rennes-Saint-Jacques présente un trafic en hausse de 10 % par an, il ne risque pas de concurrencer celui de Nantes. « L’aéroport de Rennes a vocation à accueillir 1,5 million de passagers », avait affirmé Élisabeth Borne, ministre des Transports en déplacement à Rennes courant janvier. Il en accueille pour le moment moitié moins. Et impossible pour lui de s’étendre davantage compte tenu de la géographique des lieux. Seule une extension de l’aérogare est prévue.

Du coup, les élus militent en premier lieu pour une meilleure connexion en train vers Roissy et Orly. Car si Rennes s’est considérablement rapproché de la capitale avec la LGV (21 TGV directs, 1 h 25 de temps de transport), cela est vrai pour Paris-centre, seulement. Rallier Roissy Charles-de-Gaulle, lieu névralgique pour voyager à l’international, est une autre paire de manches. Seuls trois TGV directs desservent l’aéroport aujourd’hui.

Angers veut redécoller dans l’aviation d’affaires

La fréquentation de l’aéroport d’Angers-Loire a chuté de 40 % entre 2016 et 2017 mais avec l’abandon du projet à Notre-Dame-des Landes, Jean-Pierre Bernheim, vice-président d’Angers Loire métropole pense que l’aéroport angevin a une carte à jouer.

« Il peut être un outil complémentaire à Nantes-Atlantique et servir de soupape, capable d’absorber plusieurs dizaines de milliers de passagers par an, sur des vols charter », estime-t-il. L’infrastructure d’Angers aurait notamment une belle perspective de développement dans les voyages d’affaires. « Pour ce type de déplacement, on évite les grands aéroports et on préfère les structures plus petites. Plusieurs avions de 3 à 10 places sont d’ailleurs disponibles pour l’aviation d’affaire à Angers-Marcé. Il faudrait les mutualiser pour qu’ils soient plus utilisés », propose Jean-Pierre Bernheim.

Petits aéroports : le potentiel de Quimper, Dinard et Lorient

Il accueille autour de 85 000 passagers par an, l’aéroport de Quimper se bat actuellement pour conserver sa ligne régulière vers Paris. Celui de Dinard qui a accueilli 120 000 passagers l’an dernier, pourrait bientôt décoller grâce aux touristes attirés par la proximité du Mont-Saint-Michel. La commune du Mont-Saint-Michel vient en effet d’autoriser l’aéroport de Dinard à utiliser son logo. Essentiellement porté par les liaisons avec Porto et Londres, l’aéroport de Lorient, lui, cherche des nouveaux partenaires, après avoir accusé une baisse de 50 % de son trafic en dix ans.

La Roche-sur-Yon veut "soulager" Nantes

Pour l’aérodrome de La Roche-sur-Yon, l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes est une chance à saisir. « Nous avons des contacts avec des compagnies aériennes pour des liaisons vers Lyon ou Nice. Quand nous allons sur les salons spécialisés, notre outil est connu et reconnu pour sa qualité et son emplacement », affirme Luc Bouard, maire et président de l’agglo de La Roche-sur-Yon, propriétaire de l’aérodrome. Plus de 1,5 M€ d’investissements est prévu pour accueillir des avions de 75 places d’ici à 2020.

« L’engorgement de Nantes-Atlantique est inéluctable. Il faudra être capable de soulager le trafic, y compris sur de courtes périodes. Non seulement sur l’aviation d’affaires à destination du Sud-Loire mais aussi pour des vols touristiques. Pourquoi ne pas envisager un accord avec Nantes-Atlantique pour délester certains vols à La Roche-sur-Yon durant 4-5 mois ? », explique Luc Bouard. Il travaille actuellement pour accueillir des vols ayant décollé hors de l’espace Schengen.

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