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Comment IMA Technologies a libéré le dialogue social
Interview Nantes # Services

Christophe Collignon directeur général et Éric Mainguet Comment IMA Technologies a libéré le dialogue social

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Hiérarchie simplifiée, initiative redonnée aux salariés, confiance... IMA Technologies, société de relations clients basée à Saint-Herblain, s'est lancée depuis 2012 dans une démarche de libération. Comment se construit le dialogue social dans ce contexte ? Réponse à deux voix de Christophe Collignon, directeur général, et d'Éric Mainguet, délégué du personnel.

— Photo : Le Journal des Entreprises

Le Journal des Entreprises : Christophe Collignon, vous êtes le directeur opérationnel d'IMA Technolgies, une entreprise qui a réalisé 21 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2014 et emploie 390 personnes. De qui ou de quoi avez-vous voulu libérer vos salariés en vous lançant dans une démarche de libération en 2012 ?

J'ai entendu parler de la "libération" par Alexandre Gérard, dirigeant de Chrono Flex, puis j'ai lu le livre d'Isaac Getz "Liberté & Cie". J'ai trouvé des idées pleines de bon sens qui répondaient aux questions que je me posais depuis quelque temps. Je n'avais pas osé les mettre en application car elles ne correspondent pas vraiment à l'orthodoxie en termes de management. Mais j'en avais assez d'un système fondé sur l'autorité, l'information non partagée et qui ne respectait pas le statut d'adulte de la personne dans l'entreprise. Après avoir expliqué la démarche de libération au Codir puis à l'ensemble des salariés, nous l'avons donc mise en place à partir de 2012.

Comment cela s'est-il traduit concrètement ?

C.C. : Nous avons supprimé un niveau hiérarchique et des signes extérieurs de pouvoir. Nous avons créé une agora des idées neuves, mis en place une communication plus transparente qui délivre des informations sans tabous à l'ensemble des salariés. Cela signifie que nous parlons de tout, y compris des marges et des contrats signés avec les clients. Globalement, l'idée est de créer un climat de confiance pour mieux vivre ensemble et créer de la valeur ajoutée par l'innovation. Donc au final, faire gagner l'entreprise.

Éric Mainguet, vous êtes délégué du personnel. Comment avez-vous accueilli cette démarche ?

J'ai d'abord été estomaqué. Car la démarche de libération représente un changement de posture radical, en décalage avec mes expériences professionnelles précédentes et celles des autres représentants du personnel. Mais nous avons réservé un accueil chaleureux à la présentation. La faire à l'ensemble des salariés était un élément important. Ensuite, nous avons creusé le sujet. Une dizaine d'élus du personnel a ainsi assisté à une conférence d'Isaac Getz. Nous avons été séduits par la possibilité d'évoluer d'un système d'autorité pyramidal vers un système d'échanges où le statut d'adulte de la personne est respecté, où la personnalité de chacun peut davantage s'exprimer. Nous avons donc décidé d'accompagner avec bienveillance la mise en place de la démarche en veillant toutefois à ce qu'elle ne crée pas d'incidents humains. Certains pouvant se sentir inquiets ou bousculés par la nouvelle organisation.

La libération a-t-elle modifié la façon dont vous exercez votre mandat d'élu ?

E.M. : Cela a créé des obligations. En tant que représentants du personnel, nous nous sommes également astreints à la transparence en matière de communication. Par exemple, nous contribuons à restituer aux salariés les comptes-rendus des réunions de négociation dans des délais très courts, avec des verbatim très précis et complets. L'autre enjeu porte sur la pédagogie. Notre rôle ne consiste plus à aller à la pêche aux informations mais à les expliquer pour faire comprendre aux salariés ce qui se passe exactement. Nous passons également beaucoup de temps à préparer les questions que nous allons poser au comité d'entreprise de façon à relever les dysfonctionnements tout en étant respectueux des personnes.

Les relations entre la direction et les élus ont-elles évolué ?

C.C. : Ce qui a changé, c'est la façon de se considérer, de se respecter. Quand je suis en réunion avec les élus du personnel, je sens de la connivence, de la sympathie. Les sujets sont travaillés en amont avec les élus. Leur implication limite les risques de conflit. En fait, la démarche de libération a remis l'église au milieu du village en redonnant du pouvoir à ceux qui assurent la production. La contrepartie, c'est de partager les bénéfices quand il y en a. Un tiers du résultat est réparti de façon égalitaire entre les salariés sous forme de participation et d'intéressement.

E.M. : Représentants du personnel et direction ne raisonnent pas en chapelles ennemies mais comme des collaborateurs embarqués dans le même navire.

Pour conclure ?

C.C. : La démarche de libération a rendu l'entreprise plus mature, plus agile et donc plus résiliente dans un environnement économique compliqué.

E.M. : Les derniers marchés que nous avons remportés l'ont effectivement été grâce à notre souplesse et notre réactivité.

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