L'emploi breton sous tension
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L'emploi breton sous tension

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Hausse de l'intérim, baisse du chômage plus affirmée qu'au plan national... Les indicateurs de l'emploi breton sont bien orientés. Selon le dernier baromètre d’emploi trimestriel publié par RegionsJob, la région et Rennes Métropole en particulier, font partie des pôles les plus dynamiques de France avec respectivement +57% et +53% d’emplois par rapport à 2016. Tour d'horizon des problématiques de recrutement rencontrées sur le terrain.

— Photo : Xavier Eveillé

Nombre de filières bretonnes rencontrent des difficultés croissantes pour trouver les bons profils. C’est le cas de l’informatique comme de la cybersécurité. « Nous ne cherchons plus sur postes mais sur profils. Notre croissance est ralentie par l’emploi, pas par le marché », s’exclament les associés de la startup rennaise Acceis, Yves Duchesne et Gwen Feunteun, experts en cybersécurité de l’information.

Les SSII connaissent bien ces problématiques. Exemple frappant : Meti (270 salariés et 23,5 M€ de CA) à Larmor Plage (56). Intégrateur et éditeur pour la GMS et la GSB, Meti enregistre une croissance à deux chiffres et recrute 50 collaborateurs (analystes, développeurs et intégrateurs) pour assurer son carnet de commandes dont la visibilité est à cinq ans. « Nous n'arrivons pas à grandir. Difficile de recruter, même sur Lorient, pour des jeunes diplômés qui ont fait leurs études dans de grandes villes », déplore Gérard Jaffré, le dirigeant. Une réflexion est menée pour ouvrir des bureaux à Nantes.

L’agroalimentaire propose de former

Même combat dans l'agroalimentaire. Le Rennais Bouchers Services doit redoubler d’efforts pour trouver 400 CDI. Elle n’en était qu’à 200 début octobre, payés 25% au-dessus du smic… Chez ce sous-traitant pour les industries de transformation de la viande (1.300 salariés en France), le constat est rude : « il y a dix ans, nous contactions Pôle emploi ou une agence d’intérim et cela permettait de trouver au moins un opérateur pour un besoin, se souvient Anne-Sophie Tyli-Robin, directrice générale. Aujourd’hui, pour dix besoins, on reçoit à peine une candidature ! » Résultat, elle est active sur tout forum d’emploi qui se présente, pose des affichettes dans les commerces, met des annonces dans les journaux, alimente une page Facebook, crée son site internet et fait jouer le réseau des salariés. « Nous donnons une prime de 500 euros à tout salarié qui apporte un nouveau collaborateur. » La dirigeante aimerait aussi travailler main dans la main avec les politiques, pour mettre en adéquation les besoins des entreprises avec les demandeurs d’emploi.

Chez les Salaisons Clermont, à Liffré, le dirigeant Eric Lecordier avait besoin de 15 intérimaires, il n’en a trouvé que 5. « Nous cherchons juste des gens qui ont envie d’avancer, qui ont une bonne mentalité. Malgré ce que disent les politiques, on a laissé tomber le métier de l’apprentissage. Il faut y revenir davantage encore. »

Dans le Finistère aussi l’agroalimentaire peine à recruter. «Nous avons embauché une cinquantaine de salariés l'an dernier dont une dizaine de cadres. Mais le bassin d'emploi est limité », explique Jean-François Hug, P-Dg de Chancerelle, à Douarnenez. Malgré l’embauche récente d’une personne dédiée au recrutement, la conserverie peine à trouver des saisonniers : 70 postes restent à pourvoir quand elle en propose 150 à l'année.

La pénurie touche aussi Celvia, filiale de SBV (645 Md€ de CA et 2.500 salariés) à Sérent (56) qui recrutait 100 salariés en début d’année et qui a opté pour un vaste mailing postal décrivant les postes mais aussi « les formations, les évolutions de carrière ». A Kervignac, c’est Cité Marine (800 salariés) qui cherche une trentaine de collaborateurs pour son usine de poissons cuisinés et de produits élaborés. Comme pour D’Aucy (4.800 salariés et 1,3 Md€ de CA), la solution passe par l’organisation d’un forum de recrutements. « Une telle manifestation comme les réseaux sociaux sont un moyen de faire connaître nos emplois. Chez D’Aucy, nous avions 150 postes à pourvoir en saisonnier », évoque Jérôme Pacreau, DRH pour la branche activités agricoles. A Langonnet (56), la Maison Cospérec (boucherie-conserverie) peine à pourvoir deux postes en production : « Non seulement les centres d'apprentissage sont loin, mais se posent pour les jeunes en milieu rural des problèmes de transport, à cause des horaires décalés. »

Le mois dernier, des industriels carhaisiens, parmi lesquels le DG de Synutra, ont profité de la venue du vice-président régional à l'économie, Martin Meyrier, pour l’interpeller sur leurs problèmes de recrutement. Leur solution ? Créer des formations à Carhaix pour que les stagiaires qu’ils accueilleront restent dans leurs entreprises...

Les biens d'équipement, aussi, sont sous tension : à Lorient, Plastimo doit pourvoir 60 postes en couture pour honorer un contrat record avec le groupe NFM. Qui dit être plus incisif sur l'export dit aussi muscler la formation en interne.

Bâtiment et transport cherchent des bras

Le bâtiment fait face à des besoins criants et identifiés. La FFB du Morbihan a organisé un dating en octobre « partant du constant qu’en juin nous recensions plus de 200 postes non pourvus. Nos entreprises ont besoin de recruter pour faire face à une hausse d'activité pérenne », précise Aude Le Vaillant, secrétaire générale de la FFB 56.

Le transport est aussi touché. Jean-Jacques Le Calvez, dont le groupe connaît une forte croissance, n'y va pas par quatre chemins : « Je suis prêt à ouvrir demain au recrutement 100 postes en CDI ! » Il se dit prêt à recruter du personnel non qualifié qu'il veut bien former. «En Bretagne, il y a un manque de 3.000 emplois dans le transport ! »

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