Cela fait quatre-vingts ans que leurs camions font la tournée des petites villes pour aller vendre du prêt-à-porter auprès des populations éloignées des enseignes de distribution. Les Magasins Bleus ne vendent pas un rêve, mais des articles d’habillement (vêtements, sous-vêtements, accessoires…) pour femmes et hommes et du linge de maison (draps…). Tous proviennent de marques françaises et européennes. Basée au Rheu, près de Rennes, l’entreprise, filiale de La Financière des Eparses (20 M€ de CA ; maison mère de B.Solfin, Lafrançaise Mailles in France, BS Production), est devenue un acteur incontournable de la distribution de prêt-à-porter à domicile, grâce à ses véhicules-boutiques. 70 vendeurs nomades sillonnent aujourd’hui la France (sur les 100 collaborateurs qu’emploie l’entreprise), sur une cinquantaine de kilomètres autour de chez eux, créant du lien avec leur clientèle. Une clientèle souvent constituée de personnes âgées, ravies de voir le magasin se garer au pied de chez eux.
Mais à l’heure du e-commerce florissant, même chez les seniors, de plus en plus connectés, le modèle pourrait avoir du plomb dans l’aile. Le chiffre d’affaires des Magasins Bleus, qui atteint 10 millions d’euros, a eu tendance à baisser ces derniers temps. "Mais c’est surtout dû à nos difficultés à recruter, explique le directeur d’exploitation de l’entreprise, Marc Elineau. Notre chiffre d’affaires est en effet lié à nos effectifs. Nous avons du mal à remplacer nos vendeurs qui partent en retraite." En résumé, si un véhicule ne roule plus, le chiffre d’affaires baisse automatiquement. Les Magasins Bleus tentent donc d’attirer de nouvelles recrues par un statut de VRP salarié, qui ouvre des commissionnements au chiffre d’affaires.
Déjà 10 % du chiffre d’affaires
Face à ces difficultés de recrutement, l’entreprise a commencé à diversifier son activité, en créant un réseau de distributeurs spécifiquement dédié aux Ehpad. "Nous recrutons des vendeurs spécialisés, au profil B to B, qui proposent des animations dans les établissements publics ou privés pour personnes âgées. Ils y déploient une boutique éphémère à l’intérieur même des Ehpad, ce qui crée un événement", explique Marc Elineau. Pour l’instant, avec 10 vendeurs dédiés, Les Magasin Bleus réalisent 1 million d’euros de chiffre d’affaires avec cette nouvelle activité (soit 10 % du CA). Ils ont déjà noué des contacts avec les réseaux comme Domitys, Senioriales… "Nous avons doublé en 2023. En 2024, nous devrions encore multiplier ce chiffre par deux, puis atteindre les 4 millions d’euros en 2025", estime le dirigeant. Il faut dire que la population française vieillit et que l’on recense l’ouverture d’un Ehpad par semaine à travers le pays. Le potentiel de croissance est donc important pour Les Magasins Bleus, même s’il "n’est pas vraiment mesurable", considère le dirigeant. L’entreprise bretillienne est toutefois l’une des premières à se lancer sur ce créneau, "face à un seul gros concurrent présent depuis de longues années, et un acteur plus petit. Ce qui donne une idée du marché." En revanche, le chiffre d’affaires réalisé sur place peut être davantage maîtrisé, et nécessite moins de temps de prospection.
Un acteur de services
Les Magasins Bleus ont élargi leur catalogue pour coller à la demande des Ehpad, proposant par exemple des trousseaux (sept jours de sous-vêtements, serviettes…) ou des produits d’hygiène, livres, jeux, produits d’ameublement (lampes…). Ils se positionnent donc aussi comme un acteur du service. "Nous allons construire dans les prochaines années un service de conciergerie, ce que nous faisons actuellement pour dépanner, confie Marc Elineau. Il s’agit de proposer sur notre site internet des prestations de coiffure par exemple. Mais aussi des produits spécifiques comme des téléviseurs, meubles, que nous n’aurons pas en stock mais pourrons obtenir auprès de réseaux de distribution spécialisés." Une rubrique leur sera dédiée sur le site internet de l’entreprise, à l’attention des professionnels, des familles et des gérants de tutelle.
Accélération sur Internet
D’ailleurs, le numérique fait partie des autres axes stratégiques de développement pour Les Magasins Bleus. Si le site a déjà tendance à s’étoffer, ce n’est pas pour remplacer les vendeurs ambulants. "Nous ne voulons pas les court-circuiter, avertit Marc Elineau. Mais le site internet est utile pour marquer notre présence quand nous ne trouvons pas de vendeur pour remplacer un départ sur un territoire, ou pour les secteurs où nous ne sommes pas présents. Cela permet de conserver notre clientèle."
