Pour ces PME occitanes, le bonheur est dans le pré
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Pour ces PME occitanes, le bonheur est dans le pré

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Avec un accès au foncier devenu critique dans la métropole toulousaine et sur le littoral, les collectivités territoriales d'Occitanie s'organisent pour attirer les entreprises dans des parcs d'activité plus éloignés, mais plus qualitatifs. Un accompagnement technique et financier qui séduit de plus en plus de PME. Témoignages.

L'agence de développement économique d'Occitanie a identifié une quarantaine de zones économiques à développer en priorité dans la région. Ici, la pépinière et hôtel d'entreprises L'Arobase, sur la communauté d'agglomération de Castres-Mazamet (Tarn) — Photo : Ad'Occ

Quand Didier Gal, directeur général de Leadgo (6 salariés, CA 2018 : 7,2 M€), commence la recherche de nouveaux locaux pour son activité de distribution de matériaux composites, le constat s’impose vite : les possibilités d’implantation dans la métropole toulousaine sont devenues quasiment nulles. « Notre métier impose de disposer immédiatement d’importantes surfaces de stockage. Il y avait bien des entrepôts disponibles à la location, mais pour un montant quasiment équivalent nous avions la possibilité de construire des locaux sur mesure, dans une zone à peine plus éloignée », indique le dirigeant. Accompagné dans le choix du terrain par son conseiller immobilier et Themelia, la société d’aménagement du Tarn, Leadgo investit à l’automne 2018 un bâtiment neuf de 2 400 m2 sur le parc des Cadaux, à Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn), à une dizaine de minutes de la métropole par l’autoroute.

Une quarantaine de zones aménagées

Disponibilité et prix des terrains, qualité de l’environnement de travail, proximité des voies de transport : les exemples d’implantations hors de la métropole toulousaine se font de plus en plus nombreux. Pour les entreprises, la décision de s’éloigner de la ville centre s’impose souvent à cause de la pénurie de foncier. Mais ce mouvement est aussi accompagné par des collectivités locales de plus en plus soucieuses d’équilibrer les croissances économique et démographique de l’Occitanie, où s’installent chaque année plus de 50 000 nouveaux habitants.

L’agence de développement régionale, Ad’Occ, est à la pointe de cet effort d’aménagement, avec son dispositif Occitanie Zone Économique (OZE). « Nous avons identifié une quarantaine de territoires intégralement situés en dehors des métropoles de Toulouse et Montpellier, avec un accompagnement financier jusqu’à un million d’euros pour créer des espaces qualitatifs sur les aménagements et le paysage, résume une porte-parole d’Ad’Occ. Les activités commerciales ont été volontairement exclues du dispositif, pour soutenir en priorité les projets industriels. » Le dispositif OZE revendique aujourd’hui plus de 1 000 entreprises implantées, représentant 20 000 emplois.

Un environnement plus serein

Localement, départements et communautés de communes s’investissent également, parfois en association avec Ad’Occ comme dans le cas des Portes du Tarn (voir encadré). Sur la zone du Roulage, initiée par la municipalité de Pujaudran (Gers), la première entreprise implantée a été Air Support (130 salariés, CA 2018-2019 : 23,5 M€) en 2013. « Vu la situation du foncier, nous ne parvenions pas à réaliser l’extension voulue à Colomiers, se souvient Sabine Tertre, présidente de la PME. Les aides de la Région Occitanie et de l’agence Gers Développement ont été déterminantes, avec un apport de 240 000 euros sur un projet global de 3 M€. »

Six ans après, la dirigeante tire un bilan très positif de cette implantation à moins de 20 km de Toulouse. « Construire un bâtiment adapté à nos besoins nous a permis de changer de braquet industriel mais aussi de changer d’image auprès de nos clients, souligne Sabine Tertre. Pour nos collaborateurs, cela a l’occasion de travailler dans un environnement plus serein, sans embouteillages, et souvent d’accéder à la propriété. » Deux autres entreprises du secteur aéronautique –  Aerem et Excent – ont depuis rejoint la zone du Roulage.

Gérer la situation du conjoint

Grande consommatrice de foncier, la logistique figure parmi les secteurs qui choisissent le plus de s’implanter en milieu rural : quand les prix du foncier se situent entre 60 et 100 € / m2 dans la métropole, ils se négocient entre 25 et 35 € / m2 dans un rayon de 50 km autour de Toulouse, et parfois en dessous de 15 € / m2 pour les zones plus éloignées. Chargée d’alimenter quelque 90 points de vente E.Leclerc en Occitanie, la Socamil (350 salariés, CA 2017 : 1 Md€) finalisera en 2020 son déménagement de Tournefeuille, dans la périphérie ouest de Toulouse, vers le parc d’activités Nicolas-Appert Castelnaudary (Aude), 70 km plus à l’est. Sur 35 hectares, la société y construit 90 000 m2 d’entrepôts, ainsi que des bâtiments administratifs et un centre de formation. L’investissement de 150 M€ s’accompagne de plusieurs dizaines de recrutements : près de la moitié des collaborateurs installés à Tournefeuille pourraient ne pas suivre le mouvement.

« La proximité de la métropole ou le développement des infrastructures de transport ne suffisent pas à assurer le succès d’une implantation en milieu rural : pour les salariés en couple, l’une des priorités est souvent trouver des solutions d’emplois pour le conjoint, souligne François Bedoussac, chargé d’affaires pour l’agence départementale Gers Développement. Un autre enjeu est de lever certains préjugés sur les villes moyennes comme Auch, pour mettre en avant leurs atouts sur la qualité de vie ou les services. »

Permettre des développements futurs

Pour les trois salariés de la société Cobratex, spécialisée dans la production de matériaux composites à base de bambou, l’implantation dans un environnement à taille humaine a été déterminante dans le récent départ de Toulouse pour Carbonne, 45 km plus au sud en Haute-Garonne. « Nous sommes entourés par la verdure et les montagnes… Mais aussi par un écosystème local d’entreprises et de banques avec lesquelles les relations sont faciles à nouer », se félicite Édouard Sherwood, président et fondateur.

L’installation dans un entrepôt de 250 m2 disposant de toutes les commodités permet aujourd’hui à Cobratex d’accélérer sa R & D et d’accueillir plus facilement ses clients et investisseurs. « Nous sommes passés d’un fonctionnement en mode start-up à une approche plus professionnelle sur la production, et nous disposons ici des réserves foncières pour notre futur développement industriel. Un déménagement est un processus tellement lourd qu’on ne peut pas se tromper dans le choix du site », conclut Édouard Sherwood.

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