Coronavirus : en Occitanie, les coopératives agricoles se réorganisent
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Coronavirus : en Occitanie, les coopératives agricoles se réorganisent

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Élevage, fruits et légumes, fromage... Tous les segments de la filière agricole subissent actuellement l'impact de la crise sanitaire du coronavirus. Les coopératives d'Occitanie font face, mais ne sont pas toutes touchées avec la même intensité.

La Confédération générale de Roquefort a effectué trois demandes de modification du cahier des charges auprès de l'Institut national de l'origine et de la qualité et de la Commission européenne — Photo : Serge et Annie Fabre

D’après une étude réalisée par La Coopérative Agricole - ex Coop de France, fédération qui représente 2 300 entreprises coopératives agricoles et agroalimentaires - auprès de 46 coopératives occitanes, 48 % subissent une baisse d’activité dans le secteur traditionnel. Pour 55 % des coopératives dans l’élevage, les fruits et légumes, les métiers du grain ou encore les produits laitiers, la perte est supérieure à 50 %. Côté grande distribution, 39 % sont impactés. Les ventes de foie gras, certaines viandes et fromages sont notamment victimes de la fermeture des rayons coupes et traditionnels des magasins.

« On observe une diminution de 60 % des ventes et des commandes de fromages AOP, AOC et IGP, note Céline Spelle, cheffe de projet au Conseil national des appellations d’origine laitière. Sont en cause la fermeture des restaurants et des marchés, ainsi que la modification des habitudes de consommation puisque les Français se tournent vers des fromages longue conservation plutôt que vers des produits dits de table ».

Trois centimes de moins pour les éleveurs

Côté élevage, les producteurs d’agneaux ont vécu des moments difficiles à l’approche de Pâques. « Normalement l’agneau pascal se vend tout seul, partage Olivier Boulat, éleveur de vaches limousines et membre du bureau Interbev Occitanie, le comité régional de l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes. Cette année, il a fallu réaliser une campagne de communication en urgence pour booster les ventes. Cela a fonctionné la dernière semaine avant Pâques mais les agneaux sont partis entre 50 centimes et un euro de moins le kilo que d’habitude (prix éleveur, NDLR) ».

Un phénomène qui risque très probablement de se reproduire avec le veau de la Pentecôte. Sur les viandes plus traditionnelles, comme le bœuf, les ventes semblent se maintenir malgré quelques fluctuations périodiques. À noter que la consommation de steak haché affiche même + 34 % (frais) et + 38 % (surgelé). « Dans cette crise sanitaire, la filière viande n’est pas la plus à plaindre, conclut Olivier Boulat. Toutefois, les milieux de filière nous achètent nos animaux en moyenne trois centimes moins cher qu’en temps normal, le prix le plus bas depuis dix ans. Il y a encore des progrès à faire sur l’application de la loi EGalim (loi de 2018 dont un des objectifs est de garantir la vente des produits des agriculteurs au juste prix, NDLR) ».

« La pomme est un produit de première nécessité »

Du côté des coopératives de fruits et légumes, la situation commerciale en Occitanie s’est stabilisée et améliorée depuis le 25 mars dernier, grâce notamment à l’arrêt des importations et la promotion par les grandes et moyennes surfaces qui concentrent la majorité des flux. « Dans l’esprit des gens, la pomme se conserve bien et est un produit de première nécessité : nous vendons donc en ce moment notre stock à un rythme 20 % plus élevé que la normale », partage Françoise Roch, arboricultrice à la coopérative Quercy Soleil (60 salariés ; CA 2019 : 14 M€). La coopérative fait partie du groupe Blue Whale originaire de Montauban, un groupement de 300 fruiticulteurs du Sud-Ouest, Val de Loire, Sud-Est et Alpes (CA 2019 : 280 M€ de CA hors Alpes qui a rejoint la SAS en mars).

Début mars, il restait à la coopérative Quercy Soleil encore 25 % du tonnage annuel de pommes à écouler auprès des centrales d’achat. À la fréquence actuelle, Françoise Roch les aura écoulés dès le mois de juin. « Nous avons des collègues dont 60 % des salariés sont en arrêt, confie l’arboricultrice Chez nous, tout le monde travaille équipé de gants, blouses jetables et masques et aucun cas n’a été suspecté depuis le début de la crise. Nous avons de la chance ». Par ailleurs, sur l’export, 26 % des coopératives occitanes relèvent une baisse d’activité. Les plus fortement touchées sont les filières fromage (67 %) et oléicole (50 %), suivies par les coopératives en fruits et légumes impactées à 31 %, céréales à 25 % et élevage à 15 %.

Les fromages d’appellation veulent modifier le cahier des charges

De plus, 43 % des coopératives d’Occitanie tous secteurs confondus subissent des problèmes d’approvisionnement, 24 % des soucis de maintenance, 20 % sur l’expédition de la marchandise et 15 % sur le conditionnement et l’emballage. Au global, on recense 57 % des salariés en activité sur site et 14 % en télétravail, mais 18 % en activité partielle, 7 % en garde d’enfant et 6 % en arrêt pour d’autres raisons. Ce manque de main-d’œuvre a, par exemple, des conséquences sur la filière laitière.

« Depuis quinze jours, la plupart des fabricants de Roquefort ont demandé à leurs fournisseurs de baisser de 10 % leur production de lait en nourrissant moins les brebis, pour avoir moins de fromage à produire, éclaire Cécile Arondel-Schultz, secrétaire générale de la Confédération générale de Roquefort qui regroupe sept fabricants de tailles diverses. La demande a été faite auprès de l’Institut national de l’origine et de la qualité et de la Commission européenne pour modifier le cahier des charges de l’AOP, et autoriser les éleveurs à ne traire les brebis qu’une fois par jour au lieu de deux ». Enfin, la Confédération générale de Roquefort a également demandé à pouvoir stocker d’autres types de fromages, afin de faciliter la logistique des producteurs qui se retrouvent avec de grandes quantités d’invendus destinés, au départ, à la restauration hors foyer.

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