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Chez Derichebourg Aeronautics Services, un accord de performance collective qui divise les syndicats
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Chez Derichebourg Aeronautics Services, un accord de performance collective qui divise les syndicats

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L'accord de performance collective initié par le sous-traitant aéronautique toulousain Derichebourg Aeronautics Services, signé par son syndicat majoritaire Force Ouvrière, se heurte à l'opposition de l'Unsa et de la CFE-CGC. En conditionnant le maintien des emplois à une baisse des primes et indemnités, ce compromis pourrait faire école dans une filière aéronautique mise à genoux par la crise du coronavirus.

Près de Toulouse, plusieurs manifestations ont été organisées par les syndicats du sous-traitant aéronautique Derichebourg Aeronautics Services opposés aux baisses de salaires avant la signature de l'accord de performance collective — Photo : DR

Vendredi 8 mai : le syndicat Unsa Aérien SNMSAC alerte sur un projet de plan social chez le prestataire toulousain Derichebourg Aeronautics Services (2100 salariés, CA 2019 : 124 M€), supprimant jusqu’à 700 postes parmi les 1 580 salariés qui interviennent sur les chaînes d’Airbus. Vendredi 12 juin : les élus au comité social et économique de l’entreprise votent à une courte majorité un accord de performance collective négocié par le syndicat majoritaire, Force Ouvrière. Les deux autres syndicats représentés au CSE, l’Unsa Aérien et la CFE-CGC, s’y sont déclarés hostiles.

Entre ces deux dates, le cas Derichebourg est devenu emblématique des risques pesant sur l’emploi dans une filière aéronautique mise à genoux par la crise du coronavirus et la baisse durable du trafic aérien. Début juin, le dossier a même retenu l’attention du ministre de l’Économie Bruno Le Maire, qui a demandé à la direction d’attendre le plan de soutien à la filière aéronautique finalement présenté le 9 juin. Parmi les mesures annoncées par le gouvernement, le maintien des dispositifs d’activité partielle à horizon 2022 était attendu par les entreprises de la supply-chain pour limiter l’impact social de la crise. Il est désormais au cœur des dissensions syndicales à Blagnac, chez Derichebourg Aeronautics Services.

Des indemnités supprimées, une garantie sur l’emploi jusqu’en 2022

L’accord signé le 12 juin prévoit une baisse sensible des rémunérations, avec la suppression de la prime de travail en équipe et des indemnités de transport et de repas, d’environ 250 euros chacune, partiellement compensée par l’obtention de tickets-restaurants. En contrepartie, la direction s’engage à ne pas engager de licenciements économiques avant 2022, sous réserve du maintien des dispositifs d’activité partielle. Elle a aussi accepté d’augmenter de 1 500 à 4 000 euros la prime de mobilité incitant les salariés à rejoindre les sites de Derichebourg Aeronautics Services à Bordeaux, Marseille et Clermont-Ferrand, avec un droit de retour prioritaire sur Toulouse et la prise en charge des déménagements.

« Avec cet accord, nous avons réussi à préserver l’essentiel : le maintien de l’emploi jusqu’en 2022, pointe Jean-Marc Moreau, délégué syndical Force Ouvrière. Nous ne pouvions pas prendre le risque d’un plan social qui aurait placé les salariés dans un système économique très compliqué, où l’ensemble des prestataires sont tributaires du niveau de charge chez Airbus. » Un peu moins de 50 % des salariés de Derichebourg Aeronautics Services travaillent actuellement sur les chaînes de l’avionneur, et ce taux ne devrait pas dépasser 55 % au mois de septembre.

« Fuite des compétences »

Du côté de l’Unsa Aérien SNMSAC, l’analyse est radicalement différente. « Notre direction a surréagi aux difficultés conjoncturelles de la filière, et l’accord de performance collective entérine des pertes de revenus de 500 à 600 euros par mois pour chaque salarié, estime Philippe Faucard, délégué syndical Unsa Aérien. Le maintien du chômage partiel permettait d’attendre et d’envisager d’autres solutions, comme l’ouverture d’un plan de départs volontaires à l’automne tenant compte de l’évolution des cadences. »

Pour le représentant de l’Unsa Aérien, la cause est entendue : « Avec cet accord, on va voir des salariés quitter l’entreprise pour trouver de meilleures conditions. Quand la reprise sera là, comment reprendre des marchés intéressants avec cette fuite des compétences ? », interroge Philippe Faucard.

Vers une multiplication des plans sociaux dans l’aéro ?

Pour Jean-Marc Moreau de Force Ouvrière, les perspectives sont moins encourageantes, du moins à court terme. « Dans les prochaines semaines, on va voir fleurir ce type de situations : des entreprises de la sous-traitance vont engager des plans sociaux ou des accords de performance collective, voire les deux en parallèle. Attendre pour négocier aurait été dangereux. »

Représentant 80 % de l’emploi direct dans l’aéronautique en Occitanie (80 000 salariés), la supply-chain est la première menacée par la casse sociale. Airbus ne devrait toutefois pas échapper à un plan d’ajustement, qui pourrait se faire sous forme d’un plan de départs volontaires centré sur son activité d’activité d’aviation commerciale (90 000 emplois dans le monde). D’après le PDG de l’avionneur, Guillaume Faury, des annonces seront faites d’ici la fin du mois de juillet.

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