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Serge Hincker (ARIA Sud) : "L'industrie agroalimentaire doit relever de notre souveraineté nationale"
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Serge Hincker président de l’ARIA Sud "L'industrie agroalimentaire doit relever de notre souveraineté nationale"

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Animé par la volonté d’être utile et de s’investir pour une filière qui lui tient à cœur, Serge Hincker est le nouveau président de l’ARIA Sud, association régionale des industries agroalimentaires. Au cours de ce mandat de trois ans, il veut faire grandir les entreprises agroalimentaires, renforcer l’attractivité d’une filière méconnue et construire un bâtiment totem pour le secteur.

Dirigeant pendant 10 ans de l’entreprise agroalimentaire Cepasco Spigol (à Gémenos), spécialisée dans les épices, Serge Hincker a été élu président de l’ARIA Sud — Photo : DR

Vous avez récemment été élu à la présidence de l’ARIA Sud. Quelles sont les grandes lignes de votre mandat de trois ans ?

Le programme est vaste et permet de répondre à la double vocation de l’ARIA, qui est de fédérer les entreprises de la branche (1 000 en région Paca, 37 000 emplois directs) et d’aider les entreprises à croître. Ce mandat sera mené avec un conseil d’administration et je serai aussi épaulé par une vice-présidente, Agnès Put, gérante de la Boyauderie Sisteronnaise.

Mon mandat aura un fil rouge : la santé des consommateurs que toute entreprise devrait placer au cœur de sa stratégie. Je dis stop au "food bashing", je veux que l’on parle demain de notre capacité à innover (3 000 nouveaux produits chaque année, NDLR), de nos salariés, de nos savoir-faire, de notre savoir-faire français : d’ailleurs 80 % des produits consommés en France sont fabriqués en France et 70 % de la production agricole française est transformée par l’industrie agroalimentaire française. L’alimentaire doit relever de notre souveraineté nationale.

Comment comptez-vous faire grandir vos entreprises ?

Réussir le plan de relance est l’une des missions premières de mon mandat. Et nous allons donc aider et accompagner nos entreprises dans les méandres d’aides et d’appels de fonds. Avec l’aide de l’État ou de la Région, nos entreprises doivent réussir à prendre deux virages : l’un est écologique et touche à la RSE, au développement durable ; l’autre est numérique. Aujourd’hui, pas mal d’entreprises ont déjà bénéficié d’aides au titre du plan de relance, mais il faudrait que toutes les entreprises puissent en bénéficier, notamment les TPE/PME.

Un autre volet, qui répond à une préoccupation forte, concerne l’emploi et l’attractivité de nos métiers. Le besoin en main-d’œuvre n’est pas nouveau. Pendant la crise sanitaire, en particulier le premier confinement, notre secteur a répondu présent, nos salariés étaient en première ligne pour répondre à un impératif majeur d’alimentation. Pourtant aujourd’hui, maintenant qu’il y a relance, nos entreprises n’arrivent pas à satisfaire toutes leurs commandes par manque de bras et aujourd’hui, le risque est de passer à côté de cette reprise. C’est un cri majeur : nous allons dans le mur ! Que ce soit dans des entreprises de 200 ou 300 personnes ou dans des TPE de moins de 10 personnes, les dirigeants ne trouvent pas les bras nécessaires.

"Par manque de bras, on risque de passer à côté de la reprise."

Quelle réponse pouvez-vous apporter à ce besoin en main-d’œuvre non satisfait ?

Nous devons travailler l’attractivité de notre filière et de nos métiers, qui offrent un panel d’activités diversifié et de belles carrières. Des campagnes de communication nationale sont menées avec l’ANIA. Nous voulons aussi renforcer la formation, l’accompagnement des personnes en apprentissage dans un secteur, qui est la première industrie de France. On a tendance à l’oublier mais, avec 198 milliards d’euros de chiffre d’affaires cumulés et plus de 440 000 emplois, l’agroalimentaire se place devant l’aéronautique et la chimie/cosmétique.

Y a-t-il d’autres projets que vous comptez déployer qui pourraient permettre de renforcer cette attractivité ?

Une autre idée forte de mon mandat est de construire une bannière collective, multisectorielle. C’est dommage et anormal que l’on ne puisse pas nous appuyer sur des références fortes, comme la Provence, qui parlent aux gens du monde entier. Nous sommes assis sur une mine d’or, mais nous n’avons pas le droit de l’exploiter. Nous devons donc réfléchir ensemble pour trouver une solution.

D’ici à la fin de mon mandat, je souhaite aussi pouvoir inaugurer un bâtiment totem, qui fédérerait les acteurs de l’écosystème lié à l’industrie agroalimentaire. Cet investissement serait financé avec nos ressources et des aides de la Région, notamment et sera prochainement dévoilé.

Un an et demi après le début du premier confinement, quelle est la situation économique de la filière agroalimentaire ?

Globalement, la filière se porte bien. Elle a bien traversé la crise, mais toutes les entreprises n’ont pas eu la chance de bénéficier d’un maintien de leur activité, notamment celles qui travaillent avec les cafés et restaurants. Ces dernières ne sont pas encore sorties d’affaires.

"La filière agroalimentaire accuse une perte de marge de 16 points au cours des 13 dernières années."

Ensuite, la reprise est freinée par des problèmes de recrutement et l’envolée des prix des matières premières, des prix du transport, des prix de l’emballage. Le phénomène n’est pas nouveau et la filière agroalimentaire accuse une perte de marge de 16 points au cours des 13 dernières années, parce qu’elle est prise en étau entre la GMS et le monde agricole. Les entreprises agroalimentaires ne sont certes pas en difficulté, mais en dégageant moins de marges, leurs capacités à investir, à embaucher, à innover sont moindres. Les négociations annuelles à venir avec la GMS seront cruciales et nous demandons de pouvoir répercuter la hausse du prix des matières premières, du transport, de l’énergie, de manière raisonnable et raisonnée.

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