« Des rencontres entre personnes d’horizons différents qui font naître des choses auxquelles personne ne s’attendait : voilà qui m’intéresse beaucoup. Et c’est ce qui s’est passé avec la venue de l'artiste Mathieu Schmitt dans nos locaux. Cette notion s'appelle la sérendipité.
Après avoir remporté, l'an dernier, un appel à projets, dans le cadre du dispositif, conduit chaque année, par le ministère de la Culture, Supralog a accueilli un plasticien pendant six mois. La Drac, la Direction régionale des affaires culturelles, a identifié pour nous un partenaire, l’Espace de l’Art Concret à Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes), qui nous a proposé Mathieu Schmitt.
Un artiste issu de l'informatique
Spécialisée dans l’élaboration de plateformes numériques, Supralog est composée à 90 % d’ingénieurs informatiques et Mathieu a la particularité d’avoir débuté dans ce secteur, avant de s’orienter vers l’art. Dans sa démarche créative, il utilise des matériaux et de la technologie numériques qu’il détourne.
« Certains salariés étaient totalement acquis, d’autres indifférents, dubitatifs ou encore réfractaires. »
Pendant six mois, il est venu un jour par semaine, ainsi que pendant deux périodes d’immersion d’une semaine. Il avait un bureau à disposition et, surtout, toute liberté d’échanger avec les salariés. Avant de lancer le projet, nous avions organisé une rencontre au sein de l’entreprise, afin qu’il se présente, qu’il explique sa démarche et pour démystifier un peu l’art contemporain. Certains étaient totalement acquis, d’autres indifférents, dubitatifs ou encore réfractaires. Mais ce sont des ingénieurs, habitués à réfléchir : tous étaient convaincus par la démarche.
Stimuler la créativité des salariés
Je souhaitais faire bouger les lignes, provoquer un décalage de points de vue pour faire naître des idées nouvelles. Nous menons des démarches d’innovation. Nous avons, par exemple, un "Labs", un espace collaboratif avec des start-up. Cela conduit à une forme de « produire ensemble » qui est renouvelée.
Pour l'une de ses œuvres, Mathieu cherchait des matériaux numériques. Des salariés lui ont proposé des fichiers de données. Cela stimule la créativité. Les ingénieurs en informatique ont l’habitude d’être sur des rails, de produire avec des contraintes et des objectifs. Or, aujourd’hui, ils doivent inventer, penser hors du cadre. Ce type d’expérience nourrit cette prise de conscience.
« J’encourage les chefs d’entreprise à se lancer. »
L’une des œuvres est un « vivarium numérique », où deux robots se font face. Quand l’un bouge, l’autre aussi et cela aboutit à une sorte de danse. On a alors l’impression qu’ils sont dotés d’une âme. Mais le sens que l’on donne à cette œuvre dépend de notre perception. Dans l’informatique aussi, le regard de l’utilisateur est essentiel. Nous sommes de plus en plus centrés sur la « user experience », la façon dont l’utilisateur va s’approprier les plateformes que nous concevons. Il y a une homologie entre les deux univers.
Créateur de lien et de fierté
Si ce projet n’apporte pas de valeur absolue, il nous a enrichis et a aussi permis de créer du lien. Cela me donne envie de le prolonger. Je ne sais pas encore sous quelle forme, peut-être avec Université Côte d'Azur. Je réfléchis à ce qui peut donner du sens, apporter une âme supplémentaire.
Ce n’est pas du tout la même démarche que d’accueillir une exposition. Une résidence d’artiste est un engagement. Cela demande une réelle implication, des efforts, notamment en temps investi, mais c’est aussi une raison de fierté. J’encourage les chefs d’entreprise à se lancer. »