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Jérôme Calatraba (High Club)  : « Les discothèques ne peuvent pas rouvrir avec des masques et des distances »
Interview Nice # Tourisme

Jérôme Calatraba gérant de la discothèque High Club Jérôme Calatraba (High Club)  : « Les discothèques ne peuvent pas rouvrir avec des masques et des distances »

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Ancien footballeur professionnel, Jérôme Calatraba dirige depuis quinze ans la discothèque High Club (52 salariés) située sur la Promenade des Anglais, à Nice. Pour le chef d’entreprise, rouvrir l'établissement en appliquant strictement les gestes barrières, notamment la distanciation sociale, est inconcevable.

Malgré le déconfinement, les établissement de nuit n'ont toujours pas rouvert leurs portes, à l'image du High Club, discothèque de Nice qui accueille entre 1 000 et 1500 personnes par soir d'ouverture — Photo : High Club

Quelle est aujourd’hui la situation de votre entreprise ?

Jérôme Calatraba : La discothèque est toujours fermée. Nos 52 salariés sont toujours en chômage partiel. C’est le seul point positif : l’État assure le dispositif jusqu’à la fin juin. Nos pertes se situent entre 150 000 et 175 000 euros par mois. Habituellement, nous sommes ouverts deux jours par semaine, quatre à cinq soirs en période estivale, qui s’étale de fin mai à fin septembre. Nous faisons partie des 9 % de discothèques françaises qui réalisent plus de 1,5 M€ de chiffre d’affaires. Nous accueillons entre 1 000 et 1 500 clients par soir, essentiellement des touristes (anglais, américains…). Nous avons seulement un quart de locaux.

Quand pourrez-vous reprendre votre activité ?

Jérôme Calatraba : Nous pourrions peut-être rouvrir le 22 juin avec des restrictions sanitaires strictes : distances, masques, compartiments hermétiques pour le vestiaire… c’est impossible ! Je rappelle quand même que le thème d’une discothèque est justement le lien social. Il s’agit de s’amuser, c’est un lieu de divertissement. Quel sera l’intérêt de sortir sinon ? Que pourrai-je faire si un client enlève son masque après deux verres d’alcool ? Le mettre dehors ? C’est impossible à gérer. Il est déjà difficile de gérer les fumoirs.

Mais comment imaginer que les règles sanitaires ne s’appliquent pas à votre secteur ?

Jérôme Calatraba : Il est normal que nous ayons vécu ce confinement pour limiter le nombre de victimes du virus, et il est normal que la peur soit toujours présente. Mais il faut reprendre l'activité, il faut revivre, travailler. Il faut lever les restrictions. Depuis le 14 juillet 2016 (date de l’attentat terroriste sur la Promenade des Anglais qui a fait 86 morts et a vu le High Club se transformer en hôpital d’urgence, NDLR), nous vivons et travaillons avec cette peur des attentats. La peur est normale mais il faut vivre. Surtout que nous sommes dans une zone peu touchée par le virus.

"Quand un député a posé une question liée à la reprise de notre secteur d’activité, cela a fait sourire l’Assemblée Nationale."

Vous présentez les discothèques comme les "oubliées" du déconfinement, c’est ce que vous ressentez ?

Jérôme Calatraba : Je dirais même que nous en sommes les pestiférés. Je voudrais que l’on nous considère comme des chefs d’entreprise. Nous tenons des établissements de nuit, nous sommes contrôlés, nous évoluons dans des métiers à risque, mais nous sommes aussi des chefs d’entreprise, avec des salariés. Quand un député a posé une question liée à la reprise de notre secteur d’activité, cela a fait sourire l’Assemblée Nationale. Ce n’est pas respectueux. Nous ne sommes pas soutenus. Il y a aujourd’hui 2 100 discothèques en France. Il y en avait 4 000 il y a vingt ans. Peut-être ne rapportons-nous pas suffisamment...

Quelles sont vos perspectives ?

Jérôme Calatraba : Je ne sais pas ce que va décider le gouvernement. Je veux rester optimiste malgré tout. Mais si rien n’est fait, si je ne peux pas rouvrir, je peux envisager de changer d’activité, de vendre les lieux. On ne peut pas nous enlever ce qu’on a créé depuis des années.

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