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L'économie repart en Paca mais le remboursement des PGE va compliquer la donne
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L'économie repart en Paca mais le remboursement des PGE va compliquer la donne

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L’économie en Provence-Alpes-Côte d’Azur est repartie comme en 2019 ou presque. Pour autant, les mois à venir seront compliqués pour de nombreuses entreprises, particulièrement dans les Alpes-Maritimes, qui devront rembourser leur prêt garanti par l'État à partir du printemps prochain.

Jean-Pierre Savarino, président de la CCI Nice Côte d’Azur ; Christian Delhomme, directeur départemental de la Banque de France Alpes-Maritimes ; Joseph Bruno, chef du service des banques et entreprises au sein de la Banque de France — Photo : Olivia Oreggia

La Banque de France et la CCI Nice Côte d’Azur l’ont confirmé en présentant leurs enquêtes de conjoncture régionale et départementale : "L’économie en Provence-Alpes-Côte d’Azur se rapproche de son niveau avant crise". Néanmoins, l’optimisme qui pourrait accompagner cette donnée ne peut être que mesuré, l’état des lieux étant ponctué de nombreux "mais".

En effet, l’industrie s’est montrée particulièrement résiliente face à la crise (+8 % de chiffre d’affaires au premier semestre entre 2020 et 2021) mais les limites commencent à se dévoiler, liées à la hausse du prix des matières premières, aux difficultés d’approvisionnement. Dans les services marchands, les transactions progressent mais les dépenses d’investissements sont en baisse (-12 %). L'activité des hôtels, cafés et restaurants n’a pas encore retrouvé son niveau de 2019 "et ne connaîtra pas un retour à la normale en 2022", précise Jean-Pierre Savarino, président de la CCI Nice Côte d’Azur. À tout cela s’ajoute une sévère pénurie de main-d’œuvre : "Beaucoup de salariés ont quitté le secteur".

"Le prix des matières premières ayant augmenté après que les contrats ont été passés, les capacités de négociations sont faibles"

Enfin dans la construction, le niveau d’activité est à la hausse mais le secteur est fragilisé. Les appels d’offres publics sont en baisse (en dehors des Vallées de la Côte d’Azur touchées par la tempête Alex) et les délivrances de permis de construire souffrent de retards exceptionnels. À cela se greffent aussi des difficultés d’approvisionnement. "Le prix des matières premières ayant augmenté après que les contrats ont été passés, les capacités de négociations sont faibles et cela crée des problèmes de rentabilité, reprend Jean-Pierre Savarino. On n’envisage pas forcément 2022 sous de beaux auspices pour ce secteur."

Proportion record de PGE dans les Alpes-Maritimes

Plus encore que l’économie nationale, l’économie régionale et maralpine est donc très fragilisée eu égard au poids que représente le tourisme localement : 9 % des emplois en région Sud et 13 % dans les Alpes-Maritimes. Les prêts garantis par l’État (PGE) - dont la distribution prendra finalement fin en juin 2022 - ont joué leur rôle pendant la crise puisqu’il n’y a eu "que" 3 348 défaillances en Provence-Alpes-Côte d’Azur (-20,5 % en un an) et 1 006 dans les Alpes-Maritimes (-6,3 %).

Présentation de la conjoncture par la Banque de France — Photo : Olivia Oreggia

Dans le département, 20 470 entreprises ont été bénéficiaires du PGE (commerce et réparation automobile en tête, suivi de l’hébergement et la restauration), le tout pour un montant de 2,7 milliards d’euros (11,6 milliards d’euros en région Sud et 140 milliards d’euros en France). " 2 % des PGE de la France entière ont touché les Alpes-Maritimes", souligne Christian Delhomme, directeur départemental de la Banque de France. "Le tissu est essentiellement composé de TPE. Proportionnellement, il y a eu plus d’entreprises qui ont touché un PGE dans les Alpes-Maritimes que dans les autres départements en France. C’est vraiment une particularité locale."

Comités départementaux de sortie de crise

Et l’heure de rembourser ces prêts approche. Une première échéance se dessine au printemps 2022. "Aujourd’hui, l’entreprise n’est pas encore dans la phase où elle a totalement consommé ses capacités, mais elle est en train de le faire", souligne Jean-Pierre Savarino. "L’État en est conscient, mais il y a une législation européenne à prendre en compte, des règles bancaires. Nous avons remonté un certain nombre d‘alertes. Globalement nous allons essayer de trouver des solutions raisonnables mais qui seront de toute façon des contraintes pour certaines sociétés qui vont vivre des moments compliqués."

"Ce ne sera pas simple", confirme Joseph Bruno, chef du service des banques et entreprises au sein de la Banque de France. "Une solution pour l’entreprise est évidemment qu’il y ait une croissance solide. Une autre solution pourrait aussi être liée à une recapitalisation externe, sinon il faudra procéder à des restructurations financières des dettes qui nécessiteront un rallongement des délais."

"Pour certains secteurs, le niveau d'endettement est tel qu'il faudra vraisemblablement un traitement spécifique pour de nombreuses entreprises"

"Je crois qu’il ne faut pas attendre les solutions d’un niveau central", assure quant à lui Christian Delhomme. "Il faut y travailler justement à nos échelles, à notre niveau. Des comités départementaux de sortie de crise se mettent en place réunissant le cercle des acteurs publics, les acteurs consulaires, de la Région, du Département, les tribunaux de commerce également qui offrent des dispositifs de prévention. Pour certains secteurs dans le département, le niveau d’endettement est tel qu’il faudra vraisemblablement un traitement spécifique pour de nombreuses entreprises. Nous trouverons des solutions adaptées."

En attendant ces solutions et ces échéances, les dirigeants faisant face à des difficultés d’endettement sont incités à se signaler auprès des guichets mis en place dans ces comités de sortie de crise, auprès de la CCI, du tribunal de commerce ou de la Banque de France pour y être accompagnés au mieux.

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