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Du poids lourd à l’immobilier, Ippolito trace sa route
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Du poids lourd à l’immobilier, Ippolito trace sa route

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Spécialiste du poids lourd et des véhicules utilitaires avec Azur Trucks, le groupe familial Ippolito, né il y a plus de cinquante ans, se fait aussi peu à peu un nom dans l’immobilier et le tourisme. Ainsi, malgré la crise, l’ETI azuréenne poursuit son maillage en région Sud.

— Photo : O. Oreggia

2020 n’aura pas été « annus horribilis » pour toutes les entreprises. À Villeneuve-Loubet près de Nice, le Groupe Ippolito n’aura cessé de se développer. Si le Covid-19 est bien passé par là, pour le leader azuréen des concessionnaires poids lourds et véhicules utilitaires, l’impact aura été mesuré. « L’avantage est d’être diversifié, tous les segments ne sont pas touchés », précise Pierre Ippolito, directeur général du groupe fondé en mai 1968 par son grand-père. « L’arrêt de l’événementiel entraîne une baisse d’activité pour la location de véhicules ou l’activité traiteur. Le transport de personnes est aussi concerné. Sans bus ni croisière, les véhicules ne roulent pas et ne sont donc pas entretenus. Mais à l’échelle du groupe, cela représente une baisse de 5 à 10 % du chiffre d’affaires. Nous sommes plutôt privilégiés. Notre stratégie globale porte sur les dix ou quinze ans à venir. De même, sur la partie patrimoniale, notre logique est transgénérationnelle, avec une visibilité à trente ans. Deux années de crise n’y changeront rien. » Comment mieux illustrer la résilience propre aux entreprises familiales ?

Faire rayonner le territoire

Le groupe devrait finir l’année avec 900 collaborateurs contre 700 un an plus tôt. Résultats d’une croissance organique et externe. La très grande majorité des effectifs se concentre au sein d’Azur Trucks et de ses dix métiers, qui lui permettent une maîtrise totale de la chaîne de valeur du camion (vente, pneumatiques, groupes frigorifiques, carrosserie…). Ces trois dernières années, c’est dans des secteurs où on ne l’attendait pas que le groupe s’est aventuré. Sur la carte de visite de Pierre Ippolito, trois mots résument cette diversification : automobile, tourisme, immobilier. « Nous sommes à la fois garagistes, restaurateurs et agents immobiliers. Notre métier est de créer de la valeur pour notre territoire, d’accompagner son développement économique par différents moyens. » La proximité est ainsi une valeur portée en étendard depuis trois générations. « Avant de se lancer dans un projet, nous regardons d’abord s’il est cohérent pour nous mais aussi pour le tissu économique local. Le moteur n’est pas l’argent, faire un coup financier ne me motive pas du tout. J’ai refusé des opportunités financières qui n’avaient pas de logique à long terme. »

Un multipôle de 40 000 m2 dans le Vaucluse

Ainsi, le groupe Ippolito ne nourrit pas d’ambitions nationales. Son terrain de jeu demeure la région Sud, à commencer par la Côte d’Azur. Son actualité porte sur l’acquisition de la casse automobile Autochoc (CA 2019 : 8, 3 M€) à Cagnes-sur-Mer. « La volonté est de pouvoir proposer de la pièce de réemploi pour le poids lourd professionnel en capitalisant sur le savoir-faire de ceux qui ont déjà tous les process dans la voiture. Nous voulons aussi nous positionner sur l’économie circulaire à long terme, sur des marchés durables et pérennes ». D’autres projets devraient être finalisés en janvier « avec plusieurs acteurs pour continuer à mailler le territoire ». En attendant, un nouveau garage de 2 000 m2 est en construction, accolé au siège qui s’étend sur 40 000 m2 le long de la Nationale 7. Il s’agit d’y installer les Ateliers Mécaniques de Nice, spécialiste de la mécanique de précision, récemment entré dans le giron du groupe avec sa dizaine de salariés. C’est aussi l’opportunité pour Azur Trucks de développer sa nouvelle marque « Spirit », de fabrication de peinture et d’équipements techniques (ponts élévateurs, machines à pneu…) pour alimenter ses propres besoins et ceux de ses clients.

Un peu plus loin, toujours en région Sud, deux implantations de taille doivent prochainement se concrétiser. La première à Brignoles, au sein de la zone d’activités Nicopolis, prévoit la construction en 2021 d’un pôle de 10 000 m2, une opération de 2 millions d’euros pour regrouper plusieurs métiers en un même lieu (pneumatique, carrosserie, pièces détachées…). À Vedène, près d’Avignon, idéalement implanté sur l’axe Lyon-Marseille, un concept similaire doit voir le jour en 2022 sur 40 000 m2 (budget estimé à 6 M€). Un « village » intégrera de multiples services dédiés aux chauffeurs routiers : restaurant, lavage de véhicule, parking sécurisé…

Seule entorse jusqu’alors dans ce déploiement géographique, le groupe Ippolito s’autorise une sortie en Auvergne Rhône-Alpes. « Nous avons une activité d’entretien de groupes frigorifiques pour les secteurs liés à la GMS et l’industrie pharmaceutique. Nous sommes sur ce marché depuis cinq ans dans les Alpes-Maritimes et le Var et avons l’opportunité de nous étendre sur les Bouches-du-Rhône et le Rhône, jusqu’à Saint-Etienne. Sur ces marchés de niche, il nous faut sortir de la région pour atteindre une taille critique. Être présents sur les deux grandes agglomérations que sont Aix-Marseille et Lyon, cela a du sens pour nos clients. Mais nous n’irons pas plus loin. »

Des agences immobilières et des restaurants

Dans ce foisonnement de projets, quels sont les liens entre le poids lourd, l’immobilier et le tourisme, secteurs dans lesquels s’est lancée l’ETI azuréenne ces trois dernières années ? « Il n’y en a aucun. C’est une question de personne, de rencontres. Si vous êtes passionné jusqu’au bout de la chaîne pour bien appréhender toutes les problématiques ; si vous avez une vision claire de là où vous voulez être dans dix ans ; si vous savez quel élément différenciant vous pouvez amener, et enfin, si vous vous entourez de spécialistes, d’opérationnels hyperperformants… tout cela, allié à la capacité de financement et de vision du groupe, transforme l’ensemble en succès. »

Le Groupe Ippolito compte désormais trois agences immobilières "Maison Oréa" à Nice — Photo : O. Oreggia

Ainsi, le spécialiste du camion compte aujourd’hui trois agences immobilières à Nice, sous l’enseigne Maison Oréa qui propose un concept clé en main regroupant cinq métiers dédiés. Le maillage local se poursuit avec l’acquisition d’un portefeuille de gestion locative à Cagnes-sur-Mer.
Quant au tourisme, son développement s’est fait sous plusieurs formes : une maison d’hôtes et un vignoble à Lorgues dans le Var (le Domaine de Fauveris), une plage privée à Sainte-Maxime et, depuis janvier, un restaurant d’altitude dans la station azuréenne d’Auron.
Cette diversification se poursuivra-t-elle sur sa lancée ? « On ne s’interdit rien, mais il faut d’abord développer celles qu’on a initiées et pour lesquelles nous avons de gros leviers de croissance. Le médical m’attire, c’est un secteur qui touche tout le monde. L’e-sport aussi m’intéresse, alliant sport, technologie et compétition. Cela peut accompagner le rayonnement du territoire. De toute façon, si ce n’est pas le cas, ça ne m’intéresse pas. »

Une mission de formation

Pour alimenter encore cet ancrage territorial viscéral est né il y a deux ans, le campus Azur Trucks. « Nous avons créé un module de formation en partenariat avec Pôle emploi et l’Institut de Formation de l’Automobile. Nous avons fait une salle de classe dédiée dans nos locaux, avec atelier et matériel adaptés. Nous sommes en recrutement permanent, nous avons embauché 90 personnes depuis le 1er janvier, mais il y a pénurie de candidats. Nous créons pourtant des emplois non délocalisables, avec des rémunérations au-dessus de la moyenne. Le camion n’est malheureusement pas valorisé dans les CFA », regrette Pierre Ippolito. « Nous voulons créer à terme un centre de formation pour tous les métiers du groupe, afin de pouvoir recruter à la fois sur le savoir être et sur les compétences. Même si cela a un coût, c’est aussi notre devoir vis-à-vis du tissu économique local. »
Un centre de formation qui trouverait toute sa place dans le futur siège prévu dans les prochaines années, les locaux actuels étant devenus inadaptés. « C’est indispensable pour le bien-être des collaborateurs, pour la marque employeur ou encore pour l’image du secteur ». Un projet de plus pour Pierre Ippolito qui, à 32 ans à peine, est bien loin d’en manquer.

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