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Coronavirus - Pascal Coste : « Nous nous préparons à la reprise depuis un mois »
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Pascal Coste dirigeant et fondateur du réseau de coiffure Pascal Coste Coronavirus - Pascal Coste : « Nous nous préparons à la reprise depuis un mois »

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Pourtant loin d’être en première ligne pendant cette crise sanitaire, les coiffeurs étaient très attendus à l’heure du déconfinement. Les 120 salons de l’enseigne niçoise Pascal Coste (1 500 salariés, 55 M€ de CA consolidé) ont presque tous pu rouvrir ce 11 mai. Le fondateur dirigeant explique comment le jour J avait été préparé de longue date.

— Photo : DR

Il a beaucoup été question des coiffeurs pendant cette période de confinement, comment s’est passée la reprise dans vos salons ?

Pascal Coste : Dans l’euphorie ! Nous étions sans doute la profession la plus attendue, je n’aurais jamais cru que cela puisse arriver. Mais c’était trop, cela nous dessert au final. Il y avait trop de monde ce lundi (le 11 mai, NDLR), une vraie folie. Ça va se réguler vite. Sur la centaine de salons en succursales, trois n’ont pas pu reprendre, dont deux à Paris situés dans des centres commerciaux qui n’ont pas eu l’autorisation de rouvrir. Sur les 120 franchises, pour la même raison, une dizaine n’a pas pu reprendre.

Comment avez-vous géré l’accueil de la clientèle en cette reprise ?

Pascal Coste : Nous avons choisi de ne pas reprendre sur rendez-vous. Le « sans rendez-vous », c’est le code-barres, l’empreinte de Pascal Coste. Notre service informatique a donc développé une plateforme numérique sur laquelle le client s’inscrit à son arrivée au salon et qui lui permet d’être prévenu par SMS lorsque vient son tour. Cela évite d’attendre sur place.

Y a-t-il eu des mesures sanitaires particulièrement difficiles à mettre en place ?

Pascal Coste : Nous avions tout dessiné il y a un mois, en attendant les avancées du gouvernement. Il faut savoir que la fiche technique métier n’a été publiée par le ministère du Travail que la veille du déconfinement, dimanche 10 mai !

Les distanciations, le marquage au sol, ce n’est pas compliqué, c’est surtout du bon sens. Le plus dur a été de trouver un fabricant de gel hydroalcoolique et un bon vendeur de masques, sachant qu’on reçoit des dizaines de mails par jour proposant des masques en envoyant d’abord notre chèque ! Il a fallu dépenser beaucoup d’énergie à nous méfier des petits voyous qui tournent autour de la catastrophe pour en tirer profit.

« Tout se fait facilement tant qu’on reste dans la dynamique et qu’on garde le leadership. »

Nous avons fait fabriquer les visières dès le premier mois par notre société marketing à Sophia Antipolis, Dièse 17, qui les a adaptées à des casquettes à notre logo. Nous les avons d’abord testées dans nos salons en Suisse où le déconfinement s’est fait plus tôt. Nous avons aussi fait faire des masques en tissu par une couturière. Tout se fait facilement tant qu’on reste dans la dynamique et qu’on garde le leadership.

Conserver une dynamique : est-ce, selon vous, ce qui a permis d’assurer une bonne reprise ?

Pascal Coste : Quand des collaborateurs sont coincés dans un petit appartement parisien, ce n’est pas difficile de leur donner envie de reprendre, mais quand vous avez un petit jardin, un barbecue, une terrasse ensoleillée, que vous profitez de votre famille, ce n’est pas la même chose ! Il fallait donc toujours donner l’envie et la hargne de revenir, de retravailler. Ce devait être véhiculé dans le discours de nos managers.

Quelle a été l’activité du groupe pendant ces deux mois ?

Pascal Coste : Tous les salons et le siège étaient fermés, donc au total, 1 500 salariés étaient au chômage technique. Mais au sein de la direction, nous n’avons jamais vraiment arrêté. Nous faisions des vidéoconférences. La priorité était de gérer le maintien psychologique des salariés. Chaque manager faisait une vidéo par semaine, transmettait les messages de soutien que nous adressions. Nous voulions les tenir informés de tout ce qui se faisait au sein de leur propre société, du haut en bas de l’échelle. Nous avons vu dès le début, en visioconférence, la peur sur certains visages. Nous avons dû rassurer sur le maintien des salaires. C’était notre rôle premier. Il y a eu des moments très émouvants. Nous avons aussi joué ce rôle de soutien auprès des franchisés pour lesquels nous avons supprimé la redevance pendant la période. Nous leur avons fait profiter de nos conseillers financiers, juridiques et comptables, notamment pour contracter les PGE. Le lien a été conservé en permanence.

« Ces deux mois de fermeture, c’est 10 millions d’euros de chiffre d’affaires perdus. »

L’ensemble des emplois a-t-il été maintenu ?

Pascal Coste : Mieux que ça, nous avons profité de la période pour recruter. Nous sommes une grande entreprise, structurée, puissante financièrement, nous savions que nous allions redémarrer. Nous avons beaucoup communiqué sur les réseaux sociaux. Tout cela a attiré à nous de nombreux candidats. Nous avons signé 32 promesses d’embauches pendant ce confinement et on continue ! D’anciens collaborateurs du groupe partis sont aussi revenus vers moi.

Le site internet a-t-il bénéficié de la période ?

Pascal Coste : L’activité du site a progressé de 150 %. Elle était de 30 % avant le confinement. Nous avons gagné un an de chiffre d’affaires dessus. Je ne vous dis pas le nombre de tondeuses et de tubes de couleurs que nous avons vendus !

De quoi limiter les pertes?

Pascal Coste : Pas du tout. Ces deux mois de fermeture, c’est 10 millions d’euros de chiffre d’affaires perdus. C’est impossible à rattraper. Le bilan sera évidemment moins bon mais nous n’allons pas pleurer sur notre sort. Nous devrons nous réorganiser, nous devrons être meilleurs. Il n’y a eu aucun décès parmi nos salariés, c’est le principal. Après, ce n’est que de l’argent.

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