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Coronavirus : Les entrepôts de Marseille-Fos arrivent à saturation
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Coronavirus : Les entrepôts de Marseille-Fos arrivent à saturation

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Si les infrastructures portuaires du port de Marseille-Fos fonctionnent, l’organisation du travail a été bouleversée depuis le 17 mars pour réduire l’exposition de la main-d’œuvre portuaire au coronavirus. En parallèle, les professionnels du transit, de la logistique et du transport accusent une baisse de l’activité, de 30 à 50 %. Et pourtant des tonnes de marchandises engorgent les quais et les entrepôts faute de pouvoir être livrées chez leurs destinataires.

Le coût du stationnement des conteneurs à quai, dans le port de Marseille-Fos, pose problème — Photo : D.Gz.

Opérateur d’importance vitale, le port de Marseille-Fos fonctionne différemment depuis le 17 mars. Ce maillon essentiel de la chaîne d’approvisionnement française et européenne a dû s’adapter aux contraintes d’exploitation imposées par l’épidémie de coronavirus avec notamment une réduction des équipes dans les services aux navires (pilotage, lamanage, remorquage) pour réduire le risque de contagion.

Le pilotage a perdu 44 % de ses recettes

« Les services sont opérationnels mais les mesures sanitaires nécessitent une organisation différente et adaptée. La constitution des équipes s’adapte dans un environnement économique compliqué, reflet de l’activité internationale », explique Bruno Scardigli, président de l’Association des agents consignataires de Marseille-Fos (AACN). Raison pour laquelle les mouvements de navires ne sont plus autorisés à Marseille et Fos entre 23 heures et 5 heures du matin. Avions cloués au sol, véhicules à l’arrêt… Avec la baisse de la consommation de pétrole et des capacités de stockage arrivées à saturation, les tankers chargés de brut sont de plus en plus nombreux à stationner en rade de Fos.

Avec l’arrêt des croisières et des ferries, le pilotage a perdu 33 % de son activité depuis début avril et 44 % de ses recettes. « Deux tiers des salariés sont au chômage partiel et les pilotes prennent 15 jours par mois de congé sans solde », déplore le président du pilotage Jean-Philippe Salducci.

ArcelorMittal tourne sur un seul haut-fourneau

Dans la manutention, pas de modification dans la composition des équipes dockers mais des mesures barrières drastiques. Habitués à porter des gants, les dockers ont vu leurs équipements renforcés avec le port du masque et la mise à disposition du gel hydroalcoolique. Med Europe Terminal, qui se remet à peine d’une cyberattaque, a vu ses volumes chuter de 10 %.

À Fos, les flux conteneurisés sont en recul de 13 % en mars. Spécialiste des lignes de Tunisie, Marseille Manutention accuse une très forte chute. Le 22 mars, la Tunisie a décrété le confinement général et la fermeture des zones industrielles où sont localisés les sous-traitants des industries européennes. Selon les filières, le coup de frein est plus ou moins fort. Le sidérurgiste ArcelorMittal tourne sur un seul haut-fourneau depuis le 23 mars et devrait arrêter le second d’ici un mois. « Nous réduisons notre production pour protéger le personnel et pour nous adapter au ralentissement économique. Nous n’avons pas arrêté nos approvisionnements et expéditions ; nous nous adaptons au rythme de production et d’expédition actuel », explique le groupe luxembourgeois.

Le coût du stationnement des conteneurs en cause

En revanche les exports de céréales depuis les Tellines se portent plutôt bien depuis la réouverture de l’écluse des Sablons, fermée durant deux mois pour travaux. Depuis l’apparition de la pandémie de coronavirus, de très nombreuses escales ont été annulées en raison de la chute des volumes, et les navires empruntent des routes plus longues. « Les escales sont devenues aléatoires. La chute de la production industrielle et de la demande asiatiques impacte à la fois les exportations et les importations. La reprise des volumes en février a permis de réalimenter les circuits de distribution mais dès l’annonce du confinement le 14 mars en France, la consommation a chuté. Or les conteneurs continuaient d’arriver. Ne pouvant écouler les marchandises, les entrepôts ont été rapidement saturés. entre-temps l’Asie s’est remise à produire et les flux ne sont plus tout équilibrés. Ceux qui travaillent à l’export ont des capacités et les importateurs sont saturés », explique le président de Club Distriport Olivier Rogar. À la tête d’Orcos Logistics, il exploite 5 000 m2 sur la plate-forme logistique de Distriport.

À l’extérieur des grilles du port, de nouveaux entrepôts se sont ouverts permettant de stocker à moindre coût les conteneurs dont les transitaires ne savent que faire. Déjà sujet à polémique pendant les grèves de janvier, la question du coût du stationnement des conteneurs sur les quais a été balayée par une nouvelle initiative des armateurs qui proposent de décharger les boîtes dans un port de Méditerranée à moindres frais en attendant la réouverture des usines. Depuis début avril, les transporteurs internationaux proposent à leurs clients de débarquer la marchandise – ne pouvant être livrée à leurs destinataires — dans des ports désignés pour faire office de stock tampon. Ainsi, CMA CGM dépose les conteneurs à Malte et MSC a fléché Gioia Tauro, en Italie, et Tekirdag, en Turquie, comme ports de délestage. « Les chaînes logistiques devront être repensées. Nous irons sans doute vers une recomposition des échanges internationaux et une diversification du sourcing des entreprises et le développement des trafics intra-régionaux », a annoncé le 20 avril le PDG de CMA CGM Rodolphe Saadé.

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