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Coronavirus - Chambre d'agriculture du Var : « Cette situation coûte des millions d'euros »
Interview Var # Agriculture

Fabienne Joly présidente de la Chambre d'agriculture du Var Coronavirus - Chambre d'agriculture du Var : « Cette situation coûte des millions d'euros »

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Un mois après les premières mesures de confinement, qui n’ont pas été sans conséquence pour les différentes filières agricoles varoises, Fabienne Joly, présidente de la Chambre d’agriculture du Va, dresse un premier bilan. Elle revient aussi sur les mesures qui ont été prises pour soutenir en particulier les entreprises horticoles, durement touchées.

Fabienne Joly, présidente de la Chambre d'agriculture du Var et vigneronne. — Photo : Chambre d'agriculture du Var

Le Journal des entreprises : Quels secteurs de l’agriculture sont particulièrement touchés par la crise sanitaire et économique actuelle ?

Fabienne Joly : L’agriculture est indéniablement très fortement touchée par cet état sanitaire et en premier lieu l’horticulture. Cette dernière est une filière importante pour le département du Var : elle représente 300 entreprises et emploie plus de 1 000 salariés en proximité. Elle est organisée autour d’un centre de recherche et d’un marché aux fleurs, première place de France qui fait rayonner le secteur au niveau national. Depuis le confinement, et la remise en cause voire la fermeture de tous les circuits de distribution habituels (fermeture des fleuristes, de la SICA Marché aux Fleurs, de certains marchés de plein vent…), la filière est à l’arrêt alors qu’elle réalise une grande partie de son chiffre d’affaires au mois d’avril.

Pour soutenir le maraîchage, les services de l’État ont autorisé le maintien d’une trentaine de marchés dans le Var. Globalement, les consommateurs redécouvrent l’agriculture en circuit court et de bonne qualité, ce qui conforte la situation économique des producteurs. En outre, les grandes surfaces jouent le jeu de la proximité.

La viticulture est aussi impactée parce que la plupart des chais sont aujourd’hui fermés. Les exportations se sont écroulées, les restaurants sont fermés et seul le réapprovisionnement des grandes surfaces a lieu. Quelques viticulteurs ont réinventé leurs process de livraison et proposent des « drives », mais ça reste du bricolage.

Enfin, toute l’agriculture fait face à un important problème de main-d’œuvre (notamment étrangère), alors que la période de pleine production arrive.

Quelles mesures spécifiques ont été prises pour soutenir l’horticulture ?

Fabienne Joly : Nous avons dans un premier temps travaillé avec la préfecture pour que les plantes en pot et les pivoines puissent être distribuées au sein des magasins ouverts, notamment les grandes surfaces. Nous avions aussi obtenu une autorisation de commercialisation de plants et semences potagères pour les activités professionnelles agricoles et pour les particuliers.

Enfin, nous venons de lancer une opération de sensibilisation conjointe avec la CCI du Var pour tenter de sauver les entreprises horticoles. Nous proposons aux grandes et moyennes surfaces de soutenir cette filière dans leurs points de vente et nos équipes ont pris contact avec l’ensemble des plateformes d’approvisionnement afin de les sensibiliser et de leur proposer une offre Pivoines, dès le 15 avril. À ce jour, les enseignes Leclerc, Intermarché, Casino et Carrefour ont répondu favorablement à cet appel.

Nous ciblons en particulier la pivoine, dont la production est à son apogée en avril et mai et qui représente les deux tiers du chiffre d’affaires de printemps de la filière fleurs coupées dans le Var. Cette pivoine fait vivre une centaine de producteurs, qui produisent et commercialisent plus de 10 millions de tiges pour un chiffre d’affaires global dépassant les 7 millions d’euros.

Nous appelons aussi tous les Varois à consommer des fleurs coupées produites localement. La mobilisation doit être générale car si personne ne soutient les entreprises horticoles, elles disparaîtront dans les 6 mois.

Sauriez-vous estimer les pertes économiques de l’agriculture varoise liées à cette crise ?

Fabienne Joly : L’horticulture devrait enregistrer une perte de 12 à 15 millions de chiffre d’affaires parce que le marché aux fleurs est fermé et c’est, dès lors, facile à quantifier. Pour la viticulture, nous n’avons pas encore de retours chiffrés à cause du confinement. Mais ce que nous savons, c’est que cette situation coûte des millions d’euros et que des entreprises se posent aujourd’hui la question d’aller directement en liquidation judiciaire plutôt que de demander des aides.

« Des entreprises se posent aujourd’hui la question d’aller directement en liquidation judiciaire. »

Cette crise aura aussi permis aux Français de redécouvrir leurs agriculteurs ?

Fabienne Joly : Avec cette crise, nous espérons en effet une prise de conscience générale de l’importance d’avoir des filières agricoles fortes. Cette crise a aussi été l’occasion, en local, d’un rapprochement avec les autres chambres consulaires et d’un travail de proximité pour donner de l’activité aux « locaux » et ainsi sécuriser les territoires.

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