Montpellier
Stakrn : "L’e-sport est un vecteur de cohésion sociale et de développement économique"
Interview Montpellier # Industrie # Sport

Boris Bergerot président de Stakrn Group "L’e-sport est un vecteur de cohésion sociale et de développement économique"

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Devenue en quelques années un acteur en vue dans le monde de l’e-sport, l’agence de conseil montpelliéraine Stakrn Group accompagne l’arrivée massive des professionnels du sport et des investisseurs dans le secteur. Pour son fondateur Boris Bergerot, la discipline ouvre de nouvelles opportunités dans l’émergence de projets de territoire.

Stakrn renforce sa présence dans l’e-sport, en représentant des joueurs professionnels ou en conseillant l’émergence d’écosystèmes dédiés — Photo : DR

La crise sanitaire a suscité un engouement planétaire autour du jeu vidéo et du sport électronique (e-sport), au point d’éveiller l’intérêt de grands groupes et investisseurs. Comment le mesurez-vous dans votre activité de conseil ?

La forte croissance du jeu vidéo se mesure notamment par l’importance grandissante qu’il prend sur la plateforme de streaming Twitch, où les jeunes sont toujours plus nombreux à suivre les influenceurs et les joueurs professionnels. La perception des acteurs publics et du sport, qui étaient très réticents sur le sujet jusqu’ici, est en train de changer. Stakrn reçoit de plus en plus de marques d’intérêt alors que nous avions parfois du mal à leur proposer nos services. Tout en restant extérieurs à l’industrie du sport, nous pouvons désormais l’accompagner sur tous les enjeux de l’e-sport. Notre activité couvre à la fois le conseil en innovation, où nous accompagnons par exemple les acteurs immobiliers dans la création d’écosystèmes autour du sport électronique, le conseil en investissement, pour les entreprises qui cherchent à lever entre 100 000 et plusieurs millions d’euros, sans oublier le conseil stratégique, où nous représentons une vingtaine de talents, évoluant dans le monde du sport, de l’e-sport, de la création de contenus et des services.

Vous aviez annoncé, en 2019, le lancement d’un complexe de 16 000 m2 dédié à l’e-sport et situé à Toulouse. Comment le projet évolue-t-il ?

La mise en œuvre de ce projet, baptisé Icône Arena, a été pénalisée par la crise sanitaire. La situation nous a contraints à repartir avec d’autres partenaires immobiliers, pour relancer un projet plus global, qui intégrera du cinéma et des logements en plus de l’e-sport, sur une surface de 10 000 m2. La destination initiale, à proximité de la station de métro Argoulets, n’a finalement pas été retenue, et le futur complexe sera construit dans un nouveau quartier en pleine émergence à Toulouse. Le bâtiment tel que nous l’avions imaginé pour l’appel d’offres sera identique dans ses fonctionnalités (e-sport, loisirs, restauration, etc.) mais pas dans l’architecture. Globalement, Stakrn gère une dizaine de projets de ce type en France et en Europe. Nous construisons un hub d’innovation près de l’aéroport de Genève, en partenariat avec une filiale de Bouygues : il intégrera une arena, une école, et des espaces de coworking et d’incubation de start-up sur 12 000 m2. Nous avons aussi créé notre propre modèle de campus dédié à l’e-sport, en lien avec des partenaires privilégiés : les premiers sont déjà signés à Marseille et à Roubaix, et un troisième est en bonne voie à Clermont-Ferrand.

Cette nouvelle séquence très favorable à l’e-sport vous pousse-t-elle à développer de nouveaux projets ?

Ils concernent tous notre activité de conseil en innovation, qui est en forte croissance car nous recevons de plus en plus de demandes pour des projets immobiliers : quand un promoteur répond à un appel d’offres pour un complexe de ce type, il nous identifie rapidement pour se faire épauler. Les dossiers que j’évoquais sont difficiles à mener, et nécessitent des missions pouvant durer six ou sept ans, ce que nous sommes les seuls à faire en France. Nous avons aussi des collaborations dans la formation, car les universités et les établissements d’enseignement supérieur veulent créer des cours ou de nouveaux cursus autour du jeu vidéo. Il s’agit le plus souvent d’ouvrir des diplômes existants dans la communication ou le management du sport aux enjeux de l’e-sport.

Des industries culturelles classiques telles que celle du cinéma ou de l’édition traversent une mauvaise passe, tandis que le jeu vidéo et l’e-sport sont en forte émergence. Dans ce paysage, quels sont les nouveaux enjeux que vous évoquez ?

Nous vivons un vrai tournant. Dans la sphère sportive, j’observe une prise de conscience sur le fait que le sport et l’e-sport ne s’opposent pas : un jeune qui est mordu de jeux vidéo peut aussi pratiquer le football ou le tennis. Les gens comprennent aussi tout ce que l’e-sport peut apporter en termes d’intégration et de mixité sociale : c’est une discipline ouverte même aux personnes handicapées ou issues de quartiers difficiles. De plus en plus de clubs professionnels s’y intéressent, avec des approches qui varient selon leur compréhension du médium : soit ils créent des équipes professionnelles et leur marque voyage à travers le monde, comme l’a fait le PSG, soit ils veulent démontrer aux clubs concurrents qu’ils ont les moyens d’attirer cette tranche d’âge. Sur le plan économique, le potentiel est énorme. Le jeu vidéo est devenu la première industrie culturelle en France, avec des millions de joueurs amateurs qui pratiquent et suivent avec passion les compétitions professionnelles. Pour l’Occitanie, un événement tel que "Occitanie E-Sport" (tournoi d’e-sport créé en 2018, NDLR) a donné une grande visibilité internationale à la région et à la ville de Montpellier, en sachant attirer des joueurs de renommée mondiale et en générant des centaines de nuitées sur le territoire. Et il est important de se positionner sur ce sujet, car les enjeux sont les mêmes en Espagne, en Allemagne, en Scandinavie ou en Pologne, sans parler des États-Unis et de l’Asie. En résumé, l’e-sport est un vecteur de cohésion sociale et de développement économique pour les territoires, et tous ceux qui ne l’avaient pas compris y viennent aujourd’hui.

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