Hydrogène vert (2/2) : Toulouse et sa région en pole position sur les mobilités
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Hydrogène vert (2/2) : Toulouse et sa région en pole position sur les mobilités

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Aéronautique, ferroviaire, transports routiers ou maritime... L'hydrogène vert fait une entrée remarquée dans l'industrie des transports, avec des initiatives emblématiques en Occitanie, où de nombreux projets industriels se précisent.

Airbus a dévoilé en septembre dernier ses trois concepts d'avions à hydrogène, dont les premiers vols sont espérés en 2035 — Photo : Airbus

L’hydrogène tend à s’imposer comme le carburant alternatif de demain dans les transports, qu’ils soient terrestres, maritimes ou aéronautiques. En Occitanie, les projets se multiplient, avec des retombées attendues en termes d’investissements et d’emplois. Une dynamique soutenue par la Région Occitanie via son plan Hydrogène Vert (150 millions d'euros sur dix ans), engagé dès 2019, et dans laquelle s’affichent quelques projets majeurs.

Un drone à hydrogène pour des vols longue distance

L’aéronautique est déjà dans les starting-blocks, Airbus en tête. Le constructeur européen a présenté sa stratégie hydrogène en octobre 2020 et franchit depuis, une à une, les étapes d’un programme qui doit aboutir à faire voler un avion commercial à hydrogène à l’horizon 2035. Pour sa part, le groupe Safran, dont le centre névralgique de R & D sur les piles à combustible est basé à Toulouse, pilote depuis 2017, via sa filiale Safran Power Units, spécialisée dans les groupes auxiliaires de puissance (APU) pour l’aéronautique civile et militaire, un grand projet collaboratif et pluriannuel baptisé Pipaa (pile à combustible pour applications aéronautiques).

>> Lire le premier volet de cette enquête : Hydrogène vert (1/2) : comment la filière se structure en Occitanie

À une tout autre échelle, néanmoins ambitieux, le projet du droniste Delair, basé à Labège. La PME de 130 salariés jette les bases, au côté de l’Isae-Supaero, d’un nouveau programme collaboratif, baptisé « Défi Mermoz ». L’objectif est de développer un drone à hydrogène liquide, conçu pour les vols longue distance, capable de traverser l’Atlantique. Premier vol attendu pour 2023. « Notre ambition est d’embarquer à nos côtés des acteurs majeurs de l’aéronautique et de contribuer à structurer une filière française autour de briques technologiques qui pourront servir au développement des avions du futur », souligne Bastien Mancini, directeur général de Delair.

Diversification pour Liebherr et Nexeya

D’autres industriels de l’aéronautique accélèrent aussi leurs travaux sur l’hydrogène vert. C’est le cas de Liebherr Aerospace Toulouse. L’équipementier est accompagné par le plan France relance sur deux projets spécifiques : la réinternalisation d’une ligne de pompes liquides qui adressera de nouvelles solutions pour des marchés émergents autour de l’hydrogène et de la pile à combustible et le développement de compresseurs à air grande vitesse, pour la propulsion à base de piles à combustibles pour le transport ferroviaire.

Bastien Mancini, directeur général de Delair dans l’atelier de Labège — Photo : © Delair

Pour l’ETI toulousaine Nexeya (620 salariés, 95 M€ de chiffre d’affaires en 2019), passée dans le giron du groupe allemand Hensold en 2019, l’hydrogène est aussi un axe stratégique de développement et de diversification. Si son centre d’excellence hydrogène est à La Couronne, en Charente, ses équipes toulousaines sont impliquées dans de nouveaux projets de systèmes complets associant pile, stockage et conversion d’énergie, dont une solution dédiée à la mobilité lourde. « Il s’agit notamment de concevoir et d’industrialiser des conteneurs de transport pour de l’hydrogène gazeux compressé à 500 bars adaptés à la logistique hydrogène multimodale, pour le transport routier, ferroviaire, maritime ou fluvial », précise Olivier Besombes, directeur général de la Global Business Unit Aerospace et Systèmes civils de Nexeya. La société est également engagée, dans le cadre du projet régional Green Harbour, dans le développement d’une barge dédiée à l’alimentation électrique de navires à quai, à partir d’hydrogène vert, avec pour site pilote le port de Sète (lire par ailleurs).

Bientôt des trains à hydrogène

Chez Alstom, le train à hydrogène est déjà une réalité et son industrialisation passe par Séméac, dans les Hautes-Pyrénées, où le groupe dispose de son centre d’excellence dédié aux systèmes de traction. 700 salariés travaillent sur ce site, dont près de 40 % en R & D. Le iLint, dont deux premiers exemplaires sont déjà en service en Allemagne depuis 2019, a ouvert la voie. 41 trains sont en commande. Fin 2020, le groupe a aussi annoncé un nouveau contrat en Italie pour six trains régionaux à hydrogène (une déclinaison hydrogène de ses trains Coradia Stream). En parallèle, Alstom est engagé dans le développement pour la France d’un TER Regiolis hydrogène, une alternative verte aux TER diesel. Sa mise en service commerciale est prévue pour 2025, avec un engagement de 14 premiers exemplaires à livrer à quatre régions françaises, dont l’Occitanie, qui a confirmé très tôt sa commande pour trois rames.

Après les bus de ville à hydrogène, les autocars

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De son côté, avec son Businova H2, Safra (245 salariés, 25 M€ de chiffre d’affaires en 2020) s’affiche comme l’un des pionniers en Europe des bus à hydrogène, d'ailleurs reconnu par le gouvernement qui a choisi l'entreprise albigeoise pour accueillir son premier Conseil national de l'hydrogène. « Nous sommes les seuls à proposer une solution 100 % française », se félicite Vincent Lemaire, président du groupe Safra. Soutenue par la Région et par la communauté d’agglomération de l’Albigeois, la société annonce un programme de croissance accélérée avec la création de 400 emplois supplémentaires d’ici fin 2023 et plus de 1 000 emplois à l’horizon de 2030. Un projet industriel qui bénéficie du dispositif de France Relance à hauteur de 750 000 euros et de la dynamique du plan national Hydrogène.

À ce jour, douze Businova H2 sont en service, à Lens (Pas-de-Calais), Versailles (Yvelines) et Le Mans (Sarthe) et dix autres sont en commandes fermes, dont les quatre exemplaires attendus pour l’Aéroport de Toulouse. Incluse depuis peu dans l’offre d’autobus à hydrogène de la centrale d’achat public Ugap (Union des Groupements d’Achats Publics), la société se prépare à une accélération. Au programme : une extension de 7 000 m2 des ateliers et l’acquisition de nouveaux moyens de production. L’investissement de 7 millions d’euros accompagnera une montée en cadence sur le Businova H2 (pour porter la capacité à 150 unités par an) et la diversification du site dans la rénovation de matériels roulants pour la SNCF. En parallèle, Safra s’engage aussi dans une nouvelle aventure : le développement d’un autocar routier à hydrogène de 18 mètres. Une phase amont d’expérimentation sera engagée dès 2021 avec le rétrofit de 15 autocars gasoil en autocars électriques à pile à combustible hydrogène, grâce à un nouvel accompagnement de 4 millions d’euros de la Région Occitanie. Safra prévoit de mobiliser 17 millions d’euros en R & D sur la période 2021-2023 et une levée de fonds de 26 millions d’euros devrait être bouclée d’ici la fin du premier semestre.

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