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Frédéric Carpent : « Il n'y a pas de sens à opposer qualité de vie au travail et performance »
Interview Toulouse # Informatique # Ressources humaines

Frédéric Carpent président de 3X Consultants Frédéric Carpent : « Il n'y a pas de sens à opposer qualité de vie au travail et performance »

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Vingt ans après sa création, le spécialiste toulousain des ressources humaines 3X Consultants (11,8 M€ de chiffre d'affaires en 2018) est passé de 3 à 150 salariés. Un succès qui s'explique par la diversification d'une société aujourd'hui présente sur sept métiers (formation, externalisation, stratégie, systèmes d'information...), mais aussi par un management atypique, basé sur l'autonomie et la confiance.

Selon Frédéric Carpent, président de la société de conseil en ressources humaines toulousaine 3X Consultants, la réforme de la formation professionnelle va permettre aux entreprises de devenir moteurs — Photo : 3X Consultants

Le Journal des Entreprises : Après le départ de votre associée Monique Frambourg en février, vous êtes désormais le seul actionnaire de 3X Consultants. Comment voyez-vous le développement de la société ?

Frédéric Carpent : Nous projetons pour 2022 un chiffre d'affaires entre 15 et 17 M€, pour des effectifs de 180 à 200 salariés, en fonction des opportunités de rachats. Depuis 2015, la croissance du chiffre d'affaires s’est faite de façon à peu près égale entre organique et externe. C’est un équilibre que nous souhaitons conserver, car il permet une réelle intégration culturelle des filiales. Côté métier, les trois prochaines années seront centrées sur l’intégration des changements réglementaires et sur la digitalisation.

Quels sont les enjeux de la digitalisation dans l’univers des ressources humaines ?

F. C. : Avec notre marque Oxalia, nous disposons d’une longue expérience dans les systèmes d’information dédiés aux RH : il y a cinq ans c’était un avantage concurrentiel, aujourd’hui c’est perçu par nos clients comme une norme.

Dans l’effort d’innovation, nous nous positionnons face des éditeurs de taille mondiale, avec des solutions fermées ou coûteuses en développement. Nous avons choisi une approche différente, ciblée sur les besoins des PME et ETI : nous avons créé une plateforme, e-Leo, qui laisse au client le choix des thématiques qu’il veut développer, et nous lui adressons l’acteur le plus performant actuellement sur ces métiers, généralement des start-up travaillant en mode ouvert. Nous couvrons déjà la formation, les compétences, les habilitations hygiène et santé au travail... et la plateforme va s’enrichir.

Un autre sujet concerne la formation professionnelle. La réforme en cours prévoit la digitalisation des cursus : nous avons choisi de nous concentrer sur le marché de la formation interne, où les entreprises possèdent des compétences métiers mais sont dépourvues sur le volet animation.

La réforme de la formation professionnelle vous ouvre donc de nouvelles portes ?

F. C. : Nous nous intéressons aux centres de formation des apprentis (CFA), où les entreprises vont devenir moteurs. Le vrai enjeu, ce ne sont pas les grands comptes, mais les PME, qui n’ont pas les volumes ou les compétences pour gérer ce type de projets. Il y aura une pertinence à créer des CFA interentreprises : nous travaillons actuellement avec les futurs Opco (opérateurs de compétences, amenés à remplacer les actuels Opca, NDLR) pour créer des propositions par métier, avec un impératif de proximité pour les PME.

Depuis sa création il y a vingt ans, 3X Consultants se fait l’avocat d’un management "agile". Comment cela se traduit-il dans vos pratiques ?

F. C. : Nos maîtres-mots sont la responsabilité, l’autonomie et la confiance. Nous n’avons, par exemple, pas de système de validation des congés, et le télétravail est pratiqué à l’initiative du collaborateur. Certaines personnes peuvent d’abord être déboussolées par ce fonctionnement. Mais elles comprennent vite qu’il existe une contrepartie business, à savoir la capacité à répondre aux besoins de leurs clients.

« On peut toujours améliorer les compétences techniques d’un collaborateur, pas son état d’esprit. »

Sur le recrutement, nous ne regardons quasiment pas les CV : on sera plutôt attentifs au parcours professionnel des candidats, aux projets dans lesquels ils se sont épanouis, à leur capacité d'ouverture… On peut toujours améliorer les compétences techniques d’un collaborateur, pas son état d’esprit. Nous fonctionnons sur ces principes d’autonomie et de confiance depuis le début, avec l’idée que l’on passe tellement de temps dans l’entreprise que la notion de bien-être y est déterminante. Notre développement semble valider ce qui pouvait passer au début pour une utopie.

Cherchez-vous à diffuser ces valeurs chez vos clients ?

F. C. : Notre rôle reste de les accompagner dans leur croissance via les fonctions RH. Ceci dit, notre positionnement est de leur démontrer que leur principale ressource réside dans le potentiel de leurs collaborateurs.

Par exemple, nous poussons nos clients à sous-traiter les entretiens professionnels. Un consultant extérieur permet une forme de médiation entre le salarié et son manager. L’objectif est d’amener les collaborateurs à se projeter dans l’avenir : les domaines d’activité où ils aimeraient travailler, les responsabilités qu’ils aimeraient prendre, mais aussi les aspirations plus personnelles, comme un déménagement. Une entreprise qui connaît les souhaits d’évolution de ses salariés pourra les intégrer dans son plan de formation interne, décider le lancement de nouvelles activités, adapter ses projets de recrutement. Bref anticiper à deux ans, et non pas réagir à un préavis de deux mois.

Quand on voit la difficulté de recruter, c’est un progrès majeur en termes de business. Pour moi, il n’y pas de sens à opposer la qualité de vie au travail à la performance économique.

Toulouse # Informatique # Organismes de formation # Ressources humaines