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La coopérative agricole Maïsadour se cherche un nouvel équilibre
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La coopérative agricole Maïsadour se cherche un nouvel équilibre

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Le groupe coopératif agricole Maïsadour, basé à Haut-Mauco dans les Landes, prépare un bilan financier "à l’équilibre". Pourtant, il subit le double impact de l’inflation et de la grippe aviaire sur ses activités. Il maintient malgré tout de multiples investissements stratégiques pour renforcer sa résilience aux crises qui se succèdent.

En 2022, le chiffre d’affaires du groupe landais Maïsadour devrait revenir à l’équilibre, après une année 2021 chahutée — Photo : Maïsadour

C’est à un exercice de funambule auquel a dû se livrer le groupe coopératif landais Maïsadour (4 810 salariés) sur la période 2021-2022. "Nous allons clôturer à l’équilibre, ce qui est un changement majeur", souligne ainsi son président, Michel Prugue, après un bilan 2021 chahuté à 1,27 milliard d’euros de chiffre d’affaires contre 1,36 milliard sur 2019-2020, principalement porté par les pôles agricole (44 % du chiffre d'affaires, grandes cultures dont le maïs, nutrition animale) et gastronomique (25 %, transformation agroalimentaire). "Les différentes crises montrent notre solidité", tient à appuyer le dirigeant, quelques semaines avant l’assemblée générale de fin d’année.

Douloureuse inflation

Les aléas se succèdent pourtant pour le groupe de 91 sociétés (dont les marques Maison Delpeyrat, Comtesse du Barry, St Sever). L’inflation reste l’une de ses principales sources d’inquiétude : il chiffre déjà son impact à 106 millions d’euros. "Notre facture énergétique (gaz et électricité) a pris 41 % et nous n’avons pas de visibilité. Même chose sur les engrais : l’azote est passé de 450 à 1 000 euros la tonne. En deux ans, la nutrition animale a pris 80 % de hausse, déplore ainsi Michel Prugue. La coopérative transmet les hausses à ses filiales qui les répercutent à leurs clients. Sur certains segments de marchés, nos clients comprennent l’augmentation. En revanche, des centrales de distribution jouent sur les prix et ont recours à des artifices malsains, comme faire venir de la volaille de l’étranger."

Le prix des céréales, lui, n'a pas attendu la guerre en Ukraine pour augmenter. "C’est un facteur aggravant mais nous luttons contre cette hausse depuis deux ans. Personne ne parle de la Chine et de ses achats, qui en sont l’une des principales raisons avec le manque de récoltes. On va devoir s’habituer à des fluctuations de prix", analyse Michel Prugue. Tout en louant une activité maintenue à "près de 70 %" en Ukraine, le dirigeant déplore déjà "une très mauvaise année de récolte", notamment sur le maïs. Au-delà des aléas climatiques, les coûts de l’énergie n’y sont pas étrangers. "Certaines sociétés qui nous vendent du gaz, utilisé pour le séchage du maïs, ont voulu faire passer des hausses de tarif importantes. Des séchoirs n’ont pas fonctionné cette année", faute de coûts trop importants, assure-t-il.

Réduire les dépenses

Pour faire face à la conjoncture, Maïsadour agit sur plusieurs niveaux, notamment en améliorant son autosuffisance énergétique. "Nous réfléchissons au développement de projets photovoltaïques ou à récupérer la chaleur fatale de voisins industriels". Le groupe continue d’améliorer son bilan énergétique, y compris industriellement, exemple à l’appui : début octobre, il a inauguré l’usine modernisée de Condom (Gers), site de 165 salariés dédié à la production de poulet jaune, un investissement de 15 millions d'euros pour augmenter sa capacité de production. L’usine souhaite notamment "réduire de 75 % sa consommation de gaz d’ici un an […] et installer des panneaux photovoltaïques sur le parking", révèle Michel Dolet-Fayet, vice-président du pôle volailles (16 % du chiffre d'affaires groupe). Un plan d’économies lancé en février 2022 a aussi permis de sauver 11,6 millions d'euros de dépenses, et "cinq à six millions d'euros de plus sont prévus sur le prochain exercice". 400 initiatives ont été mises en place, de la refonte du parc roulant à des économies sur les achats groupés.

Impact épidémique

Les projets d’investissements ne manquent pas pour Maïsadour, notamment dans la volaille. En juillet, la coopérative a annoncé la reprise à 100 % du capital de Fermiers du Sud-Ouest, cofondé en 2010 avec Galliance, pôle volailles du groupe ligérien Terrena, qui cède ainsi ses parts (49 %) au groupe landais. Les raisons invoquées à l'échec de cette coentreprise : les "évènements conjoncturels" et l’influenza aviaire, toujours source d’inquiétude, Maïsadour estimant son coût direct (avant aides) à 20 millions d’euros. "Nous avons mis 1 500 salariés en chômage partiel pendant 4 à 6 mois. 19 millions d’animaux ont été perdus en France, 5,5 millions chez nous, résume le président du groupe coopératif. La stratégie précédente de mise à l’abri, même si elle a limité l’impact de l’influenza, n’a pas suffi. Nous avons conclu qu’une concentration d’élevages sur certains territoires historiques pouvait être une faiblesse."

Une mesure inédite a donc été décidée : vider les élevages sur quatre départements entre la mi-décembre et la mi-janvier pour "diminuer la pression. Les entreprises, productrices comme transformatrices, auront un manque à gagner, mais c’est le choix du moindre mal". Les mesures se succèdent : désinfection des transports, tentative de détections précoces et vaccin, attendu pour 2023. Maïsadour a ainsi commandé un million de doses à l’entreprise girondine Ceva Santé Animale pour vacciner 500 000 canards (sur un cheptel de trois millions en 2021). "Nous allons établir des protocoles pour définir le périmètre géographique de ces tests grandeur nature, décrit Michel Prugue. Ça n’éradiquera pas le virus et il faudra maintenir les précautions prises sur la biosécurité, mais nous espérons que ce sera une solution sur le long terme."

Un futur géant du canard

Face aux défis à venir, le groupe Maïsadour ne lésine pas sur les moyens. L’an dernier, aux côtés du gersois Vivadour, il a ainsi créé la société Graines d’Alliance pour porter une filière régionale du soja servant à alimenter la volaille. Il a récemment mis en route une usine de traitement à Saint-Sever (Landes) pour transformer 30 000 tonnes de graines de soja en tourteaux et huiles. "Nous devons convaincre les agriculteurs qu’ils ont un intérêt économique et agronomique à faire du soja", affirme ainsi le président de Maïsadour, qui indique que cette usine de trituration "vitrine", lauréate de France Relance, a coûté 15 millions d'euros.

Côté mutualisation, une autre opération de taille se dessine déjà : le rapprochement avec le béarnais Euralis, propriétaire de Montfort ou Rougié (1,44 milliard d’euros de chiffre d'affaires en 2021). Toujours en attente de validation par l’autorité de la concurrence, il vise notamment à "optimiser un parc industriel commun" et renforcer des synergies naissantes au travers d’une société commune de production, transformation et commercialisation des canards à foie gras, poissons fumés et boutiques de vente directe. De quoi permettre à Michel Prugue de se montrer "plutôt optimiste" pour 2023 : dans sa dernière feuille de route, Maïsadour a affirmé viser une progression de 20 % de son chiffre d’affaires d’ici 2026.

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