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Immersion : « Notre enjeu est de croître et de renforcer notre positionnement à l’export »
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Christophe Chartier PDG d'Immersion Immersion : « Notre enjeu est de croître et de renforcer notre positionnement à l’export »

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Depuis 1994, Immersion fournit des solutions de réalité virtuelle et d’expériences 3D pour l’industrie. Après avoir traversé une zone de turbulences en 2016, la pépite bordelaise semble avoir stabilisé la situation et rêve désormais de voler vers l’Asie. Plan de vol avec son PDG, Christophe Chartier.

Christophe Chartier a créé Immersion, en 1994, sur une intuition : la 3D va devenir un langage commun. — Photo : Immersion/anaelb.com

Comment est née l’idée d’Immersion en 1994 ?

Christophe Chartier : En me baladant dans les rayons de la Fnac en 1993, je tombe sur un livre qui décrit la techno de réalité virtuelle. Il détaillait tous les usages qui apparaissent aujourd’hui. Et il comprenait une sorte d’annuaire de tous les acteurs du secteur. Avec le cofondateur, on décide de tous les contacter, par fax ! Puis nous avons compilé toutes ces brochures pour en faire un catalogue des outils qui existaient à l’époque. On s’est mis à faire du négoce, on nous appelait « le quincailler de la VR ». La première année a été catastrophique… puis petit à petit nous avons noué des contacts avec de gros industriels, notamment avec PSA pour qui nous avons déployé 60 simulateurs pour la Xsara Picasso en 1998.

Comment êtes-vous passé de « quincailler » à pépite de la réalité virtuelle ?

C.C. : Pour toucher un marché plus large, nous avons créé un département de recherche et développement (R&D) dès 2006 et nous nous sommes mis à développer nos propres produits, notamment une table collaborative pour la gestion de crise. Jusqu’à Shariiing en 2014, un ensemble de solutions logicielles de partage et de collaboration pour accompagner les entreprises dans leur transformation numérique. Tout est fabriqué sur place, dans nos locaux bordelais.

En plus de 20 ans d’existence, vous avez tout de même traversé des zones de turbulence…

C.C. : Nous avons connu un moment difficile en 2016. On avait fait le choix de la bourse pour financer l’industrialisation de nos logiciels. Ce n’était pas la meilleure époque, l’économie n’était pas au top. On cherchait à lever 5 millions, on a finalement eu 2,5 millions d’euros. On n’a pas vraiment eu les moyens de nos ambitions. Et là, mauvais alignement des planètes… badaboum ! Un dénommé Mark Zuckerberg (le patron de Facebook, ndlr) débourse 2 milliards pour acheter Oculus Rift (un casque de réalité virtuelle). D’un coup, les casques que l’on vendait entre 60 000 et 100 000 euros étaient accessibles entre 600 et 1 000 euros ! A ce moment-là, tous les clients à qui on avait fait des propositions à 150 000 euros nous signaient finalement des contrats à 1 000 euros. On a essuyé une perte financière de 2,3 millions cette année-là.

De quelle manière avez-vous redressé la barre ?

C.C. : C’est la force d’une boîte de passionnés. On s’est tous mis autour de la table, notamment les actionnaires (dont 11 salariés), et on s’est retroussé les manches. On a commencé par faire attention à nos dépenses. Puis finalement, de gros contrats qui avaient pris du retard, se sont concrétisés. Puis nous avons été fertiles en innovation : 2 brevets importants ont été déposés à ce moment-là.

« Replacer l’Homme au cœur des décisions, c’est le rempart contre les dérives de la technologie ! »

Comment imaginez-vous le futur de la réalité virtuelle ?

C.C. : Quand j’ai acheté ce bouquin en 1993, je n’aurais jamais pu imaginer qu’un jour dans ce même magasin n’importe qui pourrait acheter un casque de réalité virtuelle… Et pourtant ! Je pense que dans 10 ans, on n’utilisera plus de casques, on verra seulement des hologrammes. Le plus important, c’est de trouver des solutions pour mettre de l’humain dans les décisions, pour replacer l’Homme au cœur de la technologie. C’est le rempart contre les dérives de certaines technos dont on parle beaucoup, comme l’intelligence artificielle et le big data.

Lorsque le secrétaire d’Etat au Numérique, Mounir Mahjoubi, vous a rendu visite en décembre dernier, vous lui avez glissé que vous cherchiez à lever 10 millions d’euros. A quoi serviront ces fonds ?

C.C. : Notre enjeu est de croître, et de renforcer notre positionnement à l’export car le territoire national est plus compliqué. Nous tissons des liens à Singapour où je me suis rendu trois fois en un an. A terme, une équipe d’Immersion sera basée à Singapour. Nous développons aussi des projets intéressants avec la Malaisie.

24 ans après, peut-on réellement dire que vous êtes une start-up ?

C.C. : On en a l’ADN en tout cas. Sinon nous ne nous serions pas relevés en juin 2016. Immersion est une start-up « vintage » !

Propos recueillis par Astrid Gouzik

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