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Bordeaux se dessine un avenir animé
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Bordeaux se dessine un avenir animé

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Pour la seconde année consécutive la métropole a accueilli le Cartoon Movie, le forum européen à ne pas manquer pour qui produit, réalise et investit dans le cinéma d’animation. Bordeaux, place de congrès, profite ainsi de sa capacité à recevoir tout ce beau monde artistique et financier, mais les objectifs sont ailleurs. La filière de l’animation entend faire briller ses talents, pour en attirer de nouveaux… le tout sans faire d’ombre à Angoulême.

— Photo : Anne Cesbron

Il a beau avoir une licorne en guise de serre-tête, on sent bien que le producteur Nicolas Schmerkin est dans ses petits souliers. Aux côtés d’Alberto Vasquez, réalisateur du film qu’il est venu présenter, il va droit au but : il recherche 3 millions et espère trouver dans son auditoire les professionnels qui investiront dans Unicorn Wars, film d’animation pour adultes attendu pour 2020. « Un budget très raisonnable. J’attends vos propositions », lance-t-il à la salle.

Après le pitch et la projection – format de toute présentation au Cartoon Movie –, on retrouve le producteur dans l’espace où s’échangent les premières réactions, en attendant les cartes de visite et les rendez-vous business tant convoités. Unicorn Wars est un projet porté par le studio parisien Autour de Minuit de Nicolas Schmerkin et par son associé Thibaut Ruby du studio bordelais Schmuby. Trois autres films sur les 60 présentés pendant le forum sont estampillés "projets régionaux". Marmitafilms, autre studio d’animation bordelais, a ainsi participé au long-métrage franco-belgo-roumain L’Extraordinaire Voyage de Marona.

Un écosystème créé par le jeu vidéo

Dans les allées, alors que l’on s’est mis en quête d’acteurs girondins, on nous cite volontiers Solidanim et ses effets spéciaux pour le cinéma ou l’association Bordeaux Games. « Bordeaux c’est aussi Asobo Studio qui incarne avec d’autres la réussite de la filière du jeu vidéo », poursuit Aymeric Castaing, producteur installé à Bordeaux. « Le jeu vidéo, c’est vraiment notre spécificité. Son développement constitue un écosystème ultra favorable pour toute la filière de l’image. Les graines semées voilà plus d’une dizaine d’années portent leurs fruits aujourd’hui. Solidanim signe des contrats avec des majors américaines, Ubisoft s’installe à Bordeaux… ».

Un constat partagé par Dominique Rodriguez, directrice de l’Ecole supérieure des métiers de l’image (ESMI) à Bordeaux. Elle-même passionnée depuis toujours par le cinéma d’animation et le jeu vidéo, témoigne d’un dynamisme local nouveau. Lorsqu’elle fonde l’ESMI en 2006 au cœur du quartier des Chartrons, ses étudiants sont recrutés par des studios d’Angoulême. Ce sont des années plus tard que les entreprises de Bordeaux commencent à recruter significativement ses diplômés. L’arrivée de sociétés spécialisées dans la 3D aurait alors changé la donne en termes de débouchés à Bordeaux pour les modeleurs, animateurs et intégrateurs fraîchement sortis de l’ESMI. « La dynamique s’est développée à ce moment-là. Les studios d’animation sont arrivés plus tard », explique Dominique Rodriguez, « tout comme les nouvelles écoles qui ont ouvert, portées par cet engouement ».

« Les studios s’arrachent tous ces jeunes techniciens », confirme Marc Vandeweyer, directeur général de Cartoon Movie. « Grâce aux nouvelles technologies, les sociétés ont rapatrié une part importante de leur main d’œuvre qui était jusqu’alors délocalisée en Asie ».

Plein emploi

Les excellents résultats des productions françaises à travers le monde ne sont pas étrangers non plus à ce contexte de plein emploi dans l’industrie de l’animation. « Un film qui fait 300 000 entrées en France peut en faire le double au Mexique ou en Pologne ». Une exception nationale qui connaît à Angoulême une illustration éclatante : « 30 studios dans une ville de cette taille, ça n’existe nulle part ailleurs en Europe ». Cette émulation est par ailleurs régulièrement récompensée lors des compétitions les plus prestigieuses : on pense à Ernest et Célestine, Kirikou ou encore à Ma vie de Courgette en 2017. Croc-Blanc, actuellement à l’affiche, est aussi une superproduction régionale, made in Angoulême.

« Cette vivacité donne tout son sens à la tenue de Cartoon Movie en Nouvelle-Aquitaine, poursuit Marc Vandeweyer. Ici l’animation a le vent en poupe ». L’organisateur se félicite également des 20 % de participants supplémentaires cette année par rapport à 2017, portant à 900, le nombre de professionnels présents au Palais des Congrès de Bordeaux-Lac. « C’est du jamais vu, certaines projections ont réuni plus de 400 personnes ». Et d’annoncer : « Oui, on restera à Bordeaux ».

Rendez-vous est également pris du côté du principal financeur institutionnel de l’événement. « Le président de la région Nouvelle-Aquitaine Alain Rousset souhaite signer une convention de trois ans avec les organisateurs », confirme Eric Correia, conseiller régional, délégué à l’économie créative, à l’innovation et aux droits culturels.

Sans crainte de froisser Angoulême et son pôle image Magelis ? « Tous soutiennent la tenue à Bordeaux de l’événement », rassure l’élu, d’autant que tous se réjouissent de l’ouverture prochaine du bureau régional d’accompagnement aux entreprises de la filière… à Angoulême !

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