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 Aurélien Hivonnet (Sollen) : "Le made in France nous permet d'assumer notre positionnement premium"
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 Aurélien Hivonnet (Sollen) : "Le made in France nous permet d'assumer notre positionnement premium"

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À la faveur de la pandémie, après 13 années passées en Chine, Aurélien Hivonnet a choisi de quitter Canton près de Shenzen où il avait créé la marque de mobilier d’intérieur meeloa pour une nouvelle aventure entrepreneuriale. Le quadragénaire a trouvé dans le Sud-Ouest un écosystème favorable au made in France pour lancer son entreprise Sollen, qui fabrique des fauteuils haut de gamme.

Aurélien Hivonnet, cofondateur de Sollen et son fauteuil Nuage, designé par Didier Garrigos — Photo : Anne Cesbron

Que retirez-vous de votre expérience asiatique ?

Mon expérience en Chine m’a énormément apporté pour comprendre comment fonctionne le marché, la production, l’approvisionnement, le coût de la matière première, de la main-d’œuvre, etc. J’y conserve, via la société ASI Action basée à Hong Kong, une activité de conseil pour les entreprises qui souhaitent venir y produire. Il y a cinq ans, avec le lancement de notre marque meeloa, j’ai compris que nous n’avions pas assez travaillé le prix de nos produits. Nous souhaitions proposer de la qualité, des bons matériaux, du confort, or ce qui est recherché avant tout en Chine, c’est le prix. Nous nous sommes rapidement orientés BtoB en direction des hôtels et restaurants principalement, le particulier ayant du mal à comprendre notre niveau de prix. Nous étions sur quelque chose de trop qualitatif, pas assez différenciant visuellement. Et estampillé Asie.

En quoi la crise sanitaire vous a-t-elle poussé à relocaliser votre projet en France ?

On voyait que meeloa ne se développait pas, c’était le moment de passer à autre chose. La crise a été le déclencheur. Dans un contexte de déplacements et de transports internationaux rendus impossibles, toutes les solutions se trouvaient en France. Notre message devenait beaucoup plus clair, mettant en avant l’esthétisme, le confort, la durabilité et l’écoresponsabilité. La proximité nous permettait de mieux contrôler la qualité et même de l’améliorer. Cela nous a aussi permis de trouver des partenaires pour lesquels il était naturel de faire de la qualité, de finir les produits de la meilleure façon qui soit. La donne changeait, cette sécurité du travail bien fait nous a permis de nous dégager du contrôle qualité pour nous concentrer davantage avec nos partenaires sur la réalisation du meilleur produit. Je n’aurais pas pu gérer cette société de cette manière si j’étais resté en Chine. Je sais que jusqu’à présent le monde fonctionnait autour de l’Asie, mais on voit que d’autres choses sont possibles. C’est une belle occasion d’allier à ce moment clé une volonté de fabriquer en France autour de valeurs et d’un engagement. Je pense que c’est le bon moment, porté en outre par l’appétence du public pour le made in France et ses impacts en termes d’environnement et d’emplois.

Qu’avez-vous trouvé ici et que vous manque-t-il ?

Avec mes trois associés dans l’entreprise Sollen, Muriel Nicolas, Frédéric Devige et Gaël Tauvel, nous avons très rapidement réussi à embarquer à nos côtés des partenaires designers à Bordeaux, d’une efficacité et d’une compétence qui m’ont impressionné. Nous partagions une vision de l’élégance, ça a d’emblée été fluide. La proximité, c’est aussi celle des valeurs et des notions d’esthétisme. La vraie difficulté a été de trouver des fabricants qui disposent des compétences techniques et qui acceptent de fabriquer des petites qualités. En Asie, il est très simple de faire réaliser un prototype, et beaucoup moins cher. Quand on travaille en Chine, on s’adresse à une société qui réalise le produit fini en faisant travailler les sous-traitants nécessaires. En France, j’ai eu affaire à des experts du bois, de l’assemblage, de la tapisserie… Chacun est très bon dans ce qu’il fait, mais il ne fait que ça. Je l’ai vraiment découvert, je ne pensais pas que ce serait aussi fragmenté. Mais deux sociétés de la région ont été touchées par notre projet, notamment pour notre modèle phare, le fauteuil Nuage : Lécuiller, basée à Tonnay-Boutonne (Charente-Maritime) pour le bois thermoformé et Bastiat, basée à Hagetmau (Landes) pour la mousse, le tissu et le montage. Finalement, tout a été très vite depuis l’enregistrement de la société en mars 2021. Les premières ventes sont intervenues fin décembre. Nous tablons sur 300 ventes par an.

Le fait de fabriquer en France doit-il vous permettre de vous rapprocher des bons marchés ?

Repositionné aussi en BtoC, notre segment est celui du premium, pas celui du luxe. Nous souhaiterions même proposer nos produits moins chers, mais on ne le peut pas. Pour faire ce produit, dans le respect de l’environnement, avec les bons matériaux, les bons fabricants, on est sur ce niveau de prix. Le made in France, c’est notre objectif, on le découvre, on apprend ce que cela induit. Ce projet peut paraître fou quand on connaît la réalité de la Chine. Mais ce que je découvre au-delà des difficultés de toute aventure entrepreneuriale, ce qui me plaît, c’est qu’ici, énormément de gens sont pleins d’ambitions, de vitalité et riches de vraies compétences. Cela nous permet d’afficher des ambitions européennes pour 2023, sur les marchés anglais, allemands et des pays nordiques, friands de produits originaux. D’ores et déjà des Québécois veulent présenter nos fauteuils dans leurs magasins. En France, dès cet été, nous souhaitons ouvrir des showrooms en centre-ville de Bordeaux, à Paris, Lyon, voire à Marseille.

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