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Skytech parie sur son usine normande pour augmenter sa production de plastiques recyclés
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Skytech parie sur son usine normande pour augmenter sa production de plastiques recyclés

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Producteur de plastiques recyclés, Skytech a choisi d’installer son nouveau siège social et son usine au Val d’Hazey, dans l’Eure. Avec un investissement de 17 millions d’euros, la PME ambitionne de produire plus de 50 000 tonnes de plastiques recyclés par an dès 2024.

Skytech a breveté un procédé innovant permettant de séparer toute une gamme de polymères durs et complexes présents dans de nombreux objets du quotidien — Photo : Sébastien Colle

Face à une demande en forte augmentation sur le marché des plastiques recyclés, le spécialiste du recyclage des plastiques durs et complexes Skytech (4 M€ de chiffre d'affaires 2021) a choisi de quitter son site historique de Bonnières-sur-Seine, dans les Yvelines, pour s’installer dans l’Eure. Objectif : multiplier par cinq une production qui ne pouvait pas dépasser les 10 000 tonnes par an sur le précédent site. "Grâce à cette nouvelle infrastructure, nous allons être en mesure de produire plus de 50 000 tonnes de plastiques recyclés (ABS, polystyrène, polypropylène, NDLR) chaque année à partir de 2024", se félicite Christophe Lamboeuf, directeur général de Skytech.

Un site réindustrialisé

Après avoir étudié plusieurs possibilités, les dirigeants de la PME ont rapidement porté leur choix sur l’ancien site industriel du fabricant de câbles Dakra Praticable, fermé en 2014. Un terrain de 42 000 m2 situé au Val d’Hazey et qui offre à Skytech de grands hangars pour installer ses longues lignes de productions et ses larges zones de stockage. Avec, au total, un investissement de 17 millions d’euros pour remettre en état le site et le transformer aux besoins de l’activité de recyclage des plastiques.

Le financement est assuré par le fonds d’investissement Xerys, actionnaire principal de Skytech, avec le soutien de Bpifrance et de la Communauté d’agglomération Seine-Eure. L'installation en Normandie a permis à Skytech de recruter fortement depuis l’acquisition du site en 2021, faisant passer son effectif de 40 à Bonnières-sur-Seine à 106 sur le site du Val d’Hazey, avec un démarrage de la production au second trimestre 2022 et des recrutements essentiellement locaux.

Un procédé innovant

Après près de dix ans de R & D, Skytech a réussi à breveter un procédé innovant permettant de séparer toute une gamme de polymères durs et complexes présents dans de nombreux objets du quotidien comme les pare-chocs, les coques d’aspirateurs, les machines à café, les jouets, ou encore les boîtiers télécom. Ces plastiques (ABS, polystyrène, polypropylène) sont différents du polyéthylène téréphtalate (PET), utilisé dans la fabrication des bouteilles en plastique, leurs contraintes en matière de séparation et de recyclage étant différentes. "Sans séparation efficace de ces plastiques, il est impossible de proposer aux industriels une qualité de produits recyclés suffisante leur permettant de se passer du plastique vierge issu du pétrole. Avec notre procédé, nous pouvons fournir au marché des résines recyclées qui ont des caractéristiques équivalentes aux résines vierges", souligne Christophe Lamboeuf.

Le procédé de Skytech pour arriver à faire ce tri consiste en trois phases avec un prétraitement, un tri par triboélectricité (moment de la séparation par dispositif électrostatique) et, enfin, une granulation premium. "Les techniques classiques de séparation ne proposent pas un tri assez fin. Notre technologie Triblast, qui fait l’objet de quatre dépôts de brevets, permet d’optimiser le tri industriel pour obtenir une séparation efficace des polymères reçus en mélange. Skytech se différencie ainsi en obtenant des taux de pureté de l’ordre de 99 % en sortie de tri", explique le directeur général.

L'industriel régénère ensuite à façon ces plastiques pour les transformer en matières premières et leur redonner des propriétés spécifiques pour répondre aux cahiers des charges de ses clients industriels. Des plastiques régénérés proposés aux plasturgistes et distributeurs de matières plastiques et qui intègrent les processus de fabrication du secteur automobile (pare-chocs, rétroviseurs, tableaux de bord), de l’industrie des appareils électroménagers (aspirateurs, machine à café, robots de cuisine…), l’industrie du luxe et du design (emballages et produits), ou encore le secteur de la construction et du bâtiment (plomberie, menuiserie).

Une production vertueuse

"L’un des avantages notables de notre processus de recyclage est qu’il a un faible impact sur l’environnement en comparaison de celui qui est utilisé pour fabriquer du plastique vierge", assure Pierre Sommen, directeur séparation et approvisionnement de Skytech. Ainsi, le processus de pré-traitement qui précède l’étape de séparation par triboélectricité consomme peu d’eau, et celle-ci est ensuite recyclée pour purification afin d’être réutilisée. De son côté, le procédé de triboélectricité consomme peu de puissance électrique pour générer la haute tension nécessaire à la séparation. "Nous émettons dix fois moins de gaz à effet de serre que les fabricants de plastique vierge. De plus, nous travaillons avec de nombreuses entreprises françaises", assure le directeur.

Lauréat de l’appel à projet du plan France Relance dans la catégorie "secteurs stratégiques" pour un montant de 1,5 million d'euros, le procédé de Skytech permet de prolonger le cycle de vie du plastique, en évitant 95 % des émissions de CO2. Ainsi, selon Skytech, une tonne de plastique recyclé permet d’économiser deux tonnes de CO2, 13 MWh d’électricité et 5,2 m3 d’eau.

Un environnement favorable

Demande des consommateurs et du législateur pour intégrer davantage de matières recyclées dans les produits, hausse du prix des matières premières vierges avec les crises géopolitiques… Les conditions du développement de l’activité de Skytech semblent réunies pour Christophe Lamboeuf : "Nous avons énormément confiance en l’avenir et dans le développement de notre activité. Nous sommes dans un environnement dynamique favorable, avec une prise de conscience pour une consommation plus responsable".

Un environnement qui bénéficie aussi d’un début de régulation au niveau législatif avec la mise en place en 2022 de la loi anti-gaspillage et économie circulaire (Agec) : "Et nous attendons une réglementation européenne pour demander aux industriels d’incorporer au moins 30 % de plastiques recyclés dans leur production. Un objectif anticipé par les industriels de l’emballage qui sont déjà dans cette démarche d’au moins 30 % de plastiques recyclés", appuie le directeur général de Skytech.

Développement international et entrée en Bourse

L’implantation de Skytech dans l’Eure s’inscrit dans le cadre d’une stratégie plus vaste qui comprend un développement soutenu à l’international. Ainsi, dès 2023, l’entreprise va créer une première filiale en Italie, près de Milan, avec l’acquisition d’un site industriel qui commencera sa production dans l’année. Trois autres ouvertures de sites sont déjà prévues en Allemagne, Espagne et aux États-Unis. "Notre stratégie est d’aller vite pour prendre nos positions, en nous distinguant de la concurrence par la qualité de nos produits aussi techniques que des résines vierges. Notre ambition est très internationale, pour devenir un acteur majeur en Europe", assure Jérôme Leconte, président du conseil d’administration de Skytech.

Pour soutenir ses développements, l’entreprise table sur une opération d’entrée en Bourse, affirme Jérôme Leconte : "De manière minoritaire, au maximum 25 %, pour trouver du financement pour ce développement international. Mais, c’est un projet en attente à cause de la crise ukrainienne. Ce n’est pas le bon moment."

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