Éolien en mer : Incertitudes sur la filière industrielle normande

Éolien en mer : Incertitudes sur la filière industrielle normande

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Les difficultés d'Areva sur le terrain du nucléaire ont sonné le glas de ses ambitions dans l'éolien en mer. La question reste aujourd'hui de savoir qui reprendra le flambeau : Siemens, Alstom ou General Electric...
— Photo : Le Journal des Entreprises

Dans un paysage industriel en pleine recomposition, la filière de l'éolien en mer peine aujourd'hui à tenir les promesses d'hier. Plus de dix ans après les premiers travaux autour du Parc des deux Côtes qui devait s'implanter au large du Tréport (76), beaucoup reste encore à faire. L'annonce le 17 juin dernier de la fusion des activités offshore de l'Allemand Siemens et de l'Espagnol Gamesa a très certainement rebattu les cartes. Avec une première conséquence : la confirmation qu'Areva s'apprête à jeter l'éponge après avoir longtemps porté les espoirs d'une filière française, voire normande, dans ce domaine.




Areva veut se recentrer sur le nucléaire

Copropriétaires à parts égales de la société de projet Adwen, Areva et Gamesa n'ont eu d'autre choix pour permettre le rapprochement du groupe ibérique avec Siemens, que de finaliser un accord qui prévoit la sortie de l'un ou de l'autre de la structure commune. Les termes de l'accord prévoient en effet qu'Areva dispose d'une option de vente de sa participation à hauteur de 50 % dans Adwen, ainsi que d'une option d'achat pour la participation de Gamesa dans cette même coentreprise. Une option purement théorique puisque le groupe français, fragilisé sur le terrain du nucléaire, annonce depuis plusieurs mois déjà son intention de se recentrer sur son coeur de métier. Le communiqué de presse publié par Areva le 17 juin dans la foulée de celui de Gamesa et Siemens est, à ce sujet, on ne peut plus clair : l'option de rachat des parts de Gamesa n'y figure même pas ! Un choix assumé par le groupe dont un porte-parole, interrogé sur le sujet, se borne à répondre que « l'annonce est cohérente avec la stratégie du groupe ».




Trois mois pour trouver « un investisseur tiers »

Pour Areva, désormais, c'est une troisième option, également prévue dans l'accord, qui est privilégiée : le groupe nucléaire français dispose d'un délai de trois mois pour « céder 100 % des parts d'Adwen à un investisseur tiers qui remettrait une offre engageante plus attractive durant cette période ». Un tiers qui pourrait être General Electric, ou encore Alstom, à condition d'être mieux disant... À moins que Siemens ne décide de finalement se lancer dans la bataille. L'industriel développe des turbines concurrentes de celles d'Areva « mais pourrait avoir envie de développer son portefeuille technologique », estime-t-on au sein du groupe Areva, en faisant notamment main basse sur la turbine 8 MW que le groupe avait apporté dans la corbeille de la mariée à l'occasion de son union avec Gamesa au sein d'Adwen. Chez Siemens, on reconnaît qu'une offre a été transmise à Areva pour racheter ses parts au sein d'Adwen. La balle semble donc aujourd'hui donc dans le camp du géant du nucléaire. Quoi qu'il advienne d'ici au 17 septembre prochain, tous les acteurs normands concernés par les projets industriels d'Areva dans la région, et au Havre notamment, retiennent leur souffle. Afin de les rassurer, Areva souligne que « les engagements souscrits au titre des appels d'offres portant sur les installations éoliennes de production d'électricité en mer en France métropolitaine resteront portés par Adwen ». Reste à savoir qui « portera » Adwen !




Prochaine étape, l'enquête publique en 2017

L'enjeu est de taille, car depuis juin 2014 et l'attribution au consortium piloté par ENGIE (ex-GDF-Suez) du projet de parc au large de Dieppe-Le Tréport, le calendrier suit son cours. Il est même entré dans une nouvelle phase avec la clôture début juin de la période dite de « levée des risques » qui doit déboucher, si tout se passe comme prévu, par le dépôt en début d'année prochaine du dossier de demande d'autorisation d'exploitation. Ultime étape avant la conduite d'une enquête publique diligentée par L'État, qui doit se tenir en 2017.




« Pas d'évolution technique et économique du projet

» « Depuis deux ans nous avons réalisé des études sur site pour confirmer les hypothèses émises lors de l'appel d'offres », explique Christophe Leblanc, responsable de la concertation locale pour le compte d'ENGIE. « Et nos conclusions sont que l'on peut continuer le projet sans évolutions technique et économique », précisait-il encore quelques jours seulement avant les annonces d'Areva et de Gamesa. Autrement dit : « nous nous sommes engagés à installer soixante-deux éoliennes équipées de turbines 8 MW et nous devrons rester dans le cadre de l'offre que nous avons remise ». Recalé une première fois, le projet porté par ENGIE et ses partenaires industriels avait finalement été retenu par la ministre Ségolène Royal, grâce, en grande partie, à cette spécificité technologique majeure qui permettait d'installer moins d'éoliennes dans le périmètre retenu sans diminuer la capacité de production des installations.



Guillaume Ducable