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Coronavirus - Legallais : « Les crises, nous les avons toujours surmontées »
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Philippe Nantermoz dirigeant de Legallais Coronavirus - Legallais : « Les crises, nous les avons toujours surmontées »

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En croissance constante depuis plus de trente ans, Legallais, spécialiste de la distribution de quincaillerie (280 M€ de CA en 2019), a subi de plein fouet la crise sanitaire comme beaucoup d’entreprises. Si l’entreprise normande, qui emploie habituellement 1000 salariés, n’a jamais fermé ses portes pendant le confinement, elle a fonctionné avec un effectif réduit. Le dirigeant Philippe Nantermoz se prépare déjà pour l’après et entend relever le défi de la crise économique qui s’annonce.

Philippe Nantermoz: "La fin du confinement sera le début de la crise économique. Ses effets vont se faire ressentir jusqu’en 2021."
— Photo : © Maryvonne Desdoits

La France se prépare à sortir progressivement du confinement à compter du 11 mai. Qu’est-ce que cela signifie pour Legallais ?

Philippe Nantermoz : Nous avons une date précise, on reparle aujourd’hui du futur : nous repartons dans la conquête, en mode projet, faisons des plans pour aller chercher de nouveaux clients… Notre première action, en tant que vendeur d’équipements de protection individuelle, va être de fournir des masques, des lingettes, ou encore des visières pour que nos clients puissent retravailler en toute sécurité dès le 11 mai. Nos fournisseurs habituels ne répondent plus, accaparés par les demandes des gouvernements. Nous avons réussi à commander plus d’un million de masques jetables depuis l’étranger. À présent, nous devons convaincre nos clients d’utiliser des masques lavables et réutilisables fabriqués en France.

Quel est l’impact de la crise sur l’activité de l’entreprise ?

Philippe Nantermoz : « Nous sommes restés ouverts mais avec un effectif réduit. Quand nous avons vu fin janvier ce qu’il se passait en Chine, nous avons anticipé et activé le plan télétravail, et petit à petit, mis les salariés en congés puis en chômage technique. En moyenne, une centaine de salariés sont restés travailler dans les entrepôts contre un peu plus de 200 en temps normal. Nous avons subi une très forte baisse des ventes. Legallais affiche un taux de croissance constant de 10 % chaque année. Mi-mars, nous étions à + 11 % en cumul depuis le début de l’année et on s’est retrouvé en négatif à la fin mars. Nous n’avions pas connu de chiffre négatif depuis 35 ans ! Nous ne faisons aujourd’hui qu’un peu plus de 30 % de notre chiffre d’affaires.

Pensez-vous pouvoir rattraper cette perte ?

Philippe Nantermoz : A priori non. Même pendant la crise de 2013, Legallais avait ralenti sans jamais être en décroissance. Lorsque nous avons construit notre budget 2020, nous avions tablé sur une croissance de 7 à 8 % en inscrivant les effectifs qui allaient avec, soit une trentaine de personnes déjà embauchées en début d’année. La difficulté dans notre métier est que les charges fixes restent très importantes : nous louons une trentaine d’immeubles (agences commerciales, bureaux), et nos 500 véhicules sont à l’arrêt. Malheureusement, les loyers continuent de tourner !

Je pense que le mois de juin sera un bon indicateur car c’est une période très dense pour l’activité du bâtiment. Mais la question est quid de l’après ? La reprise sera-t-elle en U, en V en W ? Il ne faut pas s’imaginer que la sortie du confinement sera synonyme d’une reprise normale. La fin du confinement sera le début de la crise économique. Ses effets vont se faire ressentir jusqu’en 2021.

Comment avez-vous vécu cette période de confinement ?

Philippe Nantermoz : Les 15 premiers jours, je les ai passés avec mon équipe de direction à assurer le fonctionnement du quotidien et la résilience de l’entreprise. Le choc a été très violent. C’est un stress au quotidien, avec de nouveaux problèmes qui apparaissent toutes les heures et des dossiers inhabituels à gérer. On s’est mis à faire des crash tests avec des hypothèses où l’entreprise tomberait à - 10 % du chiffre d’affaires, - 20 %…. C’était une période très particulière.

Vous employez un millier de salariés. Comment avez-vous gardé le lien avec vos équipes ?

Philippe Nantermoz : La communication est très importante chez Legallais. Avec 1 000 salariés dispersés partout en France, il n’est pas possible discuter tous les jours avec eux. C’est dur à vivre, notamment pour les personnes seules et la visio-conférence ne suffit pas toujours.

Chaque manager gère les relations avec ses salariés, via les réseaux sociaux notamment et nous en sommes à la 11e communication en direction de notre personnel depuis le démarrage de la crise. Une à deux fois par semaine, nous écrivons aux équipes pour les rassurer et les informer de l’organisation de l’entreprise. Legallais a déjà survécu à deux guerres mondiales et un dépôt de bilan en 1984 : les crises, nous les avons toujours surmontées ! Ce Covid-19, c’est le défi de notre génération…

Si l’entreprise normande n’a jamais fermé ses portes pendant le confinement, elle a fonctionné avec un effectif réduit. — Photo : © Maryvonne Desdoits
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