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Yann Orpin: « C’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour le réseau consulaire »
Interview Lille # Réseaux d'accompagnement

Yann Orpin: « C’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour le réseau consulaire »

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Comme ses collègues, le président de la CCI Grand Lille doit faire face à une baisse inattendue des dotations. Un tournant délicat à négocier.

— Photo : CCI Grand Lille

Le Journal des Entreprises : Le gouvernement a fait état d’une baisse de 17 % de la dotation des CCI pour l‘année 2018. Est-ce que vous aviez anticipé cette annonce?

Yann Orpin : Nous avions d’autant moins senti venir cette baisse que l’on nous avait assuré, à plusieurs reprises, que le budget resterait inchangé. Ca a donc été particulièrement brutal quand, en septembre-octobre, la nouvelle est tombée. Nous étions en train de boucler notre budget, en tablant sur une diminution de 0 à 1 %, facilement absorbable. Mais la baisse représente finalement 12 M€ en moins sur le budget des CCI régionales, qui s’élève à 67 M€ annuels. Encore une fois, ce n’est pas tant le chiffre qui me pose problème, mais la brutalité. Nous avons essayé d’obtenir un étalement sur 5 ans, ce qui aurait équivalu à une baisse de 3 % par an, plus facile à amortir… Mais c’est trop tard, la mesure a été votée, et on va devoir faire avec. On n’aura eu que deux mois pour se retourner.

Quelle stratégie avez-vous mise en place, en si peu de temps ?

Y.O. : Nous avons dû refaire tous nos budgets en catastrophe ! En même temps, les CCI sont dirigées par des entrepreneurs, on a tous déjà eu à gérer des baisses de chiffre d’affaires. Nous avons tout de suite essayé de déterminer les activités que nous pouvons suspendre, en fonction des attentes de notre clientèle. Les CCI doivent de toute façon se réinventer, et il y a des ajustements à faire pour mutualiser nos compétences et réduire nos coûts… à nous de nous saisir de cette opportunité, pour nous transformer. Je suis confiant sur la capacité des chambres à se réinventer, mais cette annonce a beaucoup déstabilisé nos équipes. La plupart sont marquées par le souvenir de la précédente baisse des subventions, de - 35 % en 2012, qui avait entraîné beaucoup de départs. Je comprends leur inquiétude, mais je suis sûr que nous allons réussir à déployer de nouveaux outils, pour rebondir.

Ne craignez-vous pas que ces baisses de dotation à répétition ne signent la fin du réseau consulaire ?

Y.O. : Elles annoncent sans aucun doute la fin du modèle ancien des CCI. Mais elles marquent aussi le début d’une nouvelle ère. Depuis le début de mon mandat, je maintiens que la CCI doit muter, c’est l’occasion d’accélérer le mouvement, même si je ne m’en réjouis pas. A nous de montrer notre valeur ajoutée, et de facturer nos services, jusqu’à présent gratuits. L’accompagnement que nous offrons aux entreprises, sur le territoire, n’a pas d’équivalent, ce qui nous autorise à facturer à des prix raisonnables, sans faire de concurrence déloyale à quiconque. Et les grands défis qui s’annoncent vont nous rendre encore plus indispensables : dans les prochaines années, 50 000 entreprises régionales vont devoir être transmises, nous sommes les mieux placés pour accompagner ces mouvements. De la même façon, nos entreprises sont encore très peu digitalisées, à nous de les aider à franchir le pas. En rationalisant les coûts au sein du réseau, et en trouvant de nouvelles recettes, on peut regagner les 12 M€ manquants, et même plus. C’est un vrai changement de paradigme qui est en train de s’effectuer.

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