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Le groupe Auchan affiche une perte d’un milliard d’euros
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Le groupe Auchan affiche une perte d’un milliard d’euros

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Sur son exercice 2018, Auchan Holding affiche une perte de l'ordre d'1 milliard d'euros, liée aux difficultés de son activité de distribution. Edgard Bonte, le nouveau dirigeant d'Auchan Retail et président du directoire d'Auchan Holding, a annoncé le 8 mars un plan de redressement conséquent. Les impacts sur le résultat sont attendus dès cette année.

Auchan Holding affiche une perte d'un peu plus d'un milliard d'euros en 2018. Ce résultat est plombé par l'activité distribution, en nette perte de vitesse — Photo : E.Soury-Lavergne, le JDE

2018 restera dans les annales du groupe Auchan comme une année bien noire, marquée par une perte nette d’1,145 milliard d’euros. Si les activités immobilières (Ceetrus) et bancaires (Oney Bank) du groupe se portent bien, son pôle distribution est en perte de vitesse. À tel point que l’actionnaire, l’Association Famille Mulliez (AFM) a pris la décision de ne pas demander à Auchan Holding de dividendes en 2019 au titre de l’exercice 2018...

Des résultats « insatisfaisants »

Le groupe nordiste termine l’année 2018 avec un chiffre d’affaires de 51 milliards d’euros, en baisse de 3,3 % par rapport à 2017, à change courant. « Le résultat net est lourdement impacté par des dépréciations d’actifs en France, en Italie et en Russie, qui auraient dû être réalisées progressivement ces dernières années », justifie Edgard Bonte, président d’Auchan Retail et également président du directoire d’Auchan Holding. Sans ces dépréciations, le résultat net s’élèverait à 170 M€, ce qui représente tout de même une baisse de 75 % par rapport à 2017. L’Ebitda est quant à lui en baisse de 15,8 %, à 1,9 Md€. Le mouvement des Gilets jaunes durant la période des fêtes aurait eu un impact négatif de 140 M€ sur le chiffre d'affaires et de 35 M€ sur l'Ebitda. « Ces résultats sont insatisfaisants au global, c’est la raison pour laquelle je suis là », reconnaît le dirigeant.

Arrivé à la tête du groupe en octobre 2018, Edgard Bonte est présenté comme l’homme de la situation. Il faut dire qu’il a déjà à son actif le redressement de l’enseigne nordiste de prêt-à-porter Kiabi. Il a pris la place de Régis Degelcke, qui n’était en poste que depuis dix-huit mois. Pour remédier à cette perte de vitesse, en France, comme à l'international, le nouveau dirigeant annonce donc « un redressement à court terme, avec des arbitrages lourds et des renoncements. »

Un plan de redressement drastique

Pour parvenir à ses fins, Edgard Bonte envisage de nombreuses mesures, dont une réduction importante des investissements. « Depuis une dizaine d’années, le groupe a eu une politique d’investissements constants et trop saupoudrés pour être efficaces », pointe-t-il du doigt. Ceux-ci vont donc être réduits, « de près de moitié. Cela va représenter plusieurs centaines de millions d’euros d’économies en année pleine. »

« La France ne sera pas concernée en 2019 par des réductions d’effectifs ou des fermetures d’hypermarchés. »

Par ailleurs, les magasins qui ne fonctionnent pas vont être identifiés et « redressés » voire « réformés », selon les termes employés par le dirigeant. Des fermetures sont d’ores et déjà planifiées pour l’année en cours : « une trentaine en Russie et trois en Chine », détaille Edgard Bonte, avant de préciser que « la France ne sera pas concernée par des réductions d’effectifs ou des fermetures d’hypermarchés cette année ». En 2018, Auchan Retail a déjà fermé 23 magasins déficitaires en Italie et 11 en Russie.

Vers un nouveau modèle

Le géant de la grande distribution est à la recherche d’un nouveau modèle. Il veut d’abord redorer son image sur l’alimentaire (80 % du CA d’Auchan Retail), ce qui passera par davantage de bio, de circuits courts et l'installation de cuisines ouvertes au cœur des magasins (cours de cuisine, activité traiteur). « Nous avons perdu des parts de marché en France (qui représente 35 % du CA d’Auchan Retail, NDLR) mais ce n’est pas une fatalité, nous avons la puissance nécessaire pour les récupérer rapidement », affirme Edgard Bonte.

Cela passera également par des changements significatifs concernant l'activité distribution, avec un renforcement du multicanal ou encore la transformation de ses hypermarchés en plateformes : « Ils seront à la fois des magasins et des zones de stockage, capables de livrer nos différents points de contact », indique le dirigeant. Il envisage de concéder, pour ses hypermarchés, la gestion du non-alimentaire à des enseignes spécialisées, telle que Boulanger pour l’électroménager, sous un modèle qui reste à définir. Une telle pratique a déjà lieu en Chine, avec un système de commission sur les ventes.

Enfin, Auchan Holding va tester, durant le premier semestre 2019 et dans cinq magasins, un partenariat sur la livraison mené avec d’autres enseignes de la sphère Mulliez : Norauto, Boulanger, Leroy Merlin, Decathlon et Kiabi. Il s’agira de mettre en commun les livraisons jours J et J+1 afin de les rentabiliser. Ces enseignes vont également enrichir mutuellement leurs bases de données clients : « Ensemble, nous touchons 100 % des foyers français, c’est un avantage énorme par rapport à la concurrence », souligne Edgard Bonte, qui nourrit un objectif : « l'amélioration significative du résultat dès 2019 ».

Les activités bancaires et immobilières en croissance

Les deux autres métiers d’Auchan Holding, à savoir l’immobilier réalisé avec sa filiale Ceetrus (ex-Immochan) et le financement, avec Oney Bank, se portent bien. Les résultats 2018 du groupe ont été plombés par le seul recul de l’activité de distribution. Ceetrus a réalisé « une année 2018 exceptionnelle », selon son directeur général Benoît Lheureux, avec des revenus de 567 M€, soit une croissance de 10,6 % à changes constants. Son Ebitda progresse de 9,6 % et elle a investi l’an dernier 1,12 Md€ pour agrandir son patrimoine. Deux acquisitions sont notamment à souligner : une portant sur 120 000 m² au Portugal (2 centres et 1 retail park), qui a permis de multiplier par 3,5 les revenus dans ce pays. Et une autre de 47 000 m² au Luxembourg, sur des actifs destinés à devenir des bureaux. Enfin, Ceetrus affiche de beaux projets comme la métamorphose de la Gare du Nord à l’horizon 2024.

De son côté, Oney Bank a réalisé « une belle performance commerciale en 2018 », souligne Jean-Pierre Viboud, son directeur général. Son produit net bancaire a enregistré une croissance de 3,8 %, pour s’établir à près de 432 M€. Son résultat net fait un bond de 38 % entre 2017 et 2018, et atteint les 53 M€. 2019 sera une année de transition pour la filiale, dont une participation de 50,1 % doit être cédée durant le deuxième semestre au groupe BPCE. L’objectif d’Auchan Holding est de permettre à Oney Bank de s’appuyer sur un grand groupe bancaire pour exploiter pleinement son potentiel.

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