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Tropical Parc fait du transfert technologique depuis la Chine
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Tropical Parc fait du transfert technologique depuis la Chine

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En transformant en 1988 sa porcherie en difficulté en parc floral et animalier, Michel Gicquel a donné naissance à l'un des plus étonnants établissements du genre en France : Tropical Parc (100 000 visiteurs par an). Erven, l'un de ses fils, est parti en quête de pagodes traditionnelles en Chine. Il livre son expérience de l'Asie, qu'il parcourt depuis l'enfance.

— Photo : DR Erven Gicquel

Le parc animalier et jardin exotique Tropical Parc, à Saint-Jacut-les-Pins, aime étonner. Depuis sa création en 1988 par Michel Gicquel, un ancien éleveur touché de plein fouet par la crise porcine, l’entreprise familiale a rencontré un succès aussi rapide qu’insolite avec sa transformation d’élevage porcin en parc floral. Pas moins de 15 000 curieux se pressent dès la première année. Deux décennies plus tard, l’agriculteur, botaniste, collectionneur invétéré, conquiert 100 000 visiteurs annuels, entraînant dans l’aventure ses fils Gwendal et Erven, aujourd’hui cogérants.

Jardin thaïlandais, indonésien, mexicain, parc du jurassique, spectacle de perroquets en vol… Tropical Parc s’est étoffé au fil du temps et s’étend désormais sur 4 hectares. La PME emploie six personnes et deux saisonniers et réalise 800 000 € de chiffre d’affaires. « Les entrées représentent 78 % du CA. Ce sont les produits dérivés qui assurent notre marge », résume Erven Gicquel. Car les investissements, clef du succès, sont conséquents et constants.

Maxime Martel, le charpentier-menuisier breton sur le toit d'une pagode en Chine — Photo : DR Erven Gicquel

Transfert technologique inversé

Dernier challenge en date : la création d’un jardin chinois sur un hectare (300 000 € dont 120 000 € de bâtis). Si l’ouverture est prévue d’ici l’été 2019, le projet est en gestation depuis cinq ans déjà, nécessitant de nombreux prospects et voyages en Chine. La démarche, là encore, détonne : « Nous avons fait du transfert technologique dans le sens inverse. Je suis parti en quête de pagodes et d’un chemin couvert traditionnels. J’ai fini par frapper à la porte du gouvernement chinois au bureau des paysages. Il a sorti l’artillerie lourde et nous demandant 3 millions d'euros avec des investisseurs prêts à prendre des parts dans l’entreprise, nous, avec nos 800 000 € de chiffre d’affaires… L’idée les séduisait aussi car la France est l’un des derniers pays d’Europe à ne pas avoir son grand jardin chinois. »

Erven ne se démonte pas et met le cap sur la province du Zheijiang, au sud de Shanghai. Un contact via des amis le met en effet sur la piste d’une scierie dans un coin qui le réconcilie avec le pays. Chine authentique et produit atypique à la clef : « C’était la première fois que des étrangers s’intéressaient au savoir-faire de cette scierie. Nous avons été remarquablement bien accueillis et avons conclu pour 120 000 euros de matière première avec une exigence : pouvoir numéroter les pièces de quatre pagodes, apprendre à monter les structures… et les démonter pour les importer par container.  » Plus de 100 mètres cubes, tout en kit.

Erven Gicquel... à Saint-Jacut-les-Pins — Photo : Xavier Eveillé

Une expertise en Asie

Le dernier voyage remonte au mois d’avril. Erven part avec Maxime Martel, un charpentier proche de la famille. Il affectionne les missions, elles aussi exotiques : saisonnier dans les Alpes l’hiver, le Redonnais a reconstruit des écoles à Haïti, fabriqué des refuges pour éléphants, des villas à Saint-Barth… Les colis sont attendus début juillet à Saint-Jacut. D’ici là, les équipes s’activent autour de Michel Gicquel à la préparation de l’étang, des empierrements et du chemin couvert. « On prévoit de construire les pagodes cet été. Ce sera l’occasion pour les visiteurs de découvrir le chantier tout en visitant le parc. »

Au-delà de cette nouvelle étape clef du parc, la famille Gicquel a développé au fil des années une véritable expertise dans la recherche de sculptures, d’objets et d’espèces végétales exotiques, en particulier en Asie et en Amérique du Sud. « Nous partions en Asie pendant les vacances de février, comme d’autres allaient à la montagne. On ratait aussi les dernières semaines d’école fin juin pour parcourir les routes de Thaïlande ou du Vietnam, évoque Erven. La famille a constitué un véritable réseau avec des importateurs agréés. On est restés proches d’une trentaine de familles. Paradoxalement, les délais sont aujourd’hui plus longs. On pouvait mettre trois mois, à peine, pour faire venir des pièces ou des copies il y a dix ou vingt ans. Aujourd’hui, c’est plutôt cinq à six mois. »

En cause : l’industrialisation et la concentration de l’activité dans les grandes métropoles. La disparition de l’artisanat local entraîne celle de tout l’écosystème associé. « Cela devient compliqué de trouver des transporteurs dans les campagnes. La raréfaction des circuits courts oblige à passer par des intermédiations souvent saturées. »

Erven Gicquel enfonce le clou quant à la transformation de la société chinoise en prenant l'exemple des constructeurs français et de leurs sous-traitants « qui ont raté le marché chinois pensant imposer leurs petits modèles, alors que la classe moyenne est passée directement aux berlines et aux 4x4. » Les acteurs du tourisme ne doivent pas sous-estimer les potentialités : « Cette même classe moyenne chinoise est, en ce moment, massivement en quête de résidences secondaires. »

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