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"La peur de l'échec devient une affaire générationnelle en France"
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"La peur de l'échec devient une affaire générationnelle en France"

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Amanda Grey forme salariés et dirigeants à l'anglais opérationnel. Egalement traductrice technique pour l'automobile, les métiers de l'environnement et les biotechs, l'Irlandaise installée près de Lorient livre sa vision du monde de l'entreprise en France. Pour elle, le principal frein est psychologique : "le renforcement négatif" reste présent, même s'il tend à devenir une affaire de génération.

Amanda Grey, dirigeante d'une PME de 5 salariées spécialisée dans la formation continue en anglais opérationnel. Elle est également traductrice technique — Photo : X.E.

Son credo ? L’immersion. Linguistique et économique. Et ce, depuis le début de sa carrière. Amanda Grey a quitté son Irlande natale à 21 ans, à la sortie de l’université, maîtrise de traduction technique en poche. « C’était à la fin des années 80, à une époque où la fonction était déjà beaucoup externalisée. » La jeune femme blonde travaille dans une PME à Orléans, part un an en Turquie comme vacataire à l'Université d'Istanbul, puis revient en France en 1998. Déjà, elle sent de plus en plus les limites du modèle salarial classique. La création d’entreprise lui trotte dans la tête. L’idée prend toute son importance après un grave accident de cheval qui lui laisse un an pour mûrir son projet : « J’ai démarré en profession libérale avant de venir en Bretagne, en 2006. J’y ai créé mon entreprise à Caudan. Je suis également spécialisée dans la traduction technique pour l’automobile, les métiers de l’environnement et, de plus en plus, pour les biotechs.»

Au sein de la PME, une équipe de cinq femmes cosmopolites originaires du Royaume-Uni, d'Australie et des États-Unis assure des formations aussi pragmatiques et opérationnelles que détendues. Le public ? Personnes en recherche d'emploi, employés, cadres, dirigeants... et ce, de la PME à l'établissement industriel de 300 salariés.

Prime au développement personnel

Amanda Grey y défend une approche non scolaire des apprentissages : « Ce qui m’a le plus surprise en France, c’est cette peur de la sanction ! Et dans les langues, c’est criant. Ce n’est pas grave de faire des fautes, l’important consiste à pouvoir tenir une conversation sur un salon à Stuttgart ou face à un transporteur livreur bulgare », résume-t-elle. Amanda Grey appelle cette peur de l’échec et de la sanction « le renforcement négatif ». Et c’est pour elle LE mal français par excellence.

L’Irlandaise note toutefois avec satisfaction une évolution sensible depuis quelques années : « La peur de l’échec devient une question de génération. Son regard sur l’évolution du monde économique en France ? « Les personnes que nous recevons en formation sont de plus en plus sensibles aux soft-skills [développement personnel et émotionnel, NDLR]. C’est quelque chose qui est arrivé en force, qui rentre dans les mœurs.»

Destin collectif

Amanda Grey suit l'évolution des deux pays avec intérêt : les Irlandais sont naturellement moins cartésiens, plus dans la créativité. Mais si ce frein psychologique est moins prégnant là-bas, gare aux excès... « L'économie irlandaise est plus cyclique, extrême. Après l'euphorie et la forte récession qui en a suivi, l'heure est à davantage de mesure... Comme si les Irlandais prenaient conscience de leur destin collectif après des années à acheter à tout va. » En ce sens, l'Irlandaise se sent résolument Européenne et déplore le Brexit : « Plus on s'éloigne de la Seconde guerre mondiale et plus grand devient le risque d'oublier pourquoi on a fait l'Europe. »

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