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Josso vise l’autonomie énergétique pour conforter sa croissance
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Josso vise l’autonomie énergétique pour conforter sa croissance

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Josso ne va pas manquer de jus. Afin d’assurer un approvisionnement optimal en électricité et pérenniser l’essor de ses activités, l’entreprise spécialisée dans l’exploitation du bois et la fabrication de palettes souhaite assurer sa propre production. Ses nouveaux dirigeants, Saïd Bakhtous et David Manceau entendent développer une centrale en cogénération biomasse à l’horizon 2025.

David Manceau et Saïd Bakhtous, dirigeants de Josso — Photo : Bertrand Tardiveau

Acteur majeur de la filière bois en Bretagne, Josso veut devenir autonome sur le plan énergétique. Pour cela, la PME morbihannaise ambitionne de se doter de ses propres moyens de production d’électricité en s’appuyant sur son cœur d’activité. Exploitant des forêts et transformant du bois en palettes, l’entreprise de 100 salariés mise sur le bois pour alimenter une centrale en cogénération biomasse. Pour actionner la turbine destinée à produire de l’électricité, la chaudière sera alimentée par des chutes de bois et des écorces. Elle pourrait entrer en service en 2025 sur une parcelle du site de 18 hectares au Roc Saint-André dans la commune du Val d'Oust où Josso s'est implanté en 1995. Pour l’heure, les équipes de Josso viennent d’engager une étude de faisabilité avec l’Ademe.

Un million d'euros de facture d'électricité

Pour Josso, l’objectif est simple : "Il s’agit d’atteindre l’autonomie énergétique en déployant une puissance installée d’au moins 2,8 mégawatts. L'outil pourrait être complétée par une centrale photovoltaïque établie sur un hectare de terrain," détaillent ses dirigeants, Saïd Bakhtous et David Manceau qui envisagent de travailler de concert avec les entreprises et les collectivités voisines.

Le projet se chiffre entre 10 et 15 millions d’euros. Un investissement colossal pour une PME qui clos son exercice 2022 avec 22 millions d’euros de chiffre d’affaires et 800 000 euros de résultat net.

Mais c’est un effort indispensable pour l’un des principaux producteurs de bois et de palettes dans le grand Ouest que la crise énergétique frappe durement. "Notre facture d’électricité est passée entre 2021 et 2022 de 350 000 à 600 000 euros. Et elle devrait probablement atteindre le million d’euros cette année. Sachant qu’en plus nous utilisons du gasoil pour faire fonctionner nos engins et du gaz pour notre système de séchage des palettes."

Si la montée en flèche des prix de l’énergie préoccupe les dirigeants de Josso, elle n’entrave pas les perspectives de croissance de l’entreprise. Saïd Bakhtous et David Manceau prévoient d’atteindre un chiffre d’affaires de 25 millions d’euros en 2023 et de 30 millions d’euros en 2025. Cette ambition s'appuie sur les trois grands domaines d'activité de l'entreprise.

Sur son premier métier, l’exploitation forestière, Josso traite avec l’Office national des forêts (ONF) mais aussi des propriétaires particuliers afin de procéder à l’achat et l’abattage d’arbres, avant le débardage puis la récolte de grumes et de billons de bois dans tout l’ouest de la France. Les variétés ciblées sont exclusivement composées de résineux, comme des pins ou des épicéas.

Valoriser les connexes

La Société d’exploitation forestière d’Argoat (Sefa), une filiale à 100 % de Josso, assure la moitié des apports en bois de l'entreprise qui sont évalués à environ 200 000 m3 chaque année. "Sur ce volume, nous en stockons 40 000 m3 afin d’anticiper d’éventuelles difficultés d’approvisionnement, tandis que 160 000 m3 passent directement en scierie, notre seconde spécialité," souligne Saïd Bakhtous.

A partir de cette matière première, Josso retire environ 80 000 m3 de planches pour fabriquer des palettes. Ce niveau de rendement matière est obtenu grâce à une ligne automatisée installée en 2014 pour un investissement de près de 15 millions d’euros, qui permet un calibrage informatisé et une découpe optimisée des rondins de bois avec des scies circulaires.

"Les 80 000 m3 de bois restants, les connexes que nous générons ne sont pas perdus : sciures, copeaux, écorces et plaquettes sont commercialisés pour représenter jusqu’à 15 % de notre chiffre d’affaires," explique David Manceau. Parmi les débouchés sur ce segment, la fabrication de pellets de chauffage (granules de bois), mais aussi la transformation du bois dont un important voisin et client, Silvadec, en fait une matière première pour la composition de lames de bois composites. "Nous allons nous appuyer sur les chutes de bois de notre scierie, à hauteur de 20 000 à 30 000 tonnes par an, pour alimenter notre future chaudière," indique Saïd Bakhtous.

Les planches issues de la scierie sont assemblées pour former des palettes en bois. Une activité traditionnelle, mais promise à un bel avenir, selon les dirigeants de la PME morbihannaise. "Au moins 95 % des marchandises mondiales transitent aujourd'hui par palettes," fait valoir David Manceau. Assurant 85 % de l'activité de l'entreprise, la fabrication de palettes continue ainsi de monter en puissance, même si une partie des planches issues de la scierie - environ un tiers de la production – est vendue principalement à des établissements spécialisés d’aide par le travail (Esat) qui assurent eux mêmes la fabrication des palettes. Aujourd'hui située à 1,5 million d'unités chaque année, cette production devrait s'élever de 30 % pour arriver à 2 millions en 2025.

Des palettes plus compétitives

"Même si on observe une meilleure valorisation de nos produits depuis deux ans, nous cherchons constamment à gagner en compétitivité, à réaliser des économies d'échelle car les marges sont relativement faibles sur la palette dont le coût unitaire peut varier de 6 à 40 euros," expliquent les dirigeants de Josso qui projettent d’investir dans une troisième ligne de production à l’horizon 2025. L’équipement sera spécifiquement calibré selon les standards des palettes renforcées destinées au secteur du bâtiment. Soit environ le tiers des marchés que Josso adresse. Proposant près de 300 références à son catalogue, l'entreprise alimente aussi le secteur de l'agroalimentaire dans des proportions similaires, mais aussi des acteurs de la chimie et de l'emballage. "Nos clients sont essentiellement situés en France mais leurs activités imposent qu'environ 40 % de nos palettes reçoivent un traitement thermique afin d'obtenir une conformité de type NIMP15, sésame en matière phytosanitaire pour pénétrer un trafic conteneurisé en plein essor et franchir les continents par voie maritime," fait valoir Saïd Bakhtous.

"Nous allons gagner beaucoup de temps dans le réglage de nos machines", anticipe David Manceau, qui a déjà finalisé cette année un investissement dans son outil productif. Mise en service au printemps 2022, la nouvelle ligne automatisée de cloutage et de montage de palettes commence à atteindre sa vitesse de croisière. C’est un investissement de 2,5 millions d’euros qui commence enfin à porter ses fruits. "Avec notre fournisseur, l’entreprise espagnole Cape, nous avions déjà déployé une première ligne en 2007. Celle-ci est plus compacte, davantage automatisée, c’est un vrai changement pour nos opérateurs qui peuvent ainsi monter en compétences et devenir conducteurs de ligne," reprend le directeur général de Josso. Résultat : là où auparavant, il fallait 7 tables d’assemblage et autant d’opérateurs pour faire à peine plus de 3 palettes chaque minute, une seule machine et 2 opérateurs peuvent réaliser jusqu’à 4 palettes chaque minute. "Même si nous pouvons faire encore un peu mieux, nous sommes bien montés en cadence," se félicite David Manceau.

Fiche entreprise

22 M€ de CA en 2022

Josso prévoit d'atteindre 25 millions d'euros en 2023 et 30 millions d'euros en 2025.

100 salariés

Une dizaine de recrutements sont en cours.

200 000 m3

C'est le volume de bois que Josso travaille chaque année.

ENCADRE

L'esprit de famille perdure chez Josso

Depuis un peu moins de deux ans, il n'y a plus de Josso à la tête de la SAS Josso. Aux commandes depuis 1987, Claudine Josso a en effet revendu l'entreprise fondée en 1910 à Malansac par ses aïeux. Nouveaux dirigeants de la PME morbihannaise, Saïd Bakhtous et David Manceau entendent bien pérenniser les valeurs familiales d'une entreprise séculaire. Avec leur holding BM Wood, ces anciens cadres ont racheté l'entreprise en avril 2021 à Claudine Josso : "Nous avons réuni 66 % des parts de l'entreprise, en nous adossant à Bpifrance et à Unexo (fonds d'investissement du Groupe Crédit Agricole, NDLR) qui ont pris chacun 17 % du capital," précise Saïd Bakhtous.

L'ancien directeur administratif et financier a participé à la forte progression de Josso, où il est arrivé comme simple comptable en 1990 : "L'entreprise comptait alors une vingtaine de salariés et 2 millions d'euros de chiffre d'affaires". Le dirigeant de 60 ans se voit un peu comme un fils adoptif, la cinquième génération aux commandes d'une société devant laquelle s'ouvre un avenir prometteur : "La forêt française grandit d'environ 80 000 hectares chaque année et nous ne consommons que la moitié de son accroissement biologique". De quoi perpétuer "l'esprit du bois", le slogan de la maison Josso. "Nous continuons d'investir pour développer l'expertise et la performance de nos activités", précise de son côté David Manceau, 50 ans, associé de Saïd Bakhtous, ancien directeur opérationnel, également pur produit de chez Josso où il a débarqué en 1998 comme responsable qualité.

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