
Depuis mi-octobre, conséquence du bras de fer américano-européen entre Boeing et Airbus, les vins français sont surtaxés à 25 % sur leur valeur à l'entrée aux États-Unis. Plus précisément, les vins dits « tranquilles », blancs, rouges ou rosés, de moins de 14 degrés. « Les vins à bulles ne sont pas concernés, précise Jean-Martin Dutour, viticulteur et président d’Interloire, l’interprofession des vins du Val de Loire. 20 % des vins de Loire partent à l’étranger et, parmi eux, 20 % vont aux États-Unis. Nous exportons surtout des vins blancs, vendus en direct ou via des négociants ou des coopératives. »
Une taxe aux conséquences incertaines
Malgré cette proportion relativement faible, le marché américain est intéressant pour les professionnels du vin : il est le premier en valeur dans le monde et la consommation y est croissante (12 litres par an et par habitant, contre 50 en France). « Cette consommation continue de baisser en France, d’environ 5 % par an, mais augmente dans les pays occidentaux, précise Jean-Martin Dutour. Cela devrait converger vers 25 à 30 litres partout. La taxe qui touche les vins français déstabilise le marché. Ce qui va être déterminant, c’est la place qui sera donnée à nos vins dans les rayons des magasins, puisqu’ils seront plus chers, en passant d’environ 20 dollars à près de 30 (18 à 27 euros, NDLR). Le risque est que les consommateurs américains se tournent vers d’autres vins non-taxés, chiliens ou australiens par exemple, ou vers d’autres boissons. »
« Il y a un réel décalage entre des politiques longues de développement à l’export, sur plusieurs années, et la rapidité d’un tweet qui déstabilise le marché... »
A contrario, cette taxe peut, peut-être, repositionner les vins français dans une gamme plus premium. Ils pourraient alors s’en sortir par le haut, sur le principe du « plus c’est cher, plus c’est bon ».
Mais rien n’est moins sûr, et les professionnels restent inquiets : « Il n’y a aucune visibilité, regrette Jean-Martin Dutour. Si c’est uniquement en vigueur deux à trois mois, chacun, du producteur jusqu’au magasin, pourra peut-être baisser un peu ses marges, mais cela ne pourra pas durer. Il y a actuellement des discussions pour trouver des solutions et on attend aussi que l’Europe s’implique. Quoi qu’il en soit, il y a un réel décalage entre des politiques longues de développement à l’export, où il faut plusieurs années pour développer sa clientèle, et la rapidité d’un tweet qui déstabilise le marché. »