La filière champignon n'a pas dit son dernier mot. Mi-février, Bonduelle a repris l'essentiel des actifs de l'industriel France Champignon, basé à Saumur (Maine-et-Loire) et placé en redressement judiciaire fin 2020. Le projet de reprise conserve 250 des 267 salariés. Son périmètre inclut le site de transformation de Doué-la-Fontaine (conserves et surgelés) et les bases de logistique et conditionnement de Montreuil-Bellay et Longué-Jumelles. Mais exclut le siège saumurois de Bagneux.
Une filiale de Bonduelle était déjà actionnaire majoritaire auparavant, aux côtés de coopératives de producteurs. Accepté par le tribunal de commerce, le dossier n'attend plus que la validation de l'Autorité de la concurrence.
Marché en baisse jusqu'à 2020
À l'origine du dépôt de bilan, une baisse de la demande de conserves en champignons de Paris, qui reste la grande spécialité du saumurois. Cette activité pèse 78% de l'activité, loin devant les surgelés (17%) et le frais (5%). " Depuis 15 ans, la consommation de champignons en conserve baisse de 2% à 3% par an en Europe", explique David Morange, directeur industriel de France Champignon. En outre, la concurrence avec les acteurs Hollandais, Polonais et Espagnols a entraîné "une baisse des prix de plus de 20% sur 10 ans selon les réseaux de distribution ", ajoute David Morange.
Effet Covid
L'horizon s'éclaircit cependant depuis la crise du Covid. "Les ventes se sont envolées avec le confinement. Parce qu'une conserve reste pratique et facile à stocker ", explique le directeur industriel.
Pour redresser la barre à terme, la filiale de Bonduelle s'apprête désormais à opérer un virage stratégique. France Champignon produira moins (40 000 tonnes par an prévues, contre 48 000 en 2019-2020), mais davantage de produits haut de gamme, à plus forte marge. Comme le bio ou encore le champignon 1er choix (émincé ou entier), récolté plus jeune, et plus esthétique pour dresser une belle assiette. Une dernière gamme complexe à produire, sur laquelle moins de concurrents officient. L'industriel veut enfin étoffer son catalogue avec des formules cuisinées en sachet (ou " doypack ") : des mélanges de champignons avec des légumes, des sauces....
Soutenu par la grande distribution
Le sauvetage du saumurois possède une valeur symbolique. " Si on disparaît, il n'y aura pour ainsi dire plus de conserves de champignons français en magasin. Car nous sommes le seul industriel ", prévient David Morange.
En incluant l'industriel et les producteurs locaux (intégrés à Bonduelle et d'autres coopératives), la filière fait vivre 670 personnes, dans un rayon d'environ 50 km autour de Saumur. Une filière 100% française, depuis la création de mycellium (la " graine " du champignon) jusqu'aux usines de transformation et à la logistique. Un argument commercial à l'heure où le Made in France est en vogue.
Bâti autour du concept d'origine France, le projet de reprise a reçu le soutien des principaux acteurs de la grande distribution française (dont les noms n'ont pas été mentionnés). Pour sécuriser la filière, des enseignes de GMS ont ainsi accepté de signer davantage de contrats longs (de 3 à 5 ans). France Champignon livrant de nombreuses marques de distributeurs, en plus de la marque Bonduelle.
Si son chiffre d'affaires devrait mécaniquement baisser (de 95 M€ de CA en 2019-2020 à environ 80 M€ l'an prochain), la filiale saumuroise de Bonduelle espère ramener l'activité à l'équilibre dès l'exercice 2021-2022.
