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Laval Virtual : « À cause du coronavirus, le salon pourrait cette année devenir virtuel »
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Laurent Chrétien directeur du salon Laval Virtual Laval Virtual : « À cause du coronavirus, le salon pourrait cette année devenir virtuel »

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Forcés d'annuler Laval Virtual à cause de l'épidémie de coronavirus, les organisateurs de ce salon mayennais dédié à la réalité virtuelle envisagent de mettre en place un cycle de conférences sur internet.

"Un cycle de conférences virtuelles devrait se tenir aux mêmes dates que le salon initial, fin avril", annonce Laurent Chrétien, directeur de Laval Virtual — Photo : ©Prisma Laval / Laval Virtual

Le salon de la réalité virtuelle que vous deviez organiser fin avril a été annulé, pour éviter la propagation du coronavirus. L’édition 2019 avait accueilli 320 exposants et 18 500 visiteurs. Quelles conséquences pour Laval Virtual ?

Laurent Chrétien : La décision la plus responsable était d’annuler. On s’orientait nous-mêmes vers cette conclusion. Une grande partie des exposants n’aurait pas fait le déplacement. Avec l’annulation du salon 2020, on perd quasiment la moitié de nos revenus. Le salon génère 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires, sur un budget total de trois millions pour l’association Laval Virtual. Certes, on dépense aussi moins que prévu. Mais ça représente tout de même un trou, qu’on évalue en centaines de milliers d’euros. À noter que notre salon Laval Virtual Asia, prévu en Chine au mois de juin, n’aura vraisemblablement pas lieu non plus. Actuellement en gestion de crise, on s’organise pour absorber l’impact financier via des restrictions budgétaires, des non-embauches… L’avenir de Laval Virtual n’est pas menacé, mais la crise du coronavirus freine nos ambitions, comme elle ralentit d’ailleurs toute l’économie.

Une partie du salon aura tout de même lieu, via des solutions alternatives et virtuelles. Quelles pistes envisagez-vous ?

Laurent Chrétien : Un cycle de conférences virtuelles devrait se tenir aux mêmes dates que le salon initial, fin avril. Les speakers et participants se connecteront sur internet avec des casques de réalité virtuelle. Ils se trouveront immergés ensemble dans des salles de 50 à 100 personnes, chacun sous la forme d’un avatar réaliste ou façon cartoon, avec la possibilité de poser des questions au conférencier et aux personnes de l’audience. Des conférences par ailleurs retransmises en streaming sur le web, pour les rendre accessibles à un plus large public. Voici ce qu’on envisage. On espère capter une partie des visiteurs prévus dans l’édition physique. Mais c’est surtout un moyen de rendre service aux intervenants de notre communauté qui ont besoin de communiquer.

En revanche, une solution alternative semble plus compliquée pour la visite des stands. Difficile de remplacer la rencontre, l’expérience sur le terrain. On pourrait toutefois prévoir l’accès à quelques solutions : pour tester des visites de musées, etc.

Laval Virtual organise des salons, mais réalise aussi une veille technologique en continu, qui liste les dernières innovations. Vous aidez aussi les entreprises à imaginer ce que la réalité virtuelle pourrait apporter à leur métier en particulier. Votre activité conseil aidera-t-elle à amortir le choc ?

Laurent Chrétien : Ça y participe. Notre activité « conseil et services » représente un tiers de notre budget. Un axe à développer pour compenser une partie de l’impact financier subit en 2020. L’offre s’étend de la veille technologique, aux enquêtes, au benchmarking jusqu’à la location de salles de travail au Laval Virtual Center. Nous explorons beaucoup les usages possibles, pour des entreprises qui s’interrogent : en matière de contrôle qualité, maintenance, formation… On est capable de leur constituer un catalogue des matériels et logiciels existants, ou encore des applicatifs. Récemment, on a travaillé sur la formation à la gestion de stress pour les opérateurs de barrages hydrauliques. Un secteur très spécifique. Et pourtant, on a listé 20 cas d’usages existants ! Dont 5 pertinents pour notre client. Quand on intervient pour l’élaboration d’un cahier des charges idéal, on peut faire gagner 3 à 6 mois aux sociétés et organismes qui nous contactent.

Laval Virtual organise désormais trois salons professionnels par an, autour de la réalité virtuelle. En France, aux Pays-Bas et en Chine. Dernier en date : les « VR Days » à Amsterdam, suite au partenariat signé fin 2019. Un événement destiné aux pros de la santé, de la formation, des médias et des arts. Vous êtes entrés au conseil d’administration ?

Laurent Chrétien : Laval Virtual a pris la présidence des VR Days qui possède un statut associatif comparable au nôtre. Depuis 2017, nous avions déjà commencé à animer des conférences sur l’industrie et la santé pour ce salon. Nos équipes se sont appréciées. Désormais, on s’occupe de tout : conférences, commercialisation des espaces, logistique… L’actuel directeur des VR Days, Benjamin de Wit, reste en poste.

Pourquoi ce rapprochement ?

Laurent Chrétien : Parce que les thématiques des deux salons se complètent. Historiquement, Laval Virtual se positionne davantage sur l’innovation et l’industrie, le hardware et le software. Tandis que les VR Days ciblent surtout la création de contenu : documentaire, jeu vidéo, formation… Des représentants de studios de production, d’agences de communication et marketing arpentent ce salon. Complémentarité aussi côté calendrier, puisque Laval Virtual se déroule au printemps, le Laval Virtual Asia au mois de juin, avant les VR Days en novembre. On occupe le terrain toute l’année. Et pour ne rien gâcher, Amsterdam est une ville accessible et attractive.

Il ne s’agit donc pas d’absorber un concurrent qui cannibalise votre salon…

Laurent Chrétien : Non. Mais en se développant ainsi, on prévient l’arrivée de concurrents potentiels. On pérennise Laval Virtual. En saisissant au passage une superbe opportunité de capter le public des VR Days, un salon orienté vers l’Europe du Nord. Cela nous ouvre des portes vers le Royaume-Uni, les pays scandinaves, les Pays Baltes… Nous en ressentons déjà les premiers effets. Un exemple, notre concours de start-up, jadis composé à 90 % de candidats français, avait majoritairement attiré des candidats internationaux pour l’édition prévue en 2020. Notre équipe, qui réunit 20 personnes, récolte aussi les fruits de son travail d’animation des communautés internationales, de mise en relation, mais aussi les fruits de notre tour d’Europe de 2018, destiné à aller à la rencontre de conférenciers, de chercheurs, de chefs d’entreprise…

Que représente la fréquentation étrangère au salon de Laval ?

Laurent Chrétien : Laval Virtual réunit 55 nationalités. Les visiteurs étrangers représentent 15 % de la fréquentation. Environ 40 % des stands, une centaine d’exposants, sont occupés par des entreprises, laboratoires et organisations venus d’ailleurs. Des Japonais, Chinois, Américains, Canadiens… Quand j’ai pris mes fonctions en 2013, seule une quinzaine d’exposants traversaient les frontières pour venir. Laval Virtual s’internationalise toujours plus.

L’innovation mixe aujourd’hui les technologies. Un salon uniquement consacré à la réalité virtuelle reste-t-il pertinent ?

Laurent Chrétien : Oui. Notre ultra-spécialisation dans les technologies immersives reste pertinente. Mais, nous allons travailler sur les hybridations technologiques. Sans aller jusqu’à se transformer en salon de l’intelligence artificielle ou de la blockchain. Concrètement, Laval Virtual présentera plutôt des innovations liées à la blockchain en réalité virtuelle, les développements de la robotique en réalité virtuelle, ainsi de suite.

À quand la démocratisation de la réalité virtuelle en entreprise ?

Laurent Chrétien : Je pense qu’on a atteint une phase où la démocratisation de la réalité virtuelle en entreprise s’accélère. Dans de nombreux secteurs, toute la conception en matière de prototypage, de design, etc., se fait aujourd’hui en réalité virtuelle. On retrouve beaucoup de cas d’usage dans l’aéronautique ou l’automobile, notamment. Ça y est, c’est dans les mœurs. La partie formation se développe également à toute vitesse. Sur d’autres domaines comme les métiers de la maintenance et du marketing, cela reste un peu plus ponctuel, mais cela va arriver. Sur le marketing, les outils d’aide à la vente se diffusent. Aujourd’hui, si vous êtes concessionnaire de voitures, un configurateur de couleurs en réalité augmentée, utilisé pour projeter une multitude de couleurs possibles sur une voiture, s’avérera plus intéressant que d’accumuler plusieurs véhicules du même modèle au garage simplement pour que le client visualise les différents coloris…

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