Grand Ouest de l’Alliance Forêts Bois : "Le prix des planches à palettes a doublé en deux ans"
Interview # Agriculture

Saïd Difle directeur territorial de l’agence Grand Ouest de l’Alliance Forêts Bois "Le prix des planches à palettes a doublé en deux ans"

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Le marché du bois est en tension. La demande est liée au contexte géopolitique ainsi qu’à la transition énergétique. Première coopérative forestière de France, Alliance Forêt Bois assure le lien entre ses adhérents propriétaires forestiers et les industries.

Saïd Difle, directeur territorial de l’agence Grand Ouest de l’Alliance Forêts Bois, explique que la crise en Ukraine a entraîné l’accélération de nombreux projets de chaufferies au bois énergie — Photo : Alliance Forêts Bois

L’activité d’Alliance Forêts Bois en chiffres ?

Alliance Forêts Bois est la première coopérative forestière de France. Elle regroupe 40 000 propriétaires forestiers adhérents et emploie 680 personnes, pour un chiffre d’affaires 2021 de 200 millions d’euros. Elle est structurée en quatorze agences régionales. L’agence Pays-de-la-Loire-Bretagne est installée à La Flèche (Sarthe). Elle compte 1 800 adhérents, pour un chiffre d’affaires de 11 millions d’euros, avec 13 salariés (dont 8 techniciens forestiers et 4 chauffeurs d’engins). Nous faisons aussi appel à des sous-traitants : une trentaine d’entreprises forestières et une dizaine de transporteurs. En 2021, nous avons planté 240 000 arbres et livré 160 000 m3 de bois aux clients.

40 % des volumes sont destinés au bois d'œuvre, qui sert à la construction, aux charpentes, à l'ameublement, aux parquets et aussi beaucoup pour le bois de palettes

Qui sont vos clients ?

40 % de nos volumes sont destinés au bois d’œuvre, qui sert à la construction, aux charpentes, à l’ameublement, aux parquets et aussi beaucoup pour le bois de palettes. 30 % sont du bois d’industrie, du petit bois utilisé pour la papeterie ou pour des panneaux de fibres. Et 30 % sont du bois énergie, en bûches ou en plaquettes. Nous sommes les intermédiaires entre nos adhérents et les industriels. Plus de 99 % de nos bois sont vendus sur le territoire national. C’est une volonté délibérée de privilégier les clients locaux.

Pour quelles raisons le prix du bois a-t-il augmenté ?

Tous les types de bois ont connu des hausses à deux chiffres. L’exemple le plus symbolique est celui du prix des planches à palettes. Avant le Covid, elles se vendaient 150 €/m3 et aujourd’hui, elles sont à 300 €/m3. Plusieurs explications à cela. La France est importatrice de bois d’Europe du Nord. À la sortie du Covid, la demande a été très forte en Amérique du Nord, détournant les flux de Scandinavie. Il y a eu moins de bois disponible pour nos industries. Ensuite, la guerre en Ukraine a eu un gros impact. Même si la France importe peu de Russie, l’apport de la Russie vers les autres pays européens s’est asséché d’un coup, et les clients sont allés chercher du bois partout ailleurs. Par exemple, la Russie est le plus gros producteur de contreplaqué en bois de bouleau. On le remplace par du contreplaqué en bois de peuplier, produit en France. Nous sommes très sollicités. Les gens se sont donc tournés vers la France, dont le bois est plus cher, parce que nos forêts sont morcelées, plus petites. Ainsi, les prix ont augmenté par raréfaction de la matière importée, et par effet de l’offre et de la demande. Par ailleurs, les coûts de production ont augmenté, principalement à cause du carburant, pour les engins sylvicoles comme pour les camions.

"La France importe peu de Russie, l’apport de la Russie vers les autres pays européens s’est asséché d’un coup, et les clients sont allés chercher du bois partout ailleurs. Les gens se sont donc tournés vers la France"

Quelles évolutions connaît le marché du bois ?

J’en constate trois principales. À court terme, c’est le boom du bois énergie. Ça va très vite, et la crise en Ukraine a entraîné l’accélération de nombreux projets. C’est un mouvement important et structurel. Et enfin, il y a la hausse de la demande liée à la transition énergétique. Le carton peut se recycler sept fois. La demande est forte. Elle a par ailleurs explosé avec le Covid qui a conduit le commerce en ligne à des niveaux jamais vus. Les papetiers français n’arrivent pas à fournir. À long terme, ce sont les possibilités qui s’ouvrent sur la chimie verte, dans le contexte de la sortie des hydrocarbures, et grâce aux évolutions technologiques.

Vous avez tenu votre assemblée générale régionale le 2 juin à Cérans-Foulletourte (Sarthe). Quelle en était l’actualité ?

Nous avons présenté notre plan stratégique Horizon 2030. Il compte trois grands axes : améliorer le service et la rentabilité pour les adhérents ; consolider la structure de la coopérative et adapter la forêt au réchauffement climatique. Alliance Forêts Bois a connu beaucoup de croissance externe. En une vingtaine d’années, dix-huit coopératives ont fusionné. La fusion avec Cofor Ouest date de 2018. On doit continuer d’améliorer les synergies. S’adapter au réchauffement climatique est une nécessité parce que les arbres sont les premiers qui en ressentent les effets, et ils sont aussi une des réponses. Ce n’est pas facile d’annoncer à une assemblée de propriétaires qu’ils ne doivent plus planter de châtaigniers ou de hêtres. Mais on est obligé de se projeter. D’ici 50 ans, ces arbres sont condamnés, ils vont disparaître du territoire français !

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