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Coronavirus : une reprise contraignante pour les chantiers du groupe Luc Durand
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Coronavirus : une reprise contraignante pour les chantiers du groupe Luc Durand

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Après plus d’un mois d’arrêt, le groupe de travaux publics angevin Luc Durand a repris peu à peu ses chantiers et fonctionne cette semaine avec 90 % de ses effectifs. Mais dans son secteur d’activité, les contraintes liées à la crise sanitaire sont importantes et lui imposent une organisation nouvelle.

les chantiers ont repris pour le groupe Luc Durand, comme ici sur la seconde ligne du tramway à Angers (Archives JDE) — Photo : Olivier Hamard JDE

Chaque semaine depuis le 20 avril, le groupe angevin Luc Durand, basé à Pruillé, réintègre de nouveaux salariés pour répondre à ses chantiers en cours, même si certains sont encore à l’arrêt. La reprise a été lente après des semaines d’arrêt. Il a fallu trouver des réponses aux contraintes sanitaires, puis établir un protocole avant de former chaque collaborateur, selon son poste de travail, pour reprendre une activité aux contraintes encore nombreuses.

Un « kit Covid » par salarié

Tous les chantiers du groupe Luc Durand ont été stoppés le 16 mars. L’entreprise a réalisé ensuite quelques interventions d’urgence puis a commencé à étudier, début avril, les possibilités d’une reprise. « Nous avons fait quelques tests pour adapter les contraintes sanitaires à notre fonctionnement, explique Jean-Christophe Louvet, le directeur général du groupe.

Jean-Christophe Louvet, directeur général du groupe Luc Durand — Photo : Groupe Luc Durand

À partir du 20 avril, nous avons réintégré une dizaine de personnes par jour. » Il aura donc fallu plus d’un mois pour que peu à peu, les 400 salariés de l’entreprise ou presque retrouvent le chemin du travail. Aujourd’hui, il en manque en effet toujours une partie, souffrant d’une pathologie à risque, qui est en congés maternité ou en garde d’enfant. Les apprentis mineurs, eux aussi, sont encore à la maison. Au total, 90 % de l’effectif a réintégré l’entreprise après une période de chômage partiel. « Nous avons défini un plan de reprise avec des équipements spécifiques, précise Jean-Christophe Louvet, et nous avons fourni un kit Covid à chaque salarié, qui a aussi reçu une formation avant de reprendre le travail. Nous avons ainsi quatre kits différents, un pour les personnes sur les chantiers, un pour celles de l’atelier de maintenance, un pour celles de la partie administrative et un autre pour le personnel d’encadrement, qui effectue à la fois des déplacements sur les chantiers et du travail administratif. »

Trois catégories de chantiers

Le groupe Luc Durand a aussi classé ses différents chantiers par niveaux de risques : les plus mécanisés, qui ne nécessitent que des engins avec la présence d’une seule personne par machine, sont considérés comme les moins à risque. « Pour les chantiers de pose de pavés, précise Jean-Christophe Louvet, de canalisation ou d’enrobage, qui imposent à la fois la présence d’hommes à pied et de machines, nous sommes plus vigilants. Une troisième catégorie, comme la pose de compteurs d’eau chez les particuliers, nous impose d’entrer chez eux, et nous ne l’avons pour l’instant pas reprise. » 90 compteurs, en attente d’être changés, attendront ainsi encore quelques semaines… Mais beaucoup d’autres chantiers ont en revanche repris graduellement ou sont le point de rependre : tramway dans l’agglomération angevine, traversée d’Arnage dans la Sarthe, chauffage collectif dans le quartier de Belle-Beille à Angers, lotissements ou encore aménagements industriels dans diverses communes de la région engagés avant la crise. « En Maine-et-Loire et en Sarthe, nous n’avons eu aucun problème pour redémarrer, précise Jean-Christophe Louvet. En Indre-et-Loire, en revanche, c’est un peu plus compliqué. » Les entreprises de travaux publics, selon les donneurs d’ordre, se heurtent parfois en effet à des réticences pour le redémarrage des chantiers.

Mages faibles et coût supplémentaire

Malgré cette reprise de l’activité, le rythme reste ralenti par les nouvelles contraintes sanitaires. Mais surtout, celles-ci ont un coût, uniquement supporté pour le moment par l’entreprise : « Ce que nous avons mis en place fonctionne bien, tempère Jean-Christophe Louvet. Les salariés avaient hâte de reprendre. Ils sont très vigilants et la baisse de productivité n‘est pas aussi dramatique que nous l’aurions pensé. Mais économiquement, la situation ne pourra pas durer. Les meilleures années, nos marges sont seulement de 1,5 à 2 %. En ce moment, nous perdons de l’argent ». L’investissement dans les mesures de protection sanitaires est en effet conséquent, et pour chaque déplacement, il faut compter une personne par véhicule. Les salariés se rendent donc sur les chantiers par leurs propres moyens, et c’est l’entreprise qui en supporte les frais. « On les partage tout seul, ironise Jean-Christophe Louvet. Pour l’instant, il y a de la compassion à notre égard, mais celle-ci n’équilibre pas nos comptes ! »

Pour le groupe Luc Durand, qui a réalisé 40 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2018, comme la plupart des entreprises de travaux publics, le retard accumulé pendant la crise offre en ce moment une charge de travail importante Mais la profession signe peut de futurs chantiers : les collectivités, qui comptent pour une grande part des donneurs d’ordre, n’engagent pas de nouveaux projets : les conseils municipaux élus en mars dernier seront installés prochainement. Pour les communes dont les élections ne sont pas terminées, il faudra encore attendre. Conséquences : les conseils communautaires, eux non plus, ne sont toujours pas mis en place et avec eux, autant de chantiers à venir qui ne s’engageront pas avant plusieurs mois.

Si Jean-Christophe Louvet espère un retour à la normale rapide, il sait néanmoins que la crise laissera des traces, dans l’entreprise et dans le secteur des travaux public tout entier : « Si nous pouvions fermer un mois et demi chaque année sans que cela fragilise une entreprise, on le ferait ! Nous n’avons aucune emprise sur les événements. Il faut faire avancer le bateau au milieu de la tempête. Alors, nous allons attendre un éventuel rebond. Mais pour l’instant, je n’ai que des espérances. Dans un an, j’aurai peut-être des certitudes. »

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