Lyon
Investisseurs chinois : Pourquoi ils s'implantent à Lyon
Lyon

Investisseurs chinois : Pourquoi ils s'implantent à Lyon

S'abonner
La Chine, terre de délocalisation, se tourne aussi vers l'international. Les entrepreneurs chinois créent des emplois dans le Rhône, où ils investissent. État des lieux du "made in Lyon" chinois.
— Photo : Le Journal des Entreprises

La Bank of China vient de signer un bail en plein coeur de Lyon. Elle y ouvrira une succursale d'ici à la fin de l'année. Tout un symbole. Et la confirmation de l'intérêt que portent les investisseurs chinois pour le marché lyonnais. «On constate depuis environ trois ans une accélération de la volonté des entreprises chinoises de se développer à l'étranger», souligne Patrick Molle, le directeur de l'EM Lyon, qui a effectué une cinquantaine de voyages en Chine depuis 15 ans. «Lyon pourrait devenir le hub européen de beaucoup d'entreprises chinoises car les Chinois ont des liens affectifs et historiques forts avec la ville qui, de plus, est bien placée sur le plan géostratégique.» Rhône-Alpes est la deuxième région française en matière d'investissements chinois en France. Le nombre de projets chinois a augmenté en moyenne de 22% par an en France depuis 2004. En 2010, ils ont représenté 4% des projets créateurs d'emploi selon l'Agence française pour les investissements internationaux.




Tous secteurs

Si la pharmacie, l'agroalimentaire ou encore l'énergie font l'objet d'un intérêt particulier, force est de constater qu'aucun secteur n'est laissé de côté. Quant aux intentions d'investir sur nos terres, elles peuvent être de plusieurs ordres: se développer à l'international en relais du marché intérieur, acquérir un savoir-faire technique, des marques, des sources de matières premières ou encore des produits stratégiques. Récemment, le fournisseur dans le domaine des TIC Huawei, déjà présent en France, s'est installé à Lyon, identifiée pour la forte présence de ses clients opérateurs télécoms et pour son potentiel d'entreprises. Yingli Green Energy a ouvert à Lyon pour bénéficier de son important bassin photovoltaïque.




Activités pérennisées

Outre ces implantations, plusieurs sociétés sont passées sous capitaux chinois ces dernières années. C'est le cas de NFM technologies (260 personnes en 2010 et 102 M€ de chiffre d'affaires), concepteur et fabricant d'équipements mécaniques lourds de haute technicité, ou encore de Bluestar Silicones (500M€ de chiffre d'affaires avec 3.000 personnes dans le monde dont 600 à Saint-Fons), repris à Rhodia. Dans les deux cas, l'emploi a été préservé et les investissements relancés. Bluestar Silicones vient ainsi d'inaugurer Iris, une nouvelle unité de production de résines qui a nécessité un investissement de 7M€. La pérennité du site du Saint-Fons, qui emploie 120 des 200 chercheurs "silicones" du groupe est ainsi engagée, d'autant que les dirigeants chinois trouvent en France un milieu propice à la R & D: le crédit impôt recherche et une R & D mieux protégée sont des atouts. «Lorsque Rhodia a cédé l'activité, en 2007, nous étions très inquiets, reconnaît Franck Simeone, délégué syndical CFDT de Bluestar Silicones à Saint-Fons. Mais le groupe qui nous a rachetés continue de faire des acquisitions avec une stratégie de long terme sur le segment des silicones, puisqu'il a repris le producteur de silicium Elkem, en Norvège. Toutefois, nous avons toujours la crainte que le groupe copie nos technologies pour monter des unités de production en Chine et nous concurrence avec nos propres produits.» De fait, si le management est resté français, des échanges ont régulièrement lieu entre les équipes des différents pays du groupe. «Je viens à Saint-Fons environ une fois par an, explique Richard Li Pei, responsable R&D chez Bluestar Silicones, en Chine. Nous échangeons sur le développement de nouveaux produits et leurs applications. De nombreuses synergies sont apparues car des connaissances en France ou en Chine peuvent intéresser l'un ou l'autre marché.»




Opportunisme éclairé

«Le cas de Bluestar Silicones est un exemple d'opportunisme éclairé, analyse Aymeric de Mollerat, Director inward investment chez Erai. Ce rachat a permis au groupe chinois d'acquérir une brique manquante et de mettre un pied en Europe pour accéder au rang de société internationale.» L'organisme de la Région vient de renforcer sa présence en Chine en s'installant dans le Pavillon Rhône-Alpes à Shanghai. «Nous cherchons à attraper tous les projets technologiques à valeur ajoutée chinois, expose le spécialiste. Mais les projets sont souvent difficiles à manoeuvrer: nous avons des approches très différentes et la stratégie des entrepreneurs chinois est difficile à discerner.» Les passerelles entre grandes écoles, la présence à Lyon du consulat de Chine, la revitalisation de l'Institut franco-chinois de Lyon: tout est mis en oeuvre pour une meilleure connaissance mutuelle. Reste à séduire les investisseurs et à appréhender le risque de voir s'éloigner les centres de décision.

Lyon