Au printemps, Soitec (Bernin) a clôturé deux nouvelles vagues d'augmentations de capital (151 M€) auprès de ses partenaires, le CEA Investissement, BPI France et le fonds chinois NSIG, qui détiennent à eux trois 43,5 % du capital. « L'objectif était à la fois de rembourser une dette à court terme pour 50M€, de nous désendetter mais aussi de préparer l'avenir avec un investissement de 40 M€ dans l'usine de Bernin en 300mm », explique Paul Boudre, le P-dg de Soitec. La présence du fonds chinois NSIG servira aussi à accompagner Soitec sur le marché asiatique. « Les trois investisseurs ont une vision identique : le modèle d'innovation reste une priorité », ajoute-il. Ces opérations ont permis à Soitec de baisser son niveau d'endettement de 170 M€ à 18 M€, faisant passer ses capitaux propres de 7 à 145 M€. Il s'agit de la quatrième opération de ce type en l'espace de 5 ans, pour un total de 455 M€ levés.
Le désengagement du solaire
Ces augmentations de capital interviennent alors que Soitec a amorcé son désengagement de l'industrie solaire, avec la fermeture de ses deux sites dédiés en Allemagne (Fribourg) et aux États-Unis (San Diego) et cédé ses activités dans l'éclairage. « Nous avons été confrontés à deux batailles dans le solaire : celle de la technologie que nous avons gagnée, en enregistrant le record du monde de performance, et celle de la commercialisation que nous avons perdue », affirme Paul Boudre. Après avoir investi près de 400 M€ dans ce secteur, qui employait jusqu'ici 300 personnes, Soitec a dû faire face à une concurrence asiatique et à une dégradation massive des prix. « C'était une question de survie » justifie le P-dg. « Le solaire n'était pas le coeur de métier de Soitec. La technologie restait trop chère et d'autres ont percé : il fallait prendre une décision », analyse Jean-Pierre Della-Mussia, expert en électronique et ancien rédacteur en chef du magazine Électronique International. « Ce marché n'est pas cyclique comme celui de la microélectronique, où une révolution technologique tire le marché tous les 18 mois », ajoute Sylvie Blanco, professeur à GEM spécialisée dans l'innovation et l'économie locale.
Réduire les coûts
La remise à plat est aussi passée par un plan de réduction des coûts : « Notre CA est presque équivalent à celui de 2013, avec une marge de production supérieure. Nous avons travaillé sur notre structure de coûts, le rendement, la qualité en identifiant les points d'amélioration ». Lors du dernier PSE en 2013-2014, 89 postes ont été supprimés en France tandis qu'un système de mise à disposition de personnel (MAD) a été proposé à 70 salariés sur une durée de 18 mois avec des acteurs du bassin grenoblois. À la clôture de l'exercice 2015, la société affiche un taux d'Ebitda de 15 %. La prochaine étape ? Faire de Soitec une compagnie globale et spécialisée dans les matériaux semi-conducteurs pour la mobilité d'ici 4 ans. Pour cela, Paul Boudre mise sur les plateformes de produits pour les applications digitales et le RF-SOI. En 2016, le groupe projette de réaliser un chiffre d'affaires de 233 M€ (contre 172 M€ en 2015). « La société vient de se restructurer sur ce qu'elle sait faire, avec un carnet de commandes qui est là », estime Jean-Pierre Della-Mussia, qui rappelle que Soitec détient au moins 90 % des parts de marché de la fourniture de SOI (Silicium sur Isolant) à l'échelle mondiale. « Avec la miniaturisation, d'énormes marchés s'ouvrent dans l'IOT, le power ou les composants de puissance, sur lesquels Soitec peut se différencier avec des matériaux performants en énergie à coûts raisonnables », estime Sylvie Blanco.
Electronique. Le leader des semiconducteurs Soitec a signé l'an dernier la fin de son aventure dans le solaire pour se recentrer sur l'électronique. Après plusieurs augmentations de capital, il mise désormais sur l'IOT et l'automobile.
