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Peltex se repositionne, se modernise et se relance sur le marché du textile
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Peltex se repositionne, se modernise et se relance sur le marché du textile

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En misant sur la fabrication locale et les nouveaux produits écoresponsables, l'entreprise textile vosgienne Peltex, spécialisée dans la fausse fourrure, renoue avec le succès. Pour réindustrialiser le site, le directeur Vincent Perry annonce 900 000 euros d’investissements.

Le patron de Peltex Vincent Perry compte investir 900 000 euros sur deux ans pour renouveler son parc machines — Photo : Lucas Valdenaire

Avec son polyester recyclé et son chanvre régional, Peltex entame son virage écoresponsable. Pour l’entreprise textile spécialisée dans la fausse fourrure, fondée en 1961 et basée à Sainte-Marguerite dans les Vosges (CA : 1 million d’euros ; salariés : 16), c’est une question de survie. En effet, celle qui figurait parmi les trois plus grosses entreprises du bassin déodatien dans les années 1970 et qui comptait à l’époque plus de 700 salariés, a durement encaissé les crises successives. Avec l’entrée de la Chine dans la danse du commerce mondial au début des années 2000, les ventes vosgiennes de vêtements et de peluches se sont écroulées. De 30 % chaque année. Attirés par les faibles coûts asiatiques, les clients comme Zara, H & M, Pimkie ou Camaïeu, ont rapidement retourné leurs vestes. "La fausse fourrure est plus épaisse et donc plus difficile à confectionner qu’un simple tissu plat, explique le PDG de 53 ans Vincent Perry. Comme nous ne pouvons pas le matelasser, nous coupons chaque morceau un par un. C’est certain, nous n’avons pas les mêmes cadences que les Chinois. C’est pourquoi il n’existe quasiment plus d’usine de fausses fourrures en Europe et nous sommes les derniers en France."

"Virage écologique"

Pour éviter de sombrer, il a donc fallu se réorienter. "Si nous ne trouvions pas un autre marché plus technique, c’était la mort assurée", confie Vincent Perry. Fini les plaids, vêtements et autres meubles vintage, aujourd’hui Peltex vise le marché du tapis de décoration et surtout celui dédié aux animaux de compagnie. Et pour se relancer définitivement, l’entreprise a pris dès 2019 "un virage écologique" avec une nouvelle gamme de produits intitulés Ecobed et composés de fibre de polyester recyclé. En se fournissant directement en Roumanie et en Irlande, le patron vosgien entend ainsi privilégier un sourcing européen, et donc plus proche de l’usine vosgienne.

"C’est en faisant du local et en apportant des produits nouveaux que nous pouvons nous différencier des Chinois".

Dernier arrivé dans les ateliers de Sainte-Marguerite : le chanvre. Un "produit biosourcé" tient à souligner Vincent Perry. "Nous l’avons cotonisé pour le rendre plus fin et plus doux et nous en avons fait une fausse laine de mouton. Une laine vegan en quelque sorte." Ce chanvre est régional puisqu’il est issu des cultures de Gray en Haute-Saône. Le gérant lorrain est également en contact avec la coopérative spécialisée de la Chanvrière de l’Aube. "C’est en faisant du local et en apportant des produits nouveaux que nous pouvons nous différencier des Chinois".

Le chanvre actuellement utilisé chez Peltex est originaire de Haute-Saône et des discussions sont en cours avec la Chanvrière de l’Aube — Photo : Lucas Valdenaire

Lauréat du plan de relance

Avec le chanvre, Peltex peut aussi remettre un pied dans l’habillement. "Nous avons eu la chance de participer à quelques salons entre deux confinements, raconte Vincent Perry, et de nouvelles marques sont arrivées avec un réseau de distribution différent qui communique beaucoup via les réseaux sociaux et qui aime la transparence. Une fausse fourrure fabriquée dans les Vosges avec du chanvre venu du Grand Est, ça leur parle. Nous commençons à avoir un réel succès et le carnet de commandes explose. Quand je pense qu’en 2019, nous chômions encore par manque d’activité." Pour tenir la cadence retrouvée, Peltex se doit d’investir. Ce qu’elle n’avait pas fait depuis plus de trente ans. Ainsi, 900 000 euros sont annoncés sur les deux prochaines années pour numériser et renouveler un parc vieillissant (certains éléments datent des années 1960) avec, dans un premier temps, une carde neuve et quatre nouvelles tricoteuses, en plus de la récente découpe laser. Une enveloppe importante au regard du million d’euros de chiffre d’affaires réalisé chaque année. Bonne nouvelle : le plan de relance national prendra sa part dans l’industrialisation du site mais le dirigeant ne sait toujours pas à quelle hauteur.

"Il faut montrer que nous ne sommes pas has been. Le travail du chanvre est dans l’air du temps. Les machines à commandes numériques, aussi."

Le retour en grâce du site vosgien passera donc par un matériel plus adapté, notamment à l’utilisation du chanvre : "Nous devons le faire de façon industrielle et non plus artisanale", accorde Vincent Perry. Il passera aussi par la formation et le recrutement. "Nous avons toujours vu les gens partir et nous avons toujours connu une situation de décroissance. Maintenant, c’est fini : nous recrutons", se réjouit le patron. Trois embauches sont déjà au programme. "Comme il n’existe pas de formation textile, je ne peux pas embaucher des gens avec un diplôme de bonnetier. Alors nous les formons en interne".

Pour répondre à la demande, Vincent Perry souhaite notamment installer de nouvelles machines automatisées avec variateurs de fréquences et commandes centralisées — Photo : Lucas Valdenaire

Transmission du savoir

Concrètement, Pôle Emploi sélectionne les candidats, généralement en reconversion, et les six premiers mois de formation sont assurés par la société et l’organisme de formation Opca. "L’objectif est de transmettre le savoir, assure Vincent Perry. Chez nous, les salariés ont tous un certain âge, entre 53 et 55 ans en moyenne. Et ils n’ont jamais eu l’habitude de passer le flambeau. Avec cette formation, il y aura des tuteurs et des points de rencontres entre les anciens et les nouveaux." Peltex, labellisée entreprise du patrimoine vivant, avance même la possibilité d’intégrer un jeune en apprentissage dès la rentrée de septembre. "Anticiper les départs à la retraite de ces cinq prochaines années, c’est un enjeu crucial pour notre survie."

C’est enfin une question d’image qui se joue à Sainte-Marguerite : celle de l’industrie textile. "Nous avons toujours entendu que les entreprises du secteur allaient fermer, conclut le dirigeant. Alors que d’autres, comme nous, réussissent à s’en sortir. Il faut montrer que nous ne sommes pas has been. Le travail du chanvre est dans l’air du temps. Les machines à commandes numériques, aussi. La relocalisation, le made in France et les produits écoresponsables, tout cela a pris du sens. Et le consommateur y est toujours plus sensible."

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