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Mentor : "Notre nouveau groupe va produire entre 8 et 10 milliards d’euros de crédits cette année"
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Benoît Michaux président du groupe Mentor "Notre nouveau groupe va produire entre 8 et 10 milliards d’euros de crédits cette année"

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Filiale du groupe Mentor, le nancéien Spartfin, premier acteur français du regroupement de crédits, vient d’ouvrir son capital au fonds Bridgepoint. Une opération de rachat avec effet de levier qui permet au PDG Benoît Michaux de créer un nouvel ensemble pesant 200 millions d’euros de chiffre d’affaires et employant 2 100 personnes.

Le président du Groupe Mentor, Benoît Michaux, veut accélérer la diversification de son groupe — Photo : Groupe Mentor

Quand avez-vous lancé les premières réflexions autour de l’évolution et du groupe Mentor et quelles étaient les problématiques ?

Ça remonte à un an. Ensuite, la décision a été très rapide. La raison essentielle, c’est que le groupe Mentor est très investi dans la finance. Aujourd’hui, le groupe Spartfin pèse 135 millions d’euros de chiffre d’affaires pour un total de 225 millions d’euros à l’échelle du groupe Mentor. La finance, ce sont des marchés qui fluctuent… On a connu en 2008 la crise financière, le groupe était redescendu pratiquement à l’équilibre. L’enjeu était donc de modifier notre positionnement pour que la finance représente environ 50 % de notre business au sein du groupe. Au début de l’année dernière, beaucoup de nouveaux projets de diversification se présentaient. C’était le bon moment pour nous d’ouvrir notre capital de manière à avoir des moyens financiers pour investir dans d’autres activités. C’était la première idée. La deuxième idée, c’était de se diversifier tout en recherchant un développement plus important dans la finance. Donc ouvrir notre capital, mais à un partenaire qui nous permettrait d’aller beaucoup plus vite dans la finance. Pour faire coup double.

Et l’option qui a été retenue, a-t-elle été de mener un LBO sur le périmètre de Spartfin ?

Nous avons choisi d’ouvrir uniquement le capital de la holding qui couvre les activités dans la finance, Spartfin, qui comprend des sociétés comme Partners Finances, Crédistor, Global Courtage, PretUp ou encore Unilend. Mentor, la holding familiale qui couvre toutes les activités, ne bougera pas.

"Les fonds cherchent des sociétés qui sont en avance, c’est cela qui explique leur intérêt."

Il semble que la place financière se soit beaucoup intéressée à cette opération. Qu’est-ce qui a attiré les fonds d’investissement ?

Il y a une quinzaine de fonds qui sont passés chez nous. Nous sommes une société un peu atypique dans notre marché. Dans le monde de l’intermédiation bancaire, il y a deux grandes familles : le prêt immobilier et la consolidation de dettes. Aujourd’hui, le métier le plus avancé, dans le développement numérique et dans la relation client, c’est le nôtre, la consolidation de dettes. D’ailleurs, Google nous a élus l’année dernière meilleur parcours client dans le monde du crédit, devant toutes les banques et tous les organismes de crédit. Les fonds ont bien noté que nous avons une très grosse avance technologique, ainsi que dans la relation client. Notre métier se fait à distance, donc c’est une relation client à distance. On ne retrouve pas cet aspect dans le courtage du prêt immobilier. Dans ce métier, plus traditionnellement, vous avez une agence, le client rentre dans l’agence, vous discutez, vous amenez votre dossier à l’agence, l’agence va vous accompagner dans une banque… Donc, on est sur un processus assez classique. Nous, nous sommes entre la fintech et le courtier. Et les fonds cherchent des sociétés qui sont en avance, c’est cela qui explique leur intérêt.

Au final, c’est Bridgepoint qui l’a emporté. Qui est ce fonds ?

C’est un fonds basé à Londres, qui opère dans toute l’Europe et gère 30 milliards d’euros d’actifs. C’est un fonds diversifié, mais ils ont fait la différence, parce que dans leur portefeuille, ils avaient le numéro 2 du courtage de prêts immobilier, le groupe Kereis, plus connu sous la marque Empruntis. Le numéro un étant Meilleurtaux.com. L’idée, c’était de dire : aujourd’hui, il y a un groupe qui est très fort dans le prêt immobilier, un autre groupe qui est très fort dans la consolidation de dettes et nous pouvons créer le leader de l’optimisation des finances personnelles de la famille. Aujourd’hui, on va enfin pouvoir proposer une offre globale sur tous les aspects financiers du budget de la famille, du prêt immobilier, du prêt personnel, de la consolidation de dettes, de l’assurance.

Le LBO a-t-il été doublé d’une opération de croissance externe ?

100 % des titres de Spartfin ont été apportés à la holding qui a été créée, au-dessus, et ensuite le groupe Mentor va réinvestir de manière très importante. Mentor ne sera plus majoritaire dans la nouvelle structure, mais je ne peux pas donner plus de précision. Nous réinvestissons beaucoup parce qu’on y croit. D’ailleurs, je reste à la présidence du nouveau groupe. Et la direction générale sera assurée par Sylvain Méharèche, qui est l’actuel directeur général du groupe Spartfin. Ensuite, a été réalisée l’acquisition du groupe Kereis Retail, ou plutôt le groupe Empruntis, avec quatre marques : Empruntis, ACE, Immoprêt et Iregroup. L’ensemble fait 330 agences en France. L’addition des deux fait que nous nous retrouvons, sur notre segment de marché de l’optimisation des finances personnelles, avec un leader national. Cette année, la nouvelle entité va réaliser entre 8 et 10 milliards d’euros de production de crédit. À l’échelle du nouveau groupe, nous allons réaliser 200 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année.

"Quand on est courtier, on travaille une fois tous les 5 ans avec un client. Avec notre application, nous allons pouvoir travailler avec des clients récurrents."

Où le siège de la nouvelle entité sera-t-il ?

Il n’y a pas de fusion, mais des apports de titres. Donc, toutes les entités juridiques vont perdurer. Il y aura donc une nouvelle holding de tête, mais les deux entités qui coiffent les différentes sociétés resteront en place. L’important, c’est que plusieurs marques vont coexister. Pour le public, c’est la marque Empruntis la plus connue. On accolera à toutes les marques le nom du nouveau groupe.

Rester président du nouvel ensemble, était-ce une condition non négociable ?

C’était logique dans la mesure où le fonds n’est pas un fonds de gestion. J’aurais été à 10 %, il y aurait eu un autre président. Mais en étant fortement investi, c’est logique. Et d’ailleurs, le fonds a été vraiment convaincu du projet parce que je réinvestis beaucoup et que je reste à sa tête. Nous sommes une société familiale, qui n’a jamais changé de main, ils savent que le chef d’entreprise est là depuis des années, a amené la société là où elle est, a digitalisé l’activité. Mon métier, maintenant, c’est d’amener de la digitalisation dans le métier du groupe Empruntis.

Quelles sont les synergies possibles avec le groupe Empruntis ?

Dans le groupe Empruntis, finalement, il y a peu de salariés. Environ 220, alors que nous sommes 850. Pourquoi ? Parce que derrière le groupe Empruntis, ce sont des indépendants, des franchisés. On estime qu’il y a environ 1 000 salariés chez les franchisés. Avec les salariés de Spartfin, ça représente un total de 2 100 personnes dans cette activité. Nous allons leur amener tous les outils, tout l’environnement autour de l’entreprise pour que les salariés soient heureux, comme on a essayé de le faire chez nous, de manière que tout le monde puisse bien fonctionner. Nous allons mettre des synergies en place puisqu’ils font déjà du regroupement de crédit, et nous allons leur permettre d’être plus efficaces. Et nous avions la demande en prêts immobiliers que nous ne savions pas bien traiter, naturellement, eux vont nous aider à le faire. Ensuite, à tous les franchisés qui travaillent pour le groupe, nous allons pouvoir amener plus d’outils, beaucoup plus de produits, et notamment tous les produits de notre gamme. À côté de ça, à tous nos clients, nos apporteurs, nous allons pouvoir donner la carte du prêt immobilier. C’est là où il y a de très fortes synergies. Nous ne faisons pas du tout le même métier et pas de la même manière. Et nous avons besoin de tous les salariés. Grâce à toutes ces synergies, nous allons développer, pour tous les particuliers, une application permettant de gérer ses finances tout au long de la vie. Un outil qui rassemblerait un agrégateur de comptes, des simulateurs, la possibilité de faire des demandes en ligne. Demain, l’application pourra, si vous l’autorisez, scruter votre compte pour voir combien, par exemple, pèse votre budget téléphonie et pourra proposer d’autres offres, plus intéressantes. Quand on est courtier, on travaille une fois tous les 5 ans avec un client. Là, on va pouvoir travailler avec des clients récurrents, garder le contact avec pour objectif de soulager les finances de la famille.

Le chiffre de 650 millions d’euros a circulé concernant la valorisation du groupe Spartfin. Qu’en est-il ?

Je ne peux pas confirmer ce chiffre.

"Ils sont 250 chez API Tech et seront 600 à la fin de l’année avec 75 millions d’euros de chiffre d’affaires. Et ça va encore doubler l’année prochaine."

Comment le marché du regroupement de crédits se porte-t-il ?

On estime que la croissance est comprise entre 10 et 15 % par an. En 2019, dans le rachat de crédits, le groupe faisait 17 % de parts de marché intermédié. Aujourd’hui, nous sommes à 26 % de part de marché. Et cette année, nous devrions passer la barre des 30 % de part de marché. Donc, nous grossissons plus vite que le marché, avec des progressions de l’ordre de 20 % par an. Parce que nous avons vraiment de grosses performances grâce à nos outils marketing. On sait rencontrer notre client sur internet. Dans le marketing direct, nous sommes leader. Nous sommes positionnés en numéro un sur Google, et à côté de ça, nous travaillons avec des plateformes d’affiliation. Des comparateurs qui captent du lead. Et sur les trois grosses plateformes de ce type, il y en a une qui nous appartient. Aujourd’hui, 85 % des leads proviennent de nos propres canaux. Ensuite, les 15 % restant viennent de plateformes extérieures qui vont nous amener du lead complémentaire. Nous sommes donc très autonomes dans la production de leads et c’est ce qui fait notre force. Ensuite, nous avons nos propres outils de traitement et des équipes fortes, stables, formées. Et grâce à nos outils très performants dans le traitement de dossier, nous pouvons passer beaucoup plus de temps au service de notre clientèle. À la fin, la clientèle a plus de contacts, plus d’offres et derrière, ça transforme plus. Notre clientèle, ce sont des gens qui ont été accidentés par la vie, mais ce n’est plus la majorité. L’autre partie, qui devient de plus en plus importante, cherche à optimiser son budget. À ces gens, nous donnons la possibilité d’étaler, de réagencer, donc de faire du rachat de crédit un outil de gestion.

Où en êtes-vous dans la diversification du groupe Mentor ?

Nous avons commencé à instruire un gros projet industriel, qui s’appelle API Tech. Il y a 5 ans, c’était trois personnes et 400 000 € de chiffre d’affaires. Aujourd’hui, ils sont 250 et seront 600 à la fin de l’année avec 75 millions d’euros de chiffre d’affaires. Et ça va encore doubler l’année prochaine. La production des automates a commencé dans trois usines. Ce qui va beaucoup évoluer, c’est que nous allons changer de modèle. On fabriquait et on vendait des distributeurs à des exploitants de pizzerias. Nous venons de créer une marque qui s’appelle Les Pizzas Démoniak, pour installer nos propres distributeurs. Nous allons donc fabriquer nos pizzas et devenir exploitants. Ceci parce qu’il n’y a pas de société indépendante, de dimension nationale, dans la distribution de pizzas. Nous allons donc développer notre propre marque nationale de distribution de pizzas. Sur un autre axe de diversification, nous avons une société qui s’est vite développée, Harry Hope, un cabinet de recrutement. Ils étaient trois personnes, il y a 2-3 ans. À la fin de l’année, ils seront 250 personnes, avec 17 agences pour couvrir toute la France. Le groupe Mentor, c’est un accélérateur. On rencontre des gens très motivés avec une forte connaissance de leur métier. Le groupe donne la possibilité à un projet d’accélérer très vite. Aujourd’hui, c’est notre métier et avec cette opération autour du groupe Spartfin, nous aurons les moyens d’aller encore beaucoup plus vite dans notre diversification.

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