Materalia : « Le pôle de compétitivité est une usine à faire des projets »
Interview # Industrie

Danièle Quantin présidente du pôle de compétitivité Materalia Materalia : « Le pôle de compétitivité est une usine à faire des projets »

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Danièle Quantin a été élue à l’unanimité présidente du pôle de compétitivité régional Materalia en décembre dernier. Actuellement à la direction de la R&D du groupe ArcelorMittal, la nouvelle patronne des matériaux trace pour Le Journal des Entreprises les grandes lignes de sa mandature.

Photo : ArcelorMittal

Le Journal des Entreprises : Comment se situe Materalia parmi les nombreux pôles de compétitivité que compte la région Grand Est ?

Danièle Quantin : Materalia est un centre lorrain à l’origine, qui s’est ouvert à la Champagne-Ardenne. Il faut désormais poursuivre l’ouverture vers l’Alsace. Il y a de nombreuses complémentarités entre les différents pôles de compétitivité du Grand Est, donc il faut que chacun trouve sa place. Notre domaine d’application est indispensable à tous les autres. Même lorsque l’on parle de conception virtuelle, il y a toujours un moment où il faut passer par les matériaux, que ce soit pour une voiture, un objet, une photo, ou n’importe quel élément. Nous devons réussir à nous positionner du procédé jusqu’à la valeur finale de la pièce finie, tout en essayant de mettre le meilleur matériau au meilleur endroit et d’apporter les meilleures solutions possibles.

Quels sont les grands projets de votre mandature ?

D.Q. : Nous allons poursuivre la feuille de route donnée par l’Etat et la Région Grand Est. Pour tout ce qui concerne la recherche et l’innovation, l’échelle européenne est une échelle de poids. Notre région possède des frontières avec la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, donc il y a des ouvertures possibles pour un certain nombre de projets, pour lesquels les financements peuvent aussi être à l’échelle européenne. Nous avons une position stratégique vis-à-vis d’autres pays très industriels, et qui peuvent aussi être axés sur les matériaux.

Les matériaux sont-ils à un tournant face aux nouvelles technologies ?

D.Q. : Il est clair que l’ensemble des nouvelles technologies, en particulier le 3D manufacturing, est un virage qu’il ne faut pas rater. Le passage de la conception à la pièce finie par la 3D, qui va transformer du virtuel en réel, avec un chemin qui va être très différent des chemins du passé. Il y a également besoin de matériaux nouveaux dans le domaine de l’énergie, notamment pour son stockage, sa récupération, etc. Il y a des réflexions sur des solutions soit très globales, soit extrêmement locales. Par exemple, la fabrication énergétique au niveau d’un quartier et la réutilisation locale. L’évolution vers le véhicule électrique va aussi être un des sujets majeurs. Est-ce que l’allégement va toujours être une des priorités ou est-ce que l’on ne va pas se retrouver à rechercher d’autres approches matériaux en particulier pour des raisons de coûts ou d’autres compromis ?

Vous voulez favoriser l’émergence de projets de développement de produits industriels par des solutions innovantes, créatives de valeur. De quoi s’agit-il ?

D.Q. : Le pôle de compétitivité est une usine à faire des projets. Un matériau en tant que tel n’a aucun sens, aucune valeur sans application. Le matériau vient dans son processus complet, il ne prend de la valeur que lorsqu’on arrive à la pièce finie et donc à son usage. La valeur est créée par l’usage, pas par le matériau, et il faut bien accompagner des projets qui vont jusqu’au bout. Les projets d’innovation ne sont pertinents qu’à partir du moment où on a une application à l’arrivée, une solution. Les projets que nous labellisons doivent être portés au moins par un industriel, une ou deux PME, et au moins un ou deux laboratoires universitaires. Un bon projet est un projet qui tire le meilleur parti de l’ensemble de ces composants.

Vous souhaitez rendre le pôle plus visible ?

D.Q. : Il y a un manque de visibilité qu’il faut combler, et cela fait partie des projets de cette nouvelle mandature. Notre site internet vient d’être changé et modernisé. Nous sommes en train de réfléchir actuellement avec le bureau de Materalia sur la visibilité, la communication, bien reclarifier quelle valeur ajoutée va apporter le pôle, vis-à-vis de ses adhérents, etc. Il faut tout de même garder à l’esprit que si un projet est très intéressant, il y a des brevets potentiels à la clé, et moins on communique, mieux on se porte dans le domaine de l’innovation et de la propriété intellectuelle. La création de valeur se fait aussi si l’on ne parle pas trop, et pas trop vite. Une communication publique pourrait totalement bloquer un dépôt de brevet, rendre publique l’innovation, et donc le consortium d’entreprises n’en tirerait pas parti.

Où en est l’intégration de projets alsaciens ?

D.Q. : Dans les projets qui sont en cours de labellisation, il y a des entités alsaciennes. Aujourd’hui, pour être un pôle de compétitivité Grand Est, il faudrait que nous changions les statuts, ce sur quoi nous sommes également en pleine réflexion.

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