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L’usine lorraine de Renault poursuit la production dans un climat social tendu
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L’usine lorraine de Renault poursuit la production dans un climat social tendu

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L’usine Renault de Batilly (Meurthe-et-Moselle) fonctionne aujourd’hui à 80 % de ses capacités après un mois-et-demi d’interruption en raison de la pandémie. L’absence de dialogue social et des lacunes dans la protection des salariés pourraient cependant conduire plusieurs organisations de l’intersyndicale CGT, Sud, CFTC, CFDT et FO à engager des actions en justice.

La production a repris le 5 mai dernier sur le principal site mondial d’assemblage de l’utilitaire Master — Photo : © Service communication Renault Batilly

L’usine Sovab de Batilly, en Meurthe-et-Moselle, ne devrait pas être visée par le plan d’économie présenté ce 29 mai par le groupe Renault. Cette filiale du constructeur français, principal site mondial de production de l’utilitaire Master, a bénéficié jusqu’à présent d’un marché porteur. 148 116 véhicules y ont été assemblés l’an passé (+4 %), son record « historique ». Et les chaînes d’assemblage relancées le 5 mai dernier, après un mois et demi d’arrêt, tournent désormais à nouveau en trois équipes.

Avec la survenue de l’épidémie de Covid-19, le climat social s’est pourtant notablement dégradé sur le site où travaillent 2 100 salariés et 400 intérimaires. En l’espace de deux mois, trois droits d’alerte ont été déposés auprès de la direction par une intersyndicale composée de la CGT, Sud, CFTC, CFDT et FO. L’Inspection du travail s’est rendue sur place afin de vérifier l’application des mesures barrières. Ce 27 mai, l’intersyndicale a haussé le ton et invoqué lors d’une conférence de presse de possibles actions en justice. Les organisations dénoncent « l’absence de dialogue social » et la « non-application des règles de protection des salariés telles que définies au niveau du groupe ». Rappelons qu’une action de ce type avait conduit à la fermeture de l’usine Renault de Sandouville (Seine-Maritime) pendant dix jours.

Poursuite pour délit d’entrave

L’intersyndicale CGT, Sud, CFTC, CFDT et FO dénonce l’absence de dialogue social et des insuffisances dans l’application des mesures de protection des salariés — Photo : © Philippe Bohlinger

La CGT, majoritaire à Batilly, a annoncé le dépôt d’un référé en justice pour délit d’entrave aux instances représentatives du personnel. Sud pourrait également agir devant un tribunal. De son côté, la CFDT se donne quinze jours avant d’engager une action judiciaire pour non-respect des mesures définies dans le contrat signé le 2 avril au niveau national par la direction de Renault et les syndicats CFDT, CFE-CGC et FO pour faire face aux conséquences de l’épidémie. « Nous sommes comptables de l’application de ces règles d’hygiène et de sécurité », pointe Kévin Weber, délégué CFDT. En cas de condamnation, le constructeur pourrait être astreint à verser d’importantes indemnités journalières.

À Batilly, la direction de l’établissement (1,9 milliard d’euros de chiffre d’affaires) insiste pour sa part sur les mesures strictes mises en place depuis la reprise de l’activité en lien avec son service médical. Elle en veut pour preuve la validation par le comité social et économique (CSE) « à l’unanimité » de la reprise de l’équipe de nuit le 18 mai dernier.

Elle invoque également une cadence réduite à 600 véhicules par jour contre 730 en temps normal, la mise en place de référents sanitaires, quatre formations validées par la médecine du travail, etc. « Nous avons animé une vingtaine de réunions de CSE et quatre commissions sanitaires depuis l’arrivée du coronavirus en France. Nous avons organisé des visites de terrain avec toutes les organisations syndicales. Aujourd’hui, les équipes nous disent travailler sereinement », expose la direction.

90 questions sans réponse

De son côté, l’intersyndicale évoque 90 questions restées à ce jour sans réponse. Parmi ses principales préoccupations figurent l’absence de respect des distanciations physiques, le refus d’allouer du temps aux salariés pour désinfecter leurs postes et l’absence d’aménagements horaires pour éviter les croisements des équipes. « Sur plusieurs autres sites Renault les salariés travaillent six heures payées huit pour simplifier la mise en œuvre des mesures barrières », pointe Dominique Leclaire, secrétaire de la section Sud. « Des produits ont été déployés en tôlerie pour désinfecter les postes, or il s’agit de produits inflammables interdits qui malgré nos alertes sont toujours là », illustre Didier Sibille, de la CGT. « Nous demandons des pauses supplémentaires pour les salariés qui travaillent aujourd’hui, à une cadence vraiment élevée, avec la nécessité de porter des masques, de se laver régulièrement les mains, etc. », complète Gregory Picciau, de FO.

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