L’entrée dans la cinquantaine est synonyme de saut dans l’innovation pour l’entreprise familiale AML Microtechnique Lorraine basée à Fèves, en Moselle. Cet automne, ce spécialiste de la défense et de l’aérospatial lance commercialement sa start-up baptisée AML Innovation. Cette société innovante a vocation à positionner l’entreprise de 70 salariés (chiffre d’affaires de 9 millions d’euros en 2021) sur le marché de l’impression métallique 3D, en pariant sur une technologie de rupture dans le revêtement de ces pièces de haute précision.
Baptisée LiCS Coating (liquid chemical suspension coating), la technologie a été mise au point en 2018 en partenariat avec l’école d’ingénieurs en génie des matériaux EEIGM à Nancy (Université de Lorraine). Le procédé combine le traitement de surface interne et externe et l’assemblage sous-vide par brasage, "apportant une réponse aux axes actuels d’amélioration de la fabrication additive, à savoir la rugosité, les aspects dimensionnels, les particules détachables ou encore l’hétérogénéité des matières", détaille Jean-Yves Milojevic, directeur d’AML Innovation.
Qualifié par le géant français Thalès
Le projet de 2,7 millions d’euros d’investissement, soutenu par France Relance, a pu passer en phase industrielle avec l’appui des fonds régionaux Groupe ILP et Ader Investissement, de fonds privés et de la Banque Populaire Alsace Lorraine et Champagne. Ce transfert de technologie a été accéléré via une commande passée à Thalès par le ministère des Armées. Le géant français a qualifié AML Innovation au printemps dernier, en vue de fabriquer une première série de composants sur trois ans.
"La pièce en titane devait supporter plus de 300°C, mais pour véhiculer des ondes hyperfréquences à ces températures, le métal devait être conducteur. Nous avons résolu cette problématique en appliquant un revêtement de surface en argent", résume Régis Limbach, président d’AML Microtechnique Lorraine. Le procédé, basé sur la technologie de poudre, permet par ailleurs de déposer la juste quantité de métal, une alternative éco-responsable à l’utilisation de bains chimiques.
Opportunités dans les micro-lanceurs de fusées
Pour Régis Limbach, cette innovation est synonyme de retour aux origines, celles qui ont conduit son père, Alfred, à faire évoluer la société dans les années 80 de la sous-traitance pour la sidérurgie déclinante vers l’aérospatial et la Défense. Aujourd’hui, AML conçoit, usine et assemble des pièces mécaniques de haute-précision en aluminium, des composants dits "hyperfréquences" destinés aux communications spatiales ou terrestres ou encore à la détection et au brouillage des ultra-hautes-fréquences. Les pièces primaires sont livrées au site de Fèves par la filiale AML Microtechnique Maroc (40 personnes), une société créée en 2007 en vue de compenser les problématiques de hausse des cours de l’euro par rapport au dollar.
Avec AML Innovation, l’entreprise garde, malgré les incertitudes liées à la crise énergétique, le regard tourné vers l’horizon. D’autant plus que sa technologie, LiCS Coating, pourrait être utilisée dans le développement de micro-lanceurs réutilisables de fusées, un projet fortement appuyé par l’État français.