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Cuisines Grandidier investit 8 millions d'euros sur cinq ans pour changer de dimension
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Cuisines Grandidier investit 8 millions d'euros sur cinq ans pour changer de dimension

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Depuis sa fondation en 1956, l’entreprise familiale Cuisines Grandidier n’a jamais cessé de grandir. Mais aujourd’hui, c’est un cap immense que s’apprête à franchir le fabricant mosellan de cuisines sur-mesure. En mettant 8 millions d’euros sur la table, le PME compte désormais s’imposer sur le marché national.

Le directeur général Denis Grandidier souhaite relier l’ensemble des ses machines à commande numérique pour automatiser l’ensemble de sa ligne de production — Photo : Lucas Valdenaire

On pourrait croire ses ambitions démesurées. Elles sont, au contraire, à l’image des cuisines qu’elle fabrique : sur-mesure. L’entreprise Cuisines Grandidier (3 millions d'euros de chiffre d'affaires, 40 salariés), basée à Rémilly, en Moselle, s’est fixé un nouvel objectif : partir à la conquête du marché national. Pour cela, la PME a décidé d’investir 8 millions d’euros sur les cinq prochaines années, dont 2,4 millions dès maintenant. Le plan gouvernemental France Relance doit mettre au pot à hauteur de 600 000 euros.

Il s’agit d’abord de pousser les murs. Chose que la PME familiale n’a jamais cessé de faire au cours de son histoire. Créée en 1956 par un maître ébéniste, l’entreprise a connu une première poussée de croissance en 1985 avec l’arrivée du fils Denis Grandidier qui venait, lui aussi, de décrocher son diplôme en ébénisterie. Le duo décide de construire un petit magasin à côté du foyer familial au centre du village de Rémilly. "L’entreprise était petite mais cela suffisait pour rayonner dans un périmètre de 15 kilomètres", se souvient l’actuel directeur général.

"Pendant un an, nous avons fabriqué tous les meubles d’exposition dans l’atelier près de chez nous et nous les stockions dans les chambres des enfants."

Mais à la fin des années 2000, la crise chasse les clients. Avec son épouse, le gérant mobilise ses économies pour acheter un nouveau terrain de 6 700 m² avant d’y construire un magasin à l’architecture atypique de 800 m². "Pendant un an, nous avons fabriqué tous les meubles d’exposition dans l’atelier près de chez nous et nous les stockions dans les chambres des enfants", raconte Denis Grandidier.

Les conseils de PSA

Dès l’ouverture en septembre 2009, les commandes se succèdent. Les recrutements aussi. Que ce soit au bureau d’études ou dans les services commerciaux. "Nos ateliers sont rapidement devenus trop petits". Un an après, de nouveaux travaux sont engagés pour bâtir une unité de production de 1 200 m² à l’arrière du magasin. En moins de deux ans, Denis Grandidier recrute une vingtaine de personnes et reçoit deux prix : celui du savoir-faire en 2011 par le conseil départemental et celui de l'innovation par la Chambre de métiers et de l'artisanat en 2012. "À ce moment-là, nous sortons de l’ombre. Arrivent nos premiers clients luxembourgeois." En 2013, une société est créée au Grand-Duché. Un magasin s’y installe deux ans plus tard.

L’entreprise Cuisines Grandidier a été fondée à Rémilly en 1956 par le père de l’actuel directeur Denis Grandidier — Photo : Lucas Valdenaire

En 2017, la Région Grand Est propose à Cuisines Grandidier d’intégrer son programme dédié à l’industrie du futur. Un ingénieur de PSA est alors sollicité en tant que tuteur pour conseiller le fabricant dans sa transition numérique. Au menu : paramétrage de l’ERP et mise en place de nouveaux logiciels.

Une machine unique en son genre

En parallèle, le déploiement des machines associées aux robots est lancé. En partenariat avec le géant italien Biesse, constructeur de machines, systèmes intégrés et logiciels destinés à l’industrie du meuble, la PME mosellane conçoit une machine unique en son genre. Le prototype, testé pendant un an et demi en Italie, est finalement installé à Rémilly en 2019. Valeur du mastodonte : 640 000 euros. Il faut alors réorganiser les flux et c’est là qu’interviennent de nouveaux ingénieurs venus tout droit de l’ENSTIB, l’école du bois d’Épinal, et de l’ENIM, l’école d’ingénieurs de Metz, là où ont étudié les deux enfants du directeur : Lucas et Thibaut. Entre-temps, un bâtiment d’exposition situé à Metz ouvre ses portes.

"Les meubles seront usinés en quelques minutes avant d’être assemblés et la cadence sera multipliée par dix."

Encore une fois, la place vient à manquer dans l’atelier puisqu’un stockeur de 360 000 euros, offert par l’italien Biesse, y est installé. C’est à ce moment-là que Denis Grandidier échafaude son plan et finit par le soumettre aux autorités de France Relance. Au programme : un nouvel agrandissement des locaux. La communauté de communes est d’ailleurs en train de viabiliser de nouveaux terrains à proximité pour libérer 1,5 hectare supplémentaire. Les travaux sont prévus pour cette année 2021.

À l’intérieur, l’ensemble des machines à commande numérique doivent être reliées entre elles pour créer une ligne de production totalement automatisée. Concrètement, le stock de panneaux sera associé à une scie, une plaqueuse, une machine à usiner et des robots de triage. "Les meubles seront usinés en quelques minutes avant d’être assemblés, se réjouit Denis Grandidier. La cadence sera multipliée par dix."

Une trentaine de recrutements annoncés

En revanche, ce n’est pas parce que les machines s’annoncent plus performantes qu’il est obligatoire de diminuer le nombre de collaborateurs. Au contraire. "Nous n’allons pas forcément embaucher à l’atelier mais plutôt sur des postes de bureaux d’études, de chargés d’affaires, de comptables, de livreurs, ou encore de community managers." Celui qui est passé de 4 à 40 salariés en moins de dix ans compte en recruter une trentaine supplémentaire d’ici cinq ans.

"Se rendre compte qu’on peut tout perdre en quelques mois, ça fait peur."

Pourquoi cette vague d’embauches soudaine ? Parce que l’ambition de Denis Grandidier, elle aussi, est grandissante. Le patron lorrain, habitué aux Grand Est et au Grand-Duché, mise désormais sur le marché national. "En 2020, l’entreprise a souffert, confie-t-il. Nous avons fermé les magasins à trois reprises et comme nous ne travaillons qu’avec des particuliers, les commandes ont été stoppées net pendant les confinements. Se rendre compte qu’on peut tout perdre en quelques mois, ça fait peur. Nous avons donc sollicité un PGE de 450 000 euros pour passer le cap et nous avons déposé notre dossier à France Relance en leur présentant notre programme de développement sur l’ensemble du territoire."

Tripler le chiffre d’affaires

L’idée d’un planneur est ainsi mise sur la table. Autrement dit, un logiciel pointu qui permet aux internautes d’utiliser les bibliothèques de meubles signés Cuisines Grandidier et de modifier leurs dimensions ou leurs éléments en fonction de leurs projets. Un nouveau bureau d’études doit voir le jour pour assurer son développement sur un an et demi. Ce dernier sera tenu par le fils Thibaut, 23 ans. Le bureau initial se retrouve pris en main par son grand frère Lucas, 25 ans.

"En tout cas, nous allons nous battre pour tendre vers les 10 millions d’euros de chiffre d'affaires d’ici cinq ans."

En attendant, la PME s’est lancée à la recherche de partenaires nationaux, qu’ils soient artisans menuisiers ou franchisés dans la décoration et le bricolage. Objectif : dénicher, avec le soutien de la Région, de nouvelles zones d’expositions et de nouveaux interlocuteurs pour passer les commandes et même assurer l’installation chez les particuliers. "Cela nous permettrait d’avoir un développement beaucoup plus rapide, affirme Denis Grandidier. Sans jamais perdre ce qui fait notre spécificité : le sur-mesure. Nos meubles n’ont absolument aucun standard et c’est ce qui fait notre différence. " Sur le papier, un tel programme permettrait de tripler le chiffre d’affaires actuel : "En tout cas, nous allons nous battre pour tendre vers les 10 millions d’euros d’ici cinq ans."

Le gérant Denis Grandidier peut compter sur son épouse et ses deux fils ingénieurs pour l’accompagner dans sa nouvelle ambition nationale — Photo : Lucas Valdenaire

Encore faut-il éviter les obstacles actuels d’approvisionnement, notamment en métal. Sans oublier les appareils électroménagers. "Les délais deviennent de plus en plus longs et parfois, malheureusement, des cuisines partent sans leur électroménager, faute de stocks." Pour les panneaux, les difficultés ne sont pas encore tangibles. "Même si nous pensons que cela va se compliquer dans les prochains mois."

Pour y arriver, Denis Grandidier pourra compter sur ses proches, investis depuis le début de son aventure entrepreneuriale. "Mon épouse était sage-femme et a arrêté son activité pour me rejoindre à la comptabilité et à la relation clients, raconte le père de famille. Et mes deux fils ont toujours baigné dans la société. Ils venaient avec moi sur les salons de machines à bois. À 54 ans, je veux leur mettre le pied à l’étrier et pour l’instant, l’objectif est d’être plus forts à plusieurs. Nous travaillons à quatre par passion, et c’est aussi ça qui fait notre force."

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