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Comment PSA prépare l'électrification de sa gamme
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Comment PSA prépare l'électrification de sa gamme

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Le Groupe PSA va investir 82 millions d’euros sur son site de Metz-Borny pour fabriquer les nouvelles boîtes automatiques électriques, destinées à équiper les modèles thermiques de la gamme. Dans un marché soumis à des normes de plus en restrictives et face à des consommateurs un peu désorientés, tous les constructeurs préparent l'avenir de l'automobile à coups de centaines de millions d'euros. Décryptage de la stratégie de PSA en quatre questions.

Photo : © Groupe PSA

1 – Pourquoi PSA investit 82 millions d'euros à Borny ?

Le Groupe PSA s’est associé à l’équipementier belge Punch Powertrain, afin de créer la co-entreprise « Punch Powertrain PSA e-transmissions ». La structure va produire la future génération de transmissions électrifiées : e-DCT. Les premières boîtes devraient sortir en 2022 et la joint-venture pourrait atteindre sa vitesse de croisière d’ici 2024, soit 600 000 pièces par an. Punch Powertrain la développera et la concevra en interne, au sein de ses centres de recherche situés en Belgique et aux Pays-Bas. Le site messin du Groupe PSA la produira, sur une nouvelle ligne de production dans un bâtiment existant. Budget total : 82 millions d’euros.

Cette enveloppe offre une belle bouffée d’air pour le site de Borny, jusqu’ici cantonné à la production de boîtes manuelles et qui n’avait pas encore bénéficié d’investissement lourd pour garantir sa pérennité. 400 M€ à Mulhouse, 200 M€ à Sochaux ou encore 220 M€ en co-investissement avec le Japonais Nidec sur le site voisin de Trémery, Borny faisait figure de site oublié. La fabrication des boîtes de transmission va nécessiter 400 personnes, prises en interne via des transferts de poste. Pour le moment, cette ligne de production ne générera pas de création d’emplois.

2 – Qu’est-ce que cette nouvelle boîte de vitesses ?

Automatique et à double embrayage, la nouvelle boîte e-DCT sera équipée d’un moteur électrique alimenté en 48 volts pour prendre le relais de l’énergie thermique ponctuellement, sans pouvoir pour autant offrir un roulage entièrement électrique. Derrière cette boîte, qui classe les véhicules qu’elle équipe dans la catégorie « micro-hybridation », la stratégie du groupe PSA consiste à proposer une offre flexible aux consommateurs.

« Cette technologie permet d’obtenir sur nos véhicules une consommation équivalente à des voitures diesel », affirme Marc Bauden, directeur du Pôle industriel de Tremery-Metz du Groupe PSA. Entre le moteur thermique et le 100 % électrique, l’hybridation, qui conjugue énergie électrique et énergie thermique, propose donc deux options aux consommateurs : l’hybridation lourde, qui permet de rouler en 100 % électrique, et la micro-hybridation, qui permet surtout de rentrer dans les clous au niveau des émissions de polluants. Ce système devrait permettre d’atteindre les 95 grammes de CO2 par kilomètre exigé par la norme Euro d’ici à 2021. Pour les constructeurs, c’est aussi le tarif de cette technologie qui est intéressant : 20 à 30 % de moins que pour l’hybridation complète, pour « 50 à 70 % des bénéfices », selon les équipementiers automobiles.

3 – Quelle est la stratégie de PSA sur l’électrique ?

Avec cet investissement à Borny, PSA a fait le choix de basculer du moteur thermique vers les chaînes de traction électrique, en maîtrisant toutes les différentes technologies, de la micro-hybridation au 100 % électrique. Un pari industriel lourd, mais qui permettra au consommateur d’arbitrer. Les boîtes e-DCT permettent de rejeter 16 % de CO2 de moins que les véhicules thermiques traditionnels, ce qui pourrait attirer rapidement une clientèle soucieuse de l’environnement, mais qui hésite encore à passer au 100 % électrique, notamment pour des questions d’autonomie.

« Pour l’instant, nous sommes les seuls à proposer cette technologie. »

Les prix des véhicules micro-hybrides ne sont pas encore déterminés, mais ces derniers sont conçus pour pouvoir être accessibles à toute la population. « PSA bénéficie d’une longue histoire dans l’hybridation. Nous proposons six modèles électriques et ce partenariat nous fait entrer dans une nouvelle génération de modèles hybrides », explique Frédéric Laganier, directeur de la stratégie industrielle de PSA.

Le groupe est, pour l’instant, le seul constructeur à avoir choisi de s’engager aussi résolument vers la micro-hybridation. « Nous cherchons à être à la pointe. Nos concurrents vont peut-être proposer une technologie similaire. Mais, pour l’instant, nous sommes les seuls », se réjouit Frédéric Laganier.

Si le pari industriel est risqué, les sites PSA de l’est de la France tirent leur épingle du jeu. Mulhouse va produire le premier hybride rechargeable du groupe, la DS7. C’est à Trémery que le moteur électrique qui devra équiper les véhicules 100 % électriques du groupe sera produit. Borny fabriquera la boîte de vitesses équipant les véhicules micro-hybrides et PSA pourrait utiliser les compétences d’un site ardennais, basé à Charleville-Mézières, pour sortir un nouveau réducteur de vitesse destiné à faire fonctionner les systèmes hybrides.

4 – Les automobilistes vont-ils se convertir à l’électrique ?

Les chiffres sont vertigineux : d’ici à 2025, les constructeurs automobiles vont investir près de 80 milliards d’euros pour passer à l’électrique. Pourtant, coincés entre les exigences environnementales dictées par le législateur et les réticences du consommateur pour le 100 % électrique, les constructeurs avancent prudemment.

Le Groupe PSA se tient prêt à affronter le virage de l’électrification de masse, dont il est impossible de déterminer la date de bascule, et peut donc désormais proposer des véhicules hybrides, thermiques et micro-hybrides. « Personne ne sait ce que sera le marché mais nous sommes confiants. Nous ne savons pas à quelle vitesse va se développer le tout-électrique, mais il faut anticiper la possibilité que ce soit rapide et avoir des plateformes flexibles », détaille Frédéric Laganier.

Lors du dernier Mondial de l’Auto à Paris, qui s’est tenu en octobre, PSA a présenté un véhicule 100 % électrique, autonome, et inspiré du mythique coupé Peugeot 504 : le concept-car E-Legend. L’engouement des visiteurs a réussi à éclipser les modèles présentés par Ferrari, et une pétition a été mise en ligne pour que le concept-car soit produit. Le signal est assez fort : en matière d’automobile, les consommateurs sont prêts à se laisser séduire par la nouveauté.

En 2017, l’électrique pesait seulement 1,2 % des immatriculations, mais avec des croissances à deux chiffres. Qu'en sera-t-il en 2020 ou 2030 ? Du côté des constructeurs premium allemands, la micro-hybridation est perçue comme un dispositif technique permettant de rentrer dans les clous de la législation en matière d’émission de polluants. Après avoir beaucoup hésité, les Allemands investissent très lourdement pour aller vers le 100 % électrique : Mercedes produira d’ailleurs à Hambach, en Moselle, son premier véhicule électrique, pour un investissement de 500 M€. L’équipementier Valeo, qui possède l’essentiel du marché de la micro-hybridation, estime que d’ici à 2025, l’hybride 48 volts pourrait peser entre 10 et 15 % du marché.

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