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Avec son "rail vert", Saarstahl Rail retrouve la voie de la croissance
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Avec son "rail vert", Saarstahl Rail retrouve la voie de la croissance

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Malgré la flambée des coûts de l’énergie, l'allemand Saarstahl Rail table sur un résultat d’exploitation de son usine d’Hayange, en Moselle, à l’équilibre dès l’exercice 2023. Un peu plus d'un an après la reprise de l'ex-site Liberty Steel, les investissements consentis semblent porter leurs fruits.

À partir de blooms venus de l’aciérie d’Ascoval et chauffés à 1 200°C, le laminoir de l’usine d’Hayange forme des rails qui peuvent atteindre 108 mètres de long — Photo : Jean-François Michel

Lors de la reprise de l’usine d’Hayange, en août 2021, le président de Saarstahl Rail, Klaus Richer, se souvient de l’ambiance tendue des premières réunions avec les représentants du personnel du site, alors encore salariés du britannique Liberty Steel. "Ils se demandaient ce que nous étions venus faire ici", se souvient l’industriel allemand. "Maintenant, tout le monde a compris. Nous sommes là pour rester, et nous avons un projet industriel, pas une logique financière."

En reprenant les sites d’Ascoval à Saint-Saulve dans le Nord et de Liberty Rail à Hayange en Moselle au groupe Liberty Steel, le sidérurgiste allemand Saarstahl (CA : 2,1 Md€ ; 6 400 salariés) voulait se positionner sur un nouveau marché, le ferroviaire, avec un produit présenté comme un "rail vert", comprendre un rail qui a été produit en émettant peu de CO2. "À Ascoval, nous avons un four électrique capable de produire un acier très décarboné par rapport à nos concurrents", insiste le président de Saarstahl Rail. "Ici, à Hayange, nous avons l’unique laminoir à rail de France. Le tout forme un ensemble industriel unique en Europe."

Vers des résultats positifs dès 2024

Employant 450 personnes, l’usine Saarstahl Rail d’Hayange a terminé l’exercice 2021 sur un chiffre d’affaires de 219 millions d’euros, avec des pertes de l’ordre de 32 millions d’euros. Pour 2022, les efforts consentis par le groupe allemand pour convaincre les grands donneurs d’ordre du ferroviaire d’acheter du "rail vert" ont commencé à porter leurs fruits : le chiffre d’affaires devrait ressortir à 300 millions d’euros, et Klaus Richter estime que l’équilibre d’exploitation sera atteint dès 2023. "Ensuite, en 2024 et 2025, nous serons dans le positif et pourrons dégager des résultats", assure l’industriel.

Le président de Saarstahl Rail, Klaus Richter, se pose en industriel bien décidé à convaincre les acteurs du ferroviaire en Europe d’acheter son "rail vert" — Photo : Jean-François Michel

"Pour 2023, le niveau du carnet de commandes est bon", confirme Nadine Artelt, la directrice du site Saarstahl Rail d’Hayange. "Mais nous avons besoin de vendre des volumes plus importants, notamment parce que le coût du transport reste élevé." Capable de produire jusqu’à 343 000 tonnes de rail par an, le site d’Hayange est descendu à 280 000 tonnes sur les dernières années, mais devrait vite retrouver des volumes plus importants : "Pendant les trois années qui viennent, nous allons retrouver un volume de production de l’ordre de 320 000 tonnes", assure Klaus Richter.

Une augmentation rendue possible par des gains de compétitivité sur le site, d’environ 7 à 8 % : "Nous avons investi 7 millions d’euros depuis la reprise", rappelle Klaus Richter, qui évoque pour les années à venir un projet de refonte totale de l’outil informatique du site, pour un total de 3,8 millions d’euros.

Touchés par la flambée des prix de l’électricité et du gaz, les coûts de production de Saarstahl Rail restent cependant compétitifs par rapport à ceux de la concurrence. "Certes, nos concurrents qui exploitent des hauts-fourneaux n’ont pas été touchés par la hausse des prix de l’électricité", concède le directeur commercial de Saarstahl Rail, Dominique Chiesura. "Mais ils payent déjà la tonne de carbone émise à 80 € ou 90 €. Et demain ? 200 € voire 250 € la tonne ? À ce moment, l’équilibre sera rétabli et nos produits redeviendront très compétitifs."

Des marchés à protéger

Au-delà des négociations avec ses clients, Dominique Chiesura veut retenir "le grand engouement" des acteurs européens du ferroviaire pour le "rail vert". Et pour aller au-delà d’une production bas carbone, et faire un pas vers l’économie circulaire, Saarstahl Rail a signé un accord avec la SNCF pour récupérer des vieux rails afin d’en refaire des neufs. "Les volumes concernés sont confidentiels, mais il s’agit de plusieurs dizaines de milliers de tonnes", assure Dominique Chiesura.

Aujourd’hui, Saarstahl vend des rails à la SNCF, la RATP, travaille aussi en Belgique, en Italie ou encore en Suisse mais, paradoxalement, peine encore à convaincre la Deutsche Bahn d’acheter des volumes importants. "Nous sommes en négociation avec eux", indique Nadine Artelt. "Nous avons commencé par leur livrer de petites quantités, nous espérons les augmenter rapidement."

Conscient du regain d’intérêt pour le transport ferroviaire, Saarstahl Rail veut jouer à fond la carte de la "durabilité" : "Nous accordons beaucoup d’importance à un environnement sans CO2. Il est normal et inévitable que cela ait un coût", prévient Klaus Richter, en insistant sur la nécessité de protéger le marché européen des rails produits dans des zones sans aucune contrainte liée aux émissions de CO2.

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