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Les Bureaux du Cœur : "Des milliers d'entreprises pourraient héberger des personnes en situation de précarité"
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Les Bureaux du Cœur : "Des milliers d'entreprises pourraient héberger des personnes en situation de précarité"

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Des dirigeants nantais ont fondé l’association Les Bureaux du Cœur, qui offre une solution d’hébergement dans les entreprises à des personnes en situation de précarité. Le mouvement se développe maintenant dans d’autres villes de France, comme l’explique Pierre-Yves Loaëc, dirigeant de Nobilito et vice-président de l’association.

Pierre-Yves Loaëc, dirigeant de Nobilito et vice-président de l’association Le Bureaux du Cœur — Photo : Monsieur Roni

D’où est venue l’idée des Bureaux du Cœur ?

Pierre-Yves Loaëc : En 2019, au Centre des jeunes dirigeants de Nantes, nous sommes partis du constat que nos bureaux sont chauffés la nuit et le week-end, équipés de sanitaires, souvent d’une douche, d’équipements permettant de se restaurer sur place. Ils peuvent donc accueillir quelqu’un en situation de précarité lorsque personne n’y travaille. Avec l’association Saint-Benoît-Labre, qui oeuvre auprès de ces personnes en difficulté, nous avons travaillé sur les modalités d’un hébergement temporaire en entreprise.

Sous quelles conditions la personne est-elle accueillie ?

Pierre-Yves Loaëc : L’association adresse à l’entreprise volontaire une personne qui a besoin d’un hébergement, pour qui une solution collective n’est pas adaptée, parce qu’elle a dû quitter son logement en urgence ou qu’elle est en réinsertion et n’a pas les moyens de se loger. Nous ne pouvons pas accueillir de personnes souffrant d’addictions ou de maladies psychiques, de couples ou de mineurs. Un entretien avec le dirigeant ou un collaborateur détermine les conditions de l’accueil, de trois mois renouvelables. La personne est invitée sans contrepartie. Elle a la clé des bureaux et dispose de son espace. Elle peut prendre une douche, manger, dormir en toute sécurité, laisser des affaires dans une armoire au besoin.

Est-ce que cela nécessite un aménagement important ?

Pierre-Yves Loaëc : Dans l’entreprise, il suffit de reconfigurer un espace pour que la personne invitée puisse dormir, avec un coin lit, une armoire, l’accès aux sanitaires. C’est très facile à mettre en place. L’association visite les entreprises candidates pour les conseiller sur les aménagements, elle valide et labellise les hébergements. Nous avons lancé un appel à des dons et créé un fonds pour aider à aménager ces espaces.

Cette action de solidarité va-t-elle au-delà de l’hébergement ?

Pierre-Yves Loaëc : Les entreprises impliquent aussi leurs équipes dans l’aventure. La personne invitée, lorsqu’elle arrive, croise les collaborateurs. Parfois l’un d’eux a préparé un plat pour le repas du soir. Le matin, on partage souvent un café. Chez Nobilito, un collaborateur a donné un sac de sport pour remplacer un vieux sac plastique usager, un autre a offert un smartphone dont il ne se sert plus. On crée des passerelles simples entre des gens en situation de précarité et des personnes insérées. Grâce à nos réseaux, il est parfois plus facile pour elles de trouver un emploi. Quasiment 100 % des personnes hébergées ont aujourd’hui un travail.

Née à Nantes, l’initiative se développe-t-elle ailleurs ?

Pierre-Yves Loaëc : Six entreprises nantaises proposent actuellement des hébergements d’urgence et nous avons de plus en plus de propositions. Au Mans, un projet est en cours et à Sète, dans l’Hérault, une première entreprise a ouvert ses bureaux. Il y a aujourd’hui une dizaine de délégations dans différentes villes qui se rapprochent d’associations œuvrant auprès des personnes sans domicile sur leur territoire. L’ambition à dix ans est de proposer 60 000 hébergements d’urgence en France, ce qui correspond à environ 20 % des besoins.

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