Le recrutement de plus en plus difficile dans la région
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Le recrutement de plus en plus difficile dans la région

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Près d'une entreprise sur deux en Loire-Atlantique et en Vendée dit avoir des difficultés pour recruter. C'est beaucoup plus que l'an dernier et beaucoup plus que la moyenne nationale. Industrie, services, tous les secteurs sont concernés. Témoignages.

— Photo : Le Journal des Entreprises

« Recrute conducteur de ligne », « je recrute un plaquiste ». En Vendée, que ce soit sur la devanture de grands groupes comme Dubreuil aux Essarts, Véranda Rideau à La Roche-sur-Yon ou sur la façade de PME comme Rondeau aux Herbiers ou encore des artisans comme la SARL Bernard Texier à La Ferrière, les offres d'emplois s'affichent en immense sur des bâches fixées sur les façades des entreprises, de préférence bien visibles depuis la route pour toucher un maximum de personnes de passage. Face à la pénurie de main-d'oeuvre, tous les moyens sont bons pour attirer les candidats. Car les difficultés de recrutement grandissent dans la région.

Plus de difficultés que la moyenne nationale

Près de 41 % des entreprises des Pays de la Loire (44 % en Loire-Atlantique, 41 % en Vendée) déclarent avoir des difficultés pour recruter. C'est beaucoup plus que l'an dernier (33 %) et c'est beaucoup plus que la moyenne nationale. En France 37,5 % des entreprises affirment avoir des difficultés pour trouver des candidats à l'embauche. C'est ce que révèle l'enquête « Besoin de main-d'oeuvre » réalisée par Pôle emploi et le Credoc. Et cela vaut pour tous les secteurs, de l'industrie au numérique. Car nombreux sont ceux qui disent ne plus trouver de candidats sur Pôle emploi ou sur les autre sites classiques de recherche d'emploi. « J'ai posté une annonce pour un poste d'assistance commerciale sur Pôle emploi, mais je me retrouve avec seulement quatre réponses qui ne correspondent pas du tout au profil recherché et sans expérience dans mon domaine », raconte un industriel nantais qui préfère rester discret. « On fait appel à un cabinet de chasseur de têtes, on a notre propre chasseur de tête, on publie des annonces sur l'Apec, on utilise aussi les réseaux sociaux et on ne trouve pas », raconte quant à lui Régis Bourgaud, gérant de Next Décision, un cabinet d'expert en informatique décisionnelle basé à Nantes. Le recrutement est devenu un stress permanent. Pour s'en libérer, de plus en plus de boites décident de créer leur propre école de formation, comme l'a fait récemment Janneau Menuiserie ou encore Soloc Rabotage.

Nouveaux critères de recrutement

D'une manière générale, beaucoup recrutent désormais sur le savoir-être plus que sur le savoir-faire, quitte à investir ensuite dans la formation du salarié. C'est ce que fait le groupe agro alimentaire Eurial, qui embauche via des job dating. « Depuis des mois, nous ne parvenions pas à recruter pour des postes dans la maintenance. Cet échec nous a incités à tenter une approche différente, à innover dans nos pratiques de recrutement », explique Delphine Pineau, DRH du pôle Ingrédients et nutrition chez Eurial, branche lait d'Agrial.

Savoir-être attractif

Mais avant de former des candidats, encore faut-il leur donner envie de rejoindre l'entreprise ! C'est le nerf de la guerre dans le secteur de l'industrie qui souffre encore de nombreux clichés sur la pénibilité. Là aussi les difficultés de recrutement n'ont jamais été aussi grandes. Il y aurait entre 2.000 et 2.500 postes à pourvoir en Pays de la Loire d'ici à la fin de l'année dans l'industrie, dont la moitié dans le naval, l'aéronautique et les énergies matines renouvelables (voir encadré). D'autres entreprises se plient en quatre pour attirer les meilleurs profils, quitte à céder aux caprices de divas. C'est flagrant dans le monde du numérique où la pénurie se fait également sentir. Rien qu'à Nantes, on cherche actuellement 200 postes de développeurs, devops, mais aussi data scientist, growth hacker, spécialistes du machine learning et autres nouveaux métiers du numérique.

Une pénurie de main-d'oeuvre qui a fait augmenter les salaires de 5 % dans le secteur cette année dans le Grand Ouest, selon le baromètre annuel du cabinet de recrutement Externatic, basé à Nantes, Rennes et Bordeaux. « On a déjà vu des embauches se conclure en trois heures. Les bons profils se donnent trois semaines pour choisir parmi une quinzaine de propositions », explique Mathieu Debroise consultant IT pour Externatic. Certaines sociétés chouchoutent les nouvelles recrues en offrant un package de 7.000 euros pour aménager le poste de travail. « Le critère n°1 de certains, c'est de travailler en centre-ville et de pouvoir y aller à pied », rapporte Benjamin Casseron, consultant pour le cabinet de recrutement. Certaines entreprises basées à Carquefou ou en banlieue nantaise ont donc ouvert spécialement des bureaux en ville. Le critère n°2, c'est la flexibilité entre vie professionnelle et vie privée. « Ils veulent pouvoir travailler à 80 % de leur temps en télétravail, c'est vraiment de plus en plus demandé », remarque Mathieu Debroise.

À la recherche du sens

Mais plus que cela, ce que cherchent les candidats c'est un poste avec du sens. « Ils font attention à la pérennité de l'entreprise, au poste qu'on leur propose, à la mission », d'autant plus qu'ils raisonnent en terme de carrière et changent de maison en moyenne tous les trois ans. Un besoin de sens repéré par le spécialiste RH Lucca qui propose à ses employés de consacrer leurs jeudis après-midi à un projet qu'ils aimeraient mettre en place dans l'entreprise. L'entreprise qui a créé un logiciel de paie va encore plus loin en laissant la possibilité à tous ses employés de fixer leur propre salaire (voir ci-contre). Plus efficace que les bâches placées sur l'entreprise ? « On a déjà eu quelques contacts grâce à ce procédé », répond Arnaud Ringeard président de l'entreprise Rondeau et par ailleurs président de la CCI Vendée. « Ces bâches ne sont pas la solution aux problèmes de recrutement, mais elles permettent de faire savoir que l'on recrute aux nombreux touristes de passage dans le département. Ça pourrait leur donner des idées », poursuit-il.

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