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Le juge donne son feu vert au Crédit Mutuel pour l'intelligence artificielle Watson
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Le juge donne son feu vert au Crédit Mutuel pour l'intelligence artificielle Watson

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Le tribunal de grande instance de Nantes a validé l’utilisation du programme d’intelligence artificielle Watson, développé par IBM, par le Crédit Mutuel de Loire-Atlantique et du Centre-Ouest.

— Photo : Le Journal des Entreprises

Le 28 novembre, le tribunal de grande instance de Nantes a validé l’utilisation, par le Crédit Mutuel de Loire-Atlantique et du Centre-Ouest (CM-LACO) du programme d’intelligence artificielle Watson, développé par le groupe américain IBM. Le juge des référés du TGI de Nantes a donné tort au Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du Crédit Mutuel de Loire-Atlantique et du Centre-Ouest, qui s’inquiète de la mise en œuvre du programme Watson au sein de la banque.

Le président du TGI Rémi Le Hors a en effet annulé une délibération du CHSCT de la banque mutualiste, qui avait voté le 17 juin dernier le recours à une expertise : cette application développée par IBM avait défrayé la chronique en 2011 en remportant la version américaine du jeu télévisé "Jeopardy" face à deux humains, pourtant champions de l’émission…Les syndicats de l’entreprise, comme Force Ouvrière (FO), redoutent ainsi à terme de vastes plans sociaux dans les banques : selon un chercheur américain, l’intelligence artificielle va mettre « 50% de l’humanité au chômage ».

« Si l’intelligence artificielle devait être appliquée à la justice, Monsieur le président, vos jugements pourraient être prérédigés à l’avance et dirigés vers la bonne greffière, selon sa spécialité », s’était ainsi amusé, lors de l’audience le 27 octobre, Maître Jean-Christophe David, l’avocat du CHSCT du Crédit Mutuel Loire-Atlantique et du Centre-Ouest. Il avait aussi rappelé que le TGI de Paris, dans une affaire similaire, avait donné raison au CHSCT du CIC d’Ile-de-France.

« Gagner du temps »

Reste qu’au sein de la banque Watson lira simplement, dans un premier temps, les emails des clients et les dirigera vers les agents d’accueil dès lors qu’il s’agit par exemple d’une simple demande de virement ou d’envoi de chéquier. Le CM-LACO estimait que la délibération de son CHSCT devait être annulée, dans la mesure où cette technologie - « qui ne concernera que soixante collaborateurs dans un premier temps » - ne modifiera pas « de façon importante » les conditions de travail de ses salariés. Les élus du personnel, eux, sont convaincus du contraire : « 78.882 collaborateurs » et « 30,7 millions de clients » vont être impactés par Watson, selon eux. « Les réponses préformatées adressées à la clientèle engendreront un impact négatif », redoutent-ils également.

« Les clients ne seront pas en relation directe avec l’application », avait répliqué sur ce point la direction. « Ce projet vise à offrir aux salariés une amélioration des moyens mis à leur disposition. Aucune atteinte ne sera portée à la confidentialité des messages entre les salariés et les organisations syndicales, les avocats et les interlocuteurs relevant de la vie privée. L’objectif est de gagner du temps en allégeant les tâches répétitives, temps qui sera désormais consacré par le chargé de clientèle à son cœur de métier », résumait le CM-LACO.

Un outil « facultatif »

« La mise en place (…) du programme Watson vise le classement et le transfert automatique des e-mails professionnels envoyés aux chargés de clientèle par les clients, la détection (…) de l’intention de leur auteur, ainsi que des propositions de réponse », résume, en préambule de son ordonnance, le président du tribunal de grande instance de Nantes. Mais ce projet « ne prévoit aucun déplacement de personnel, aucun changement de métier, ni aucune modification des horaires et conditions de travail », fait remarquer Rémi Le Hors, pour qui le nouvel outil va surtout « faciliter » le tri, la consultation et le traitement des « nombreux e-mails » reçus par les banquiers du Crédit mutuel.

Le magistrat relève également le « caractère facultatif » de Watson, les salariés pouvant continuer à travailler avec leurs anciens outils « en fonction de l’intérêt qu’ils y trouveront ». Il a donc annulé la délibération litigieuse, tout en ordonnant au Crédit mutuel de payer 1.000 euros à son CHSCT pour ses frais de justice - comme c’est toujours le cas dès lors qu’aucun « abus » de procédure n’est établi.

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